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Nous venons de voir ce qu'on doit penser de cette variété. Ce qu'ils ajoutent est presqu'insignifiant ou était déjà connu. Les fleurs, disent-ils, plus ou moins grandes, plus ou moins nombreuses, sont jaunes ou rouges (1).

Thiébaut de Bernéaud (1838) fait encore mention de cette variété pétiolée à laquelle il donne des feuilles plus petites, des fleurs d'un rouge, foncé, et qu'il dit peu connue (2).

Mais Kunth (1843) ne parle plus que des fleurs et rejette par conséquent la variété de Thouin (3).

Deux espèces nouvelles ont aussi été indiquées, l'une par le rev. William Colenso dans le Journal de botanique de Londres, sous le nom de P. Forsterianum (4), et l'autre, d'après les manuscrits de M. Dalton Hooker, sous celui de P. Colensoi, par M. Raoul dans son énumération des plantes de la Nouvelle-Zélande (5); mais on n'en trouve absolument que le nom dans ces ouvrages. Ils n'y sont ni l'un ni l'autre accompagnés de la plus courte description.

(1) Variat floribus minoribus et majoribus, numerosioribus, flavis vel rubris, foliis longiùs petiolatis. Syst. végét., t. VII, p. 621.

(2) Il existe une variété de cette plante. Elle se distingue du type de son espèce, d'abord par ses feuilles plus petites et offrant à leur base' un pétiole de quatre à cinq centimètres de long; ensuite par la couleur de la fleur qui est d'un rouge foncé. Elle est encore très-peu connue. Dict. pittoresque d'hist. natur,

1. VII, p. 401.

(3) Flores intensè flavi, basi virentes; in icone Hook. sordidè crocei. Variat floribus flavis et rubris. (Schultes, fil.) Kunth, Emmer. plant. t. IV, p. 274.

....

(4) Here, also, my new species of Phormium (P. Forsterianum was very plentiful... — London, Journal of Botany, t. III, p. 8 (1844).

(5) Choix de plantes de la Nouvelle-Zélande, recueillies et d crites par E. Raoul, chirurgien de la marine, p. 11 (1846)

Nous devons maintenant relever une erreur qui se trouve dans la Revue horticole. Nous y avons dit (1), croyant exprimer ainsi l'opinión de M. D. Hooker dont nous adoptions les deux espèces, que notre plante à fleurs rouges et vertes était le véritable P. tenax de Forster et que l'espèce à fleurs orangées dont M. Decaisne nous avait envoyé les analyses se rapportait au P. Colensoi; nous nous sommes trompés. Cette erreur dont nous n'avons pas tardé à nous apercevoir tient à ce que dans le passage que nous avons cité d'une lettre de M. D. Hooker relative à la plante qui nous occupe un mot qui en renverse le sens, le mot rouge a été substitué au mot jaune, substitution échappée, sans nul doute, à la plume de ce botaniste, qui, parti pour les Indes avant qu'il nous ait été possible de lui soumettre nos observations, ne l'a pas reconnue, il est vrai, mais qui nous paraît confirmée par les détails suivans, que son père, sir William Hooker a bien voulu nous transmettre. Voici en effet ce que nous écrit le savant directeur des jardins royaux de Kew,

<< Outre l'ancienne espèce de Phormium à fleurs jaunes, nous avons reçu de M. Colenso une espèce à petites fleurs rouges (peut-être la même que celle que vous me dites avoir vu fleurir à Cherbourg). M. Colenso ayant le premier attiré notre attention sur cette plante, mon fils l'étiqueta P. Colensoi. Il s'était d'ailleurs assuré que le Phormium des dessins originaux de Forster était aussi à petites fleurs rouges. D'après cela on pourrait hésiter sur la question de savoir laquelle des deux plantes, celle à fleurs jaunes ou celle à fleurs rouges doit porter le nom spécifique de tenax (nom qui, suivant moi, ne doit être supprimé pour aucun motif); mais je ferai observer qu'il paraît que Forster a cru qu'il n'existait qu'une seule espèce de Phormium et qu'il est plus que probable que le nom de P. tenax s'appliquait dans sa pensée à la variété la plus commune qui est, je

(1) Tome VII, p. 5, fig. 1 (1848).

crois, celle à fleurs jaunes. S'il en est ainsi, comme cette dernière a toujours été cultivée sous le nom spécifique de tenax, je pense qu'il doit lui être conservé.

« D'un autre côté, M. Colenso n'est pas le premier qui ait parlé de la plante à fleurs rouges. Le capitaine Cook dit expressément dans ses voyages qu'il y a deux espèces de Phormium, l'une à fleurs jaunes et l'autre à fleurs rouges. Il me semblerait donc plus juste que cette dernière portât le nom de notre célèbre navigateur, d'autant plus qu'il n'en a encore été publié aucune description. Mais je vous laisse juge de cette question et vous engage à chercher et à faire connaître les caractères vraiment distinctifs de ces deux espèces, attendu qu'on ne peut bien les saisir que sur des individus vivans. Or, je ne sache pas que celle à fleurs rouges ait jamais été cultivée en Angleterre, et celle à fleurs jaunes n'y fleurit que très-rarement.

« Je possède encore dans mon herbier le fruit d'un Phormium qui diffère beaucoup de celui du P. tenax (auct.), et qui doit appartenir à une troisième espèce, car je ne pense pas que ce soit le fruit du Phormium à fleurs rouges. Cette capsule a cinq pouces de long et ses valves sont membraneuses et très-minces. Je serais curieux de savoir quelle est l'espèce de l'île de Norfolk. »

On peut juger par tout ce qui précède de combien d'obscurité sont encor entourés les différens Phormium observés jusqu'à ce jour. Il est seulement évident que ce genre comprend plusieurs véritables espèces. C'est ce que croit aussi le savant naturaliste de Rochefort, M. L. Lesson, qui nous écrit : « J'ai vu et revu des masses de « Phormium au fond de la baie Koreka à la Nouvelle« Zélande. Vous m'expliquez ce que j'appelais alors des « variétés. Je crois pouvoir affirmer qu'il existe dans ce << genre trois espèces; mais je n'ai plus mon herbier de «ce pays, l'ayant donné au professeur Kunth, de Berlin. »

Comme il n'est pas très-sûr que les P. Forsterianum, Colenso et P. Colensoi, Hooker et Raoul, sur lesquels

nous ne savons rien, sinon que leurs fleurs sont petites et rouges, ne diffèrent pas entre eux; comme il n'est pas plus sûr qu'ils ne diffèrent point de notre plante à fleurs rouges et vertes, nous ne les y rapporterons pas comme synonymes, même douteux; mais nous nous conformerons au désir exprimé par sir William Hooker. Nous dédierons donc notre plante au célèbre Cook à qui nous sommes redevables de sa première indication.

L'étude que nous avons faite des descriptions et des figures du lin de la Nouvelle-Zélande nous a convaincu en outre que, même dans le Phormium à fleurs jaunes, il existait deux plantes confondues jusqu'à ce jour par tous les botanistes et qui cependant méritent d'être distinguées. Le rapprochement des diagnoses de ceux des nombreux auteurs que nous avons consultés qui peuvent jeter quelque jour sur ce point suffira, nous le croyons, pour le prouver; et à ce sujet, qu'il nous soit permis de témoigner ici toute notre reconnaissance à MM. Decaisne et Guillon pour l'extrême obligeance qu'ils ont mise à nous transcrire des documens, que notre éloignement du centre des grandes bibliothèques ne nous eût pas permis de consulter nous-même."

Des deux plantes que comprend, selon nous, le Phormium à fleurs jaunes, l'une est celui qu'ont décrit Lamarck (1), Thiébaut de Bernéaud (2), Poiret (3), Guillemin (4) et Schultes (5). Ses fleurs ne sont pas jaunes dans

(1) Encycl. méth., t. III, p. 373 (1789).

(2) Journal de botan. de Desvaux, t. III, p. 200 (1813). — Mém. de la Soc. Lin. de Paris, t. IV, p. 57 (1826). — Dict. pittor. d'hist. natur., t. vII, p. 401 (1838).

(3) Dict. des sciences natur., t. L, p. 4 (1826).

(4) Dict. class. d'hist. natur., t. XIII, p. 428 (1828).

(5) Flores intensè flavi, basi virentes. Lacinia exteriores pallidiores, striis viridibus. Roemer et Schultes, Syst. vég., t. vil, p. 621 (1829.

toute leur longueur. Leur base est d'une autre couleur que le reste.

Lamarck, qui a réuni au Lachenalia de Jacquin sous le nom de L. ramosa le Phormium de Forster, lui donne des fleurs jaunes, mais verdâtres à leur base, ajoute-t-il.

Thiébault, dans sa description très-détaillée du lin de la Nouvelle-Zélande, est encore plus exact. D'après lui, les divisions externes de la fleur, d'un jaune pâle et non d'un jaune doré comme les internes, sont marqués de stries vertes très-prononcées.

Si Poiret et Guillemin se bornent à dire que les divisions intérieures sont d'un jaune foncé et que les extérieures sont d'un jaune pâle, Roemer et Schultes, qui se servent des mêmes expressions, ajoutent que les divisions externes ont leur base striée de vert.

L'autre plante dont nous voulons parler est celle qu'ont figurée Redouté (1) et sir W. Hooker (2). Ses fleurs sont entièrement jaunes et la couleur de leurs divisions est en quelque sorte l'inverse de ce qu'on a pu remarquer il n'y a qu'un instant. Les externes, moins carénées que dans la plante précédente, sont en effet d'un jaune orangé safrané et les internes d'un jaune serin, caractères conformes aux diagnoses de MM. A Richard (flores ochraceo-luter), et Kunth (flores sordidè crocei) et qui s'appliquent parfaitement aussi au Phormium du Muséum de Paris.

Ces deux plantes, fort différentes, comme on voit, sont aussi très-faciles à distinguer. Pourtant il serait possible que malgré les apparences elles ne fussent réellement que des variétés du même type. De nouvelles observations qui devront être faites sur un assez grand nombre d'individus nous l'apprendront peut-être ; mais jusque là, et pour plus de clarté, il conviendra, nous le pensons, de les considérer comme deux espèces.

(1) Liliacées, tab. 448 et 449 (1816).

(2) Bol. magaz., tab, 3199 (1832).

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