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simple nerf destiné à renforcer l'action des autres, ou s'il donne à ses muscles une motricité spéciale en vue de destinations particulières. Nous reviendrons sur ce sujet en étudiant le mécanisme respiratoire et le rôle si diversifié que joue, chez les animaux, le grand muscle animé par le nerf spinal.

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Ceux-ci, constitués par des fibres sensitives et des fibres motrices, naissent par deux racines, l'une émanant du cordon supérieur, l'autre du cordon inférieur de la moelle, lesquelles se réunissent à une certaine distance de leur émergence, au niveau d'un ou de plusieurs ganglions appartenant exclusivement à la racine supérieure. Il n'en est aucun qui soit mixte, au point même où il se détache de la moelle.

Les nerfs mixtes représentent la presque totalité des nerfs des organes de la vie animale comme la figure 11 le fait voir en un coup d'œil. Les nerfs rachidiens rentrent dans cette catégorie, ainsi que plusieurs nerfs encéphaliques qui s'anastomosent, les sensitifs avec les moteurs, et réciproquement. Néanmoins les premiers ne peuvent être mis sur la même ligne que les autres, attendu que, d'une part, les anastomoses n'ont point toujours lieu par l'intermédiaire de ganglions, et que, d'autre part, elles s'effectuent suivant des proportions telles que l'élément sensitif prédomine dans les uns et l'élément moteur dans les autres.

En général, les nerfs mixtes sont formés par des fibres sensitives un peu plus nombreuses que les fibres motrices, autant du moins qu'on peut en juger à la simple inspection. Blandin a cru pouvoir établir que cette proportion, assez variable, était dans l'homme entre les racines postérieures et les antérieures :: 2 : 1 au cou, :: 1:1 au dos, et comme 1 1/2 : 1 à la région des lombes. Il explique la prédominance des racines sensitives sur les motrices, au niveau du plexus brachial, par l'usage des membres thoraciques qui doivent servir au toucher, tandis que les abdominaux ne sont préposés qu'à la locomotion. Dans le chien et d'autres quadrupèdes, il y aurait à peu près égalité entre les unes et les autres, par suite de la même destination des extrémités. Je n'ai jamais pu, sur le cheval, déterminer cette proportion ni au niveau des plexus, 'ni dans les points intermédiaires.

Quelles que soient les proportions qui existent entre la quantité des fibres sensitives et celle des fibres motrices dans les nerfs mixtes, ces fibres ne se confondent point, et n'ont entre elles aucune communication transversale; chacune reste distincte et conserve son caractère spécial, depuis sa sortie de la moelle jusqu'à sa terminaison périphérique, de sorte qu'il y a réellement deux nerfs, dans chaque nerf mixte, nerfs distincts à leur émergence, distincts encore souvent à leur extrémité terminale; car on voit les branches sensitives se porter à la peau, et les branches motrices aux muscles où elles restent cependant encore accolées à une certaine quantité des premières. Par ces ingénieux artifices de l'union des éléments nerveux et de leur mélange sans confusion, les fibres sensitives et les fibres motrices se distribuent à la fois aux parties où leur présence est nécessaire, et isolément, les unes à l'exclusion des autres, dans celles où elles ne sont pas toutes indispensables.

Une fois les propriétés et les fonctions des nerfs sensitifs et des nerfs moteurs connues, il devient facile de déterminer celles des nerfs mixtes qui résultent de l'association des premières avec les secondes. Le nerf mixte conduit les impressions

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de la périphérie vers les parties centrales et l'excitation motrice de celles-ci vers les muscles. Il est le siége d'un double courant : l'un, centripète, pour les impressions; l'autre, centrifuge, pour les volitions et la force motrice. Chacun de ces courants

s'opérant dans des fibres distinctes, le premier dans celles des racines supérieures, le second dans celles des racines inférieures, ils ne peuvent ni se croiser ni se confondre. Ce nerf est à la fois sensible et excitable; l'excitation qu'il éprouve détermine de la douleur et des contractions. Enfin, dans toutes les circonstances, son action se compose de deux actions qui s'opèrent ensemble comme elles le feraient isolément, et ces deux actions sont susceptibles de se séparer, comme cela s'observe dans les paralysies simples : l'une peut se perdre, tandis que l'autre persiste dans toute son intégrité; en un mot, il peut y avoir paralysie du sentiment avec conservation du mouvement, et vice versa.

Les nerfs mixtes, avons-nous dit plus haut, naissent par deux racines. Il faut en déterminer les propriétés pour bien comprendre le double rôle de ces nerfs.

On sait que c'est à Ch. Bell que la physiologie doit les premières expériences sur la racine des nerfs. Cet illustre observateur, après avoir reconnu que les cordons supérieur et inférieur de la moelle épinière ne possèdent pas les mêmes propriétés, mit à nu les racines des nerfs spinaux et les irrita isolément : il vit que la section des supérieures ne produit pas de contractions et laisse aux muscles leur motricité, et que l'irritation ou la section des inférieures provoque des convulsions. Magendie, en 1822, indiqua très-nettement que les racines ont des fonctions différentes, que les supérieures sont affectées à la sensibilité et les inférieures au mouvement. Il avait vu qu'après la section des racines supérieures des nerfs au niveau du plexus lombaire, le membre perd sa sensibilité en conservant sa motricité, et qu'après la section des racines inférieures il perd sa motricité en conservant sa sensibilité. En coupant les racines supérieures d'un plexus et les inférieures de l'autre, il avait produit sur un membre la paralysie du sentiment, et sur l'autre la paralysie du mouvement.

Müller en expérimentant, en 1831, sur les grenouilles, arriva aux mêmes résultats que Magendie. En découvrant la moelle, au niveau du plexus lombo-sacré, il coupa en travers les racines supérieures, et vit que l'excitation du bout périphérique à l'aide d'une aiguille ou d'un courant galvanique ne détermine pas de contractions; que celle du bout périphérique des racines inférieures coupées en travers provoque des convulsions. Pour la première fois, il expliqua par une action réflexe les mouvements que provoque l'irritation d'une racine supérieure encore attachée à la moelle.

Les racines inférieures ne sont pas seulement motrices, elles donnent des indices plus ou moins évidents de sensibilité dite récurrente, sensibilité sur l'existence et les causes de laquelle les physiologistes ont eu grand'peine à tomber d'accord. Magendie l'avait constatée dès ses premières expériences, sans en deviner la signification. En 1839, M. Longet soupçonnant qu'elle pouvait être donnée à ces racines par des fibres dérivées des racines postérieures, coupa celles-ci et vit que les inférieures correspondantes ne présentaient plus de sensibilité.

La sensibilité récurrente, qui n'est jamais bien vive, ne se constate pas facilement à la suite des graves et douloureuses mutilations que nécessite la mise à nu de la moelle et de quelques racines. Elle ne devient évidente que sur des animaux vigoureux, dont la moelle et les racines sont mises à découvert depuis quelques heures, sans hémorrhagie considérable. Dans ce cas, en pinçant une racine inférieure un

peu volumineuse, on détermine de la douleur à la condition que la racine supérieure correspondante est intacte. Et si l'on vient à couper cette racine inférieure, le bout périphérique seul donne des indices de sensibilité sous l'influence des excitations. Cette sensibilité s'explique par la présence de fibres qui se rendent de la racine supérieure dans l'inférieure, et qui de là, en suivant un trajet rétrograde, reviennent à la moelle. La disposition de ces fibres peut être conçue, d'après M. Cl. Bernard (1), telle que la donne la figure suivante.

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Le point où s'effectue la récurrence des fibres sensitives qui émanent des racines supérieures est indéterminé. Une expérience de Magendie, qui consiste à couper le tronc du nerf à quelques lignes au-dessous du ganglion, prouve que le retour des fibres n'a pas lieu au niveau du ganglion, car s'il s'effectuait en ce point, la section ne portant pas sur elles laisserait subsister la sensibilité récurrente. Or, celle-ci s'éteint alors complétement. D'un autre côté, l'expérience de Schiff, dans laquelle la section de la racine postérieure, un peu au delà du ganglion, est suivie de la dégénérescence de quelques fibres de la racine inférieure semble prouver que, pour un certain nombre de fibres, la récurrence a lieu à compter du ganglion. Celle-ci s'effectuerait donc à des distances variables du ganglion suivant les nerfs, et se ferait à des hauteurs diverses pour les fibres d'un nerf donné. En somme, la sensibilité récurrente paraît due à des fibres qui se rendent de la racine supérieure dans l'inférieure pour revenir à la moelle. Les fibres sensitives qui se rendent à la racine motrice n'ont-elles qu'un rôle relatif à la nutrition de la moelle, comme celles qui se distribuent aux autres nerfs moteurs et à la généralité des tissus, ou ont-elles en outre celui d'associer les fonctions des deux racines et de concourir à l'accomplissement des phénomènes réflexes? C'est ce qui n'est pas actuellement décidé.

Les deux racines diffèrent anatomiquement l'une de l'autre par la présence à la supérieure d'un ganglion simple dans l'homme, et multiple dans divers animaux, notamment les solipèdes, où il résulte du rapprochement d'un grand nombre de ganglions plus petits, surtout au niveau des plexus (fig. 13). Ce ganglion reçoit les fibres des racines supérieures qui le traversent en faisceaux isolés ou anastomosés, et il montre dans leurs intervalles des cellules ganglionnaires qui paraissent donner

(1) Bernard, Leçons sur la physiologie et la pathologie du système nerveux, t. II, p. 462.

(*)H, racine postérieure et son ganglion; P, ses fibres directes se rendant à la peau; V, racine inférieure avec ses fibres directes se rendant aux muscles M; A, fibre récurrente partant de la moelle pour y revenir,

naissance à des fibres

spéciales se dirigeant toutes vers la périphérie. Dans l'homme et les mammifères, les micrographes n'ont trouvé aucune connexion entre ces cellules ou leurs fibres propres et les fibres des racines; mais, chez les poissons, Wagner et M. Robin ont vu chaque fibre de la racine sensitive soudée à une cellule ganglionnaire. La racine motrice ne fait que s'accoler au ganglion et se joindre aux fibres sensitives au-des sous de lui. Là les deux espèces de fibres se mêlent intimement, de telle sorte que dans un faisceau pris au hasard, elles se trouvent dans la même proportion que dans l'ensemble du nerf. La partie sensitive du tronc mixte est formée surtout, d'après Kölliker, de tubes minces et la partie motrice de tubes larges. Mais tous ces tubes doivent prendre dans les diverses ramifications un diamètre uniforme.

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FIG. 13.

Segment de la

moelle épinière du cheval pris au niveau du plexus brachial (*).

(*) A, racines supérieures ; B, racines inférieures; C, ganglions multiples des racines supérieures; D, ganglion unique sur une paire nerveuse étrangère an plexus brachial; E, E, racines supérieures au point où elles traversent les enveloppes.

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