» Tout autre emploi me déshonore, » Et sied mal à ma dignité. Alors je n'ai pas consulté
Le dieu que le Parnasse implore; Mais une autre divinité,
De qui je veux que l'on ignore Et le nom, et la qualité.
Voici ce qu'elle m'a dicté,
D'un ton de voix, non pas sonore, Mais si bas, si précipité, Que j'ai perdu tout, excepté Ces trois mots que je sais encore: ་ Si vous voulez par votre absence » Exciter plus d'impatience, >> Enflammer encor plus l'amour, Revenez; il suffit d'un jour.
URAIS-JE trahi mes sermens?
L'absence dans mon cœur produit des changemens; Une plus vive ardeur m'enflamme et me dévore; J'en sens mille fois plus encore
Que l'amour qui m'occupe est mon unique loi. Ah! puisse l'objet que j'adore,
En être changé comme moi!
SUR LE MÊME SUJET,
SOLITAIRE séjour, que j'ai besoin de toi ! Sauve-moi des plaisirs qui s'offriraient à moi;
Aide encor, s'il se peut, à ma tristesse extrême; Nourris ma rêverie, entretiens mes soupirs. Qu'il est doux d'être sans plaisirs, Quand on est loin de ce qu'on aime!
SUR LE MÊME SUJET. QUOI! le soleil ne ferait plus qu'un tour, Et je reverrais ma Sylvie !
Daigne encor jusques-là me conserver le jour, Et tu pourras, charmant Amour, Dans ce moment disposer de ma vie.
SUR UN CACHET.
QUAND je mis dans mon écritoire Cette petite tête noire
Qui doit me servir de cachet, J'entendis (qui l'aurait pu croire!) Qu'elle me parlait clair et net, Comme la tête de la foire. Regarde-moi de tes deux yeux, Me dit-elle; je suis esclave, Et j'ai vu le jour en des lieux Plus ardens qu'un miroir concave. Avec moi, ne crois pas permis De cacheter pour ton Iris Une lettre qui soit écrite D'un style froid ou peu soumis. Je te le dis, et le répète; Une lettre sur ce ton-là, Tu peux chercher qui la cachète; Je ne suis pas propre à cela. Va, lui dis-je, mon pauvre More, Tu ne me connais pas encore ; Mes lettres sont dignes de toi. Cachète sans te mettre en peine; En cachetant pour ta Climène, Tu pourrais te servir de moi.
PRINTEMPS.
DEPUIS le temps heureux où mon cœur fut blessé, Pour la troisième fois, léger amant de Flore, Tu reviens dans nos champs d'où l'hiver est chassé,
Et tu me retrouves encore
Aux pieds du même objet où tu m'avais laissé. Je sais que pour ton inconstance
Un spectacle pareil est assez ennuyeux. J'en suis fâché; mais si cela t'offense,
Ne reviens plus, cher Zéphyr, en ces lieux. Pour moi, tant que mon Ismène Me conservera sa foi,
Je me passerai sans peine
De ton printemps et de toi.
A MADAME DE***
Qui allait à Versailles.
vous verrez au milieu de Versailles Les courtisans d'un seul homme occupés, Remplis de lui jusqu'au fond des entrailles, A chaque instant se livrant des batailles Pour attraper ses regards échappés ; Tout à part vous, souvenez-vous de dire : Je règne aussi, j'ai ma cour que je tiens Un seul sujet compose mon empire, Mais n'en déplaise au bon roi notre sire, Je ne voudrais le donner pour les siens. A LA MÊME.
HIER, quand ma lettre fut close,
Et que le petit porterose
Eut reçu sa commission,
Je fis une réflexion.
Un seul sujet; c'est peu de chose, Et de l'empire qu'il compose, Le monde aura compassion. Il serait assez nécessaire
De donner quelque commentaire Sur ce mot que j'ai hasardé. Voici donc comme je l'explique, Par le secours du dieu Delphique,
Qui ne m'a pourtant guère aidé.
Tu sais quel est l'objet, Amour, dont j'ai fait choix. Fais que de ses beaux yeux j'éprouve seul les armes; Ne crains point d'être injuste à l'égard de ses charmes, En ne soumettant pas mille cœurs à ses lois.
Mon cœur est assez tendre, il est assez fidèle Pour t'acquitter envers elle
De tout ce que tu lui dois.
'IRIS a d'attraits et de grâces!
Qui jamais rassembla plus de présens des dieux? O Vénus, si tu les surpasses,
Descends du ciel pour convaincre nos yeux.
VERS DE L'AUTEUR,
Sur le reproche qu'on lui avait fait d'étre Normand. BELLE Iris, on est ce qu'on peut.
Je suis Normand, je le confesse,
par ma promesse,
Si mon intérêt ne le veut.
Avec un pareil caractère, Vous craignez un engagement; Mais, Iris, jugez sainement, Quel intérêt j'ai de vous plaire. Pour être fidèle et sincère, Il me suffit d'être Normand.
POMONE A IRIS.
Je vous envoie avec ces pommes
Des sermens du même terroir.
Le plus Normand de tous les hommes Jure qu'il ne veut plus vous voir.
AUTRES VERS.
Je me croyais désormais dispensé
De me livrer à l'amoureuse flamme Et je sentais un calme un peu forcé Qui par degrés revenait dans mon âme. Je vous ai vue, et tout est renversé. Ne croyez pas pourtant que je m'en plaigne. Il n'eût régné dans le fond de mon cœur Qu'un triste vide, une froide langueur. J'aime bien mieux que votre image y règne ; Elle remplit seule tous mes instans. Absent de vous, je vous vois, vous entends. J'ignorerais avec moins de tendresse
Des doux transports la plus charmante ivresse. Sans concevoir de téméraires vœux,
Mon sentiment est payé par lui-même. Heureux, Iris, et mille fois heureux, Qui peut aimer autant que je vous aime!
L'AMOUR
Au petit de Morangis.
Je viens, aimable enfant, vous rendre une visite,
Moi qui suis enfant comme vous.
Cette faveur n'est pas petite,
Bien d'autres en seront jaloux : Car avec des enfans je ne m'arrête guère; Je veux des gens un peu plus avancés. Mais pour vous, je vous considère,
Je connais monsieur votre père ; Je pense aussi qu'il me connaît assez. Il craignait d'avoir une fille;
Elle n'eût pas si bien soutenu sa maison. Je le craignais aussi, mais par une raison, Qui n'est pas raison de famille.
Une fille eût sans doute étendu mon empire, Eût inspiré l'amour; mais pour le sentir, non. J'aime beaucoup mieux un garçon,
Et qui le sente et qui l'inspire.
Vous voilà donc au monde; hé bien, qu'en dites-vous ? C'est du hasard un effet assez doux,
Que de vous y trouver en aussi belle passe. Si, comme on croit, vous allez vous mêler D'imiter ceux de votre race,
Vous trouverez à qui parler.
Prélats, ambassadeurs, gens de robe et d'épée, Héros de toutes les façons,
On verrait votre vie assez bien occupée
A soutenir un seul de ces grands noms. Mais si vous imitez jusques à votre père, (A vous dire le vrai, ce sera le meilleur) Si le sang ne faisait la moitié de l'affaire, Vous n'en pourriez jamais sortir à votre honneur. Quand vous travaillerez sur de si grands exemples, Au moins souvenez-vous de moi de temps en temps, Adieu, dans seize ou dix-sept ans
Je vous rendrai des visites plus amples.
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