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Le Bourgeois, le Manant, le Clergé, la Noblesse, 35 Et par tout des Plaideurs les efcadrons épars,

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Faire autour de Thémis flotter fes étendarts.
Mais une Églife feule à fes yeux immobile,
Garde au fein du Tumulte une affiette tranquille.
Elle feule la brave; elle feule aux procès
40 De fes paifibles murs veut défendre l'accès.
La Discorde, à l'aspect d'un caline qui l'offense,
Fait fiffler fes ferpens, s'excite à la vengeance.
Sa bouche se remplit d'un poifon odieux,

Et de longs traits de feu lui fortent par les yeux.

VERS 34. Le Bourgeois, le Ma nant, &c.) Ce vers eft fort ferré; Il comprend tous les États du Royaume.

VERS 45.

D'un ton qui fit trembler les vitres.] De la Sainte Chapelle.

VERS 47. Divifer Cordeliers, Car mes, & Céleftins.] Dans ces Couvens il y avoit eu des brouilleries, des de reglemens & des divifions, qui donnèrent lieu à un Arrêt que le Parlement rendit au mois d'Avril, 1667. fur le Réquifitoire de Mr. l'Avocat Général Talon. Ce Grand Magiftrat parla dans cette occafion, avec beaucoup de force & de véhé mence. On peut voir cet Arrêt dans les Journaux du Palais, & des

Audiences.

VERS 48. J'aurai fait foûtenir un fiege aux Auguftins.] De deux en deux ans, les Auguffins du grand Couvent de Paris nomment en Chapitre, trois de leurs Religieux Bacheliers, pour faire leur Licence en Sorbonne. Il y a trois places fondées pour cela. En 1658. le P. CELESTIN VILLIERS, Prieur de ce Couvent, voulant favorifer quel

ques Bacheliers, en fit nommer
neuf pour les trois Licences fui-
vantes. Ceux qui s'en virent exclus
par cette élection prématurée, fe
pourvûrent au Parlement, qui or-
donna, que l'on feroit une autre
nomination, en préfence de Mrs.
de Catinat & de Saveufe, Confeil-
lers de la Cour; & de Mr. Janart,
Subftitut du Procureur General.
la Cour fut obligée d'employer la
Les Réligieux ayant refufé d'obéir,
force, pour faire exécuter fonArrêt.
après avoir invefti le Couvent, ef-
On manda tous les Archers, qui,
fayèrent d'enfoncer les portes. Mais
ils n'en pûrent venir à bout, parce-
que les Religieux, prévoyant ce qui
devoit arriver, les avoient fait
provifion de cailloux, & de toutes
murer par derrière, & avoient fait

fortes d'Armes. Les Archers tentè-
rent d'autres voyes: les uns mon-
tèrent fur les toits des maifons voi-
fines pour entrer dans le Couvent,
tandis que les autres travailloient
à faire une ouverture dans la mu-
raille du jardin, du côté de la Rue
Chriftine. Les Auguftins s'étapt
mis en défense, fonnèrent le tocfin,
& commencèrent à tirer d'en bas
fur les Affiégeans. Ceux-ci poftés

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Quoi, dit- Elle, d'un ton qui fit trembler les vitres, J'aurai pû jufqu'ici brouiller tous les Chapitres, Divifer Cordeliers, Carmes & Célestins! J'aurai fait foûtenir un Siege aux Auguftins! Et cette Eglife feule, à mes ordres rebelle, so Nourrira dans fon fein une paix éternelle? Suis-je donc la Discorde? & parmi les Mortels, Qui voudra déformais encenfer mes Autels?

A ces mots, d'un bonnet couvrant fa tête énorme, Elle prend d'un vieux Chantre & la taille & la forme: 55 Elle peint de bourgeons fon vifage guerrier,

plus avantageufement qu'eux, & vent, au milieu des Gardes Fran-
Couverts par les cheminées, tirèrent
à leur tour fur les Moines, dont il
y en eut deux de tués, & autant
de bleffés.

Cependant, la brêche étant faite, les Réligieux eurent la témérité d'y porter le Saint Sacrement, efpérant d'arrêter par là les Affiégeans. Mais, comme ils virent, que cette reffource étoit inutile, & que l'on ne laiffoit pas de tirer fur eux, ils demanderent à capituler, & l'on donna des ôtages de part & d'autre. Le principal article de la capitulation fut, que les Affiégés auroient la vie fauve, moyennant quoi ils aban donnèrent la brêche, & livrèrent leurs portes. Les Commiffaires du Parlement étant entrés, firent arrêter onze de ces Religieux, qui furent menés en prifon à la Conciergerie. Ce fut le 23. d'Août, 1658. veille de St. Barthelemi. Le Cardinal Mazarin, qui n'aimoit pas le Parlement, fit mettre les Réligieux en liberté, par ordre du Roi, après 27. jours de prifon. Ils furent mis dans les Carroffes du Roi, & menés en Triomphe dans leur Cou

* Hier au foir..

coifes rangées en haye depu's la Conciergerie jufqu'aux Auguftins. Leurs Confreres allerent les recevoir en proceffion, ayant des palmes à la main. Ils fonnèrent toutes leurs cloches, & chantèrent le Te Deum en action de graces.

La Fontaine fit à ce sujet une Ballade,dont Mr. Despreaux n'avoit retenu que le commencement & la fin:

Aux Auguftins, fans allarmer la
Ville,
On fut her * foir; mais le cas n'alla
bien.

L'Huiffier voyant de cailloux une pile,

Crut qu'ils n'étoient mis là pour aucun bien, &c.

Et dedans peu me femble que je voi,

Que fur la mer, ainfi que fur la terre,

Les Auguftins font ferviteurs du Roi.

VERS 54. Elle prend d'un vieux Chantre & la taille & la forme.] Dans

Et s'en va de ce pas trouver le Tréforier.

Dans le réduit obfcur d'une alcove enfoncée, S'élève un lit de plume à grands frais amaffée. Quatre rideaux pompeux, par un double contour, 6 En défendent l'entrée à la clarté du jour.

Là, parmi les douceurs d'un tranquille filence, Regne fur le duvet une heureuse Indolence. C'est là que le Prélat muni d'un déjeuner, Dormant d'un léger fomme, attendoit le dîner. 65 La Jeuneffe en fa fleur brille fur fon vifage: Son menton fur fon fein defcend à double étage: Et fon corps ramaffé dans fa courte groffeur, Fait gémir les couffins fous fa molle épaiffeur. La Déeffe en entrant, qui voit la nappe mife, 70 Admire un fi bel ordre & reconnoît l'Églife,

la Poëfie Épique, où tout fe fait par le ministère des Dieux, ils ne fe manifeftent jamais aux Hommes que fous la figure humaine. Homère ne manque point à cette bienféance; & c'eft ainfi que le Merveilleux fe concilie avec le Vraifemblable.

VERS 57. Dans le réduit obfcur d'une alcove enfoncée, &c.) Cette defcription avoit été faite de génie : l'Auteur n'ayant jamais vu ni l'alcove, ni le lit du Tréforier. Cepen

dant elle fe trouva conforme à la vérité.

VERS 65. La Jeunesse en fa fleur &c.] L'Auteur ajoûta ces quatre vers pour faire une contre-vérité: car le Tréforier étoit maigre, vieux, & de grande taille. Mais notre Poëte voulant faire un portrait de fon Héros, a dû le faire conforme au caractère qu'il lui donne dans ce Poëme.

VERS 70.

Et

Et reconnoît

l'Eglife.] Ce dernier mot n'a été imprimé que dans l'édition pofthume de 1713. L'Auteur ne l'avoit indiqué que par des étoiles dans les précédentes éditions.

IMIT. Vers 73. Tu dors, Prélat? tu dors?] Dans le fecond Livre de l'Iliade, un Songe envoyé par Jupiter, dit à Agamemnon: Eudes, Argios vie: Tu dors, Fils d'Atrée !

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VERS 76. Et répand à grands flots les bénédictions.) C'étoit le principal motif de la jaloufie du Tréforier contre le Chantre.

Et marchant à grands pas vers le lieu du repos,
Au Prélat fommeillant, Elle adreffe ces mots :

Tu dors? Prélat, tu dors? & là-haut à ta place, Le Chantre aux yeux du Choeur étale fon audace, 75 Chante les Oremus, fait des Proceffions,

Et répand à grands flots les bénédictions.

Tu dors? attends-tu donc, que fans bulle & fans titre Il te raviffe encor le Rochet & la Mitre? Sors de ce lit oifeux, qui te tient attaché, So Et renonce au repos, ou bien à l'Évêché.

Elle dit, & du vent de fa bouche profane, Lui fouffle avec ces mots l'ardeur de la chicane. Le Prélat fe réveille, & plein d'émotion

Lui donne toutefois la bénédiction.

85 Tel qu'on voit un Taureau, qu'une Guêpe en furie,

VERS So. Et renonce au repos, ou bien à l'Evêché.] Mr. Auvry avoit été Evêque de Coûtance. D'ailleurs comme Tréforier de la Sainte-Chapelle, il avoit le droit de faire l'Office pontificalement aux grandes Fêtes de l'année, fuivant un privilège accordé par Benoit XIII, PIERRE DE LUNA, Antipape, à Hugues Boileau, Confeffeur du Roi Charles V. & Tréforier de la Sainte-Chapelle. Il étoit de la Famille dont Mr. Boileau Despréaux eft defcendu. »Long-tems après que St. Louis eut "bâti cette Chapelle, dit Pafquier dans fes Recherches, L. III. ch. 39. elle fut depuis grandement an"noblie par le Roi Charles V. C'eft lui qui obtint du Saint Siége permiffion au Tréforier d'icelle, d'ufer "de Mitre, Anneaux, & autres Ornemens Pontificaux (excepté la Crof "fe) & donner bénédiction,tout ainfi

Tome II.

»qu'un Évêque, célébrant le service »divin dedans le pourprix de cette »Sainte-Chapelle.

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VERS 85. Tel qu'on voit un Taureau, qu'une Guêpe en furie &c.) Quelques objections que j'avois faites contre la jufteffe de cette comparaifon, & que je renouvellai dans une Lettre que j'écrivis à l'Auteur, m'attirerent cette Reponfe du 15. Mai, 1703. ,,Vous attaquez fortement ce que je dis dans mon »Lutrin, de la Guêpe, qui meurt »du coup dont elle pique fon En"nemi. Vous prétendez, que je lui »donne ce qui n'appartient qu'aux Abeilles, que vitam in vulnere ponunt. Mais je ne vois pas, pour»quoi vous voulez qu'il n'en foit "pas de même de la Guêpe, qui est une efpece d'Abeille bâtarde, que de la véritable Abeille; puisque "perfonne n'a jamais dit le con

G

A piqué dans les flancs, aux dépens de fa vie:
Le fuperbe Animal, agité de tourmens,

Exhale fa douleur en longs mugiffemens.

Tel le fougueux Prélat, que ce fonge épouvante, 90 Querelle en fe levant & Laquais & Servante : Et d'un jufte courroux rallumant fa vigueur, 'Même avant le dîner, parle d'aller au Chœur. Le prudent Gilotin, fon Aumônier fidele, En vain par fes confeils fagement le rappelle: 95 Lui montre le péril: Que midi va fonner: Qu'il va faire, s'il fort, refroidir le dîner.

Qu'elle fureur, dit-il, quel aveugle caprice, Quand le dîner eft prêt, vous appelle à l'Office? De votre dignité foûtenez mieux l'éclat.

100 Eft-ce pour travailler que vous êtes Prélat ? A quoi bon ce dégoût, & ce zele inutile? Eft-il donc pour jeuner Quatre-tems, ou Vigile?

traire: & que jamais on n'a fait qu'un favant Phyfieien * m'avoit fait »à mon vers l'objection que vous remarquer, par le moyen du Micro»lui faites. Je ne vous cacherai fcope, que l'aiguillon des Guêpes »point pourtant, que je ne crois eft garni à fa pointe, de plufieurs "cette prétendue mort, vraie, ni de petits redens qui s'opposent à la »l'Abeille, ni de la Guêpe; & que fortie de l'aiguillon, quand il a fait "tout cela n'eit, à mon avis, qu'un fa piquure: ce qui peut faire croire, "difcours populaire dont il n'y a que la Guêpe meurt auffi bien que "aucune certitude. Mais il ne faut l'Abeille, après avoir piqué. Mr. "pas d'autre autorité à un Poëte, Despreaux me répondit ainfi. ,,pour embellir fon expreffion. Il,,J'admire le foin que vous prenez ,,en faut croire le bruit public fur,,de me fournir des armes contre ,,les Abeilles & fur les Guêpes, vous-même, au fujer de la criti,,comme fur le chant des Cygnes en ,,que que vous m'avez faite fur la ,,mourant, & fur l'unité & la,,piquure de la Guêpe. Je n'avois ,,renaiffance du Phénix ,,garde de me fervir de ces armes, Quelque tems après je lui mandai,,puifque franchement, avant votre

* Mr. de PU GET.

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