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Et ne connût-on plus ni mon Nom, ni mes Vers;
Dans ce Marbre fameux, taillé fur mon Vifage,
De Girardon toûjours on vantera l'Ouvrage.

fur ce même Portrait, qu'on a gravé celui qui eft au commencement de ce Livre.

VERS I. Du célèbre Boileau,] Dans l'édition de 1713. on a mis: Du Poëte Boileau.

EPIGR. LVI. Ce Bufte eft dans le Cabinet de Mr. GIRARDON,

& l'on en a tiré plufieurs Copies, en marbre & en plâtre.

VERS 5. De Girardon toûjours on vantera l'Ouvrage.] CHARLESQUINT difoit, qu'il avoit reçu trois fois l'immortalité des mains du TITIEN; parce que le Titien avoit fait autant de fois le Portrait de cet Empereur.

AVERTISSEMENT

AU LECTEUR.

M

ADAME de MONTESPAN &

Madame de THIANGES fa Sour, laffes des Opéra de Mr. QUINAUT, propoferent au Roi d'en faire faire un par Mr. RACINE, qui s'engagea affez légèrement à leur donner cette fatisfaction, ne fongeant pas dans ce moment-là à une chofe, dont il étoit plufieurs fois convenu avec moi, qu'on ne peut jamais faire un bon Opéra: parce que la Mufique ne fauroit narrer:

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que les paffions n'y pouvoient être peintes dans toute l'étenduë qu'elles demandent: que d'ailleurs ellene fauroit fouvent mettre en chant les expreffions vraiment fublimes & courageuses. C'eft ce que je lui représentai, quand il me déclara fon engagement; & il m'avoua, que j'avois raifon mais il étoit trop avancé pour : Il commença dès-lors en effet un Opéra, dont le fujet étoit la chûte de Phaethon. Il en fit même quelques Vers qu'il recita au Roi,

reculer.

1. Elle ne fauroit fouvent mettre cine lui-même ; & quoi qu'elle en chant &c.] Mr. DE LULLI foit remplie d'expreffions extrêa donné entre autres un exem- mement fortes & fublimes, le Muple du contraire dans la belle ficien n'eft pas demeuré au deffous Idylle fur la paix, de Mr. Ra- du Poëte.

qui en parut content. Mais comme Mr. Racine n'entreprenoit cet Ouvrage qu'à regret, il me témoigna refolument, qu'il ne l'acheveroit point que je n'y travaillaffe avec lui, & me déclara avant tout, qu'il falloit que j'en compofaffe le Prologue. J'eus beau lui repréfenter mon peti de talent pour ces fortes d'Ouvrages, & que je n'avois jamais fait de Vers d'amourette. Il perfifta dans fa résolution, & me dit, qu'il me le feroit ordonner par le Roi. Je fongeai donc en moi-même à voir de quoi je ferois capable, en cas que je fuffe abfolument obligé de travailler à un Ouvrage, fi oppofé à mon génie & à mon inclination. Ainfi, pour m'effayer, je traçai, fans en rien dire à perfonne, non pas même à Mr. Racine, le canevas d'un Prologue; & j'en compofai une premiere Scène. Le fujet de cette Scène étoit une dispute de la Poëfie & de la Mufique, qui fe querelloient fur l'excellence de leur Art, & étoient enfin toutes prêtes à fe féparer, lorsque tout à coup la Déeffe des Accords, je veux dire l'Harmonie, defcendoit du Ciel avec tous fes charmes & tous fes agrémens, & les reconcilioit. Elle devoit dire enfuite la raifon, qui la faifoit venir fur la Terre, qui n'étoit autre que de divertir le Prince de l'Univers le plus digne d'être fervi, & à qui elle devoit le plus; puifque c'étoit lui qui la

maintenoit dans la France, où elle regnoit en toutes chofes. Elle ajoûtoit enfuite, que pour empêcher que quelque audacieux ne vînt troubler, en s'élevant contre un fi grand Prince, la gloire dont elle jouiffoit avec lui; elle vouloit, que dès aujourd'hui même, fans perdre de tems, on repréfentât fur la Scène la Chûte de l'ambitieux Phaethon. Auffi-tôt tous les Poëtes & tous les Muficiens par fon ordre, fe retiroient & s'alloient habiller. Voilà le fujet de mon Prologue, auquel je travaillai trois ou quatre jours avec un affez grand dégoût, tandis

que

Mr. Racine de fon côté, avec non moins de dégoût, continuoit à disposer le plan de fon Opéra, fur lequel je lui prodiguois mes confeils. Nous étions occupés à ce misérable travail, dont je ne fai fi nous nous ferions bien tirés, lorfque tout à coup un heureux incident nous tira d'affaire. L'incident fut, que Mr. Quinaut s'étant présenté au Roi les larmes aux yeux, & lui ayant remontré l'affront qu'il alloit recevoir s'il ne travailloit plus au divertissement de Sa Majesté le Roi touché de compaffion, déclara franchement aux Dames dont j'ai parlé, qu'il ne pouvoit fe réfoudre à lui donner ce déplaifir. Sic nos fervavit Apollo. Nous retournames donc, Mr. Racine & moi, à notre premier emploi, & il ne fut plus mention de notre

Opéra, dont il ne refta que quelques Vers de Mr. Racine, qu'on n'a point trouvés dans fes papiers après fa mort, & que vraisemblablement il avoit fupprimés par délicatesse de conScience, à cause qu'il y étoit parlé d'amour. Pour moi, comme il n'étoit point queftion d'amou rette dans la Scène que j'avois composée; non feulement je n'ai pas jugé à propos de la fupprimer; mais je la donne ici au Public; perfuadé qu'elle fera plaifir aux Lecteurs, qui ne Seront peut-être pas fâchés de voir, de quelle manière je m'y étois pris, pour adoucir l'amertume & la force de ma Poëfie Satirique, & pour me jetter dans le ftile doucereux. C'eft de quoi ils pourront juger par le fragment que je leur préfente ici; & que je leur préfente avec d'autant plus de confiance, qu'étant fort court, s'il ne les divertit, il ne leur laiffera pas du moins

Je tems de s'ennuyer.

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