On lui laiffat paffer le feuil de fon Palais. Quand il fut en l'âge où la chaffe Lui fut dépeint : mais quoiqu'on fasse, Rien ne change un tempérament. Le jeune homme inquiet, ardent, plein de courage, Plus l'obstacle étoit grand, plus fort fut le defir. s; Et comme ce logis, plein de magnificences, Et que la (a) laine & les (b) pinceaux En cet autre des perfonnages, Le jeune homme s'émeut voyant peint un Lion. Jufqu'aux refforts de l'ame ; & cette chére tête (a) Les Tapifleries. 1 (b) Les Tableaux. Pour qui l'art (c) d'Esculape en vain fit ce qu'il put; Auffi-tôt il quitta la ville, Mit fon lit en plein champ, loin des toits, fous les Un Aigle qui portoit en l'air une Tortue, Laiffa tomber fa proie afin de la caffer: De ces exemples il réfulte, Que cet art, s'il eft vrai, fait tomber dans les maux Mais je l'en justifie, & maintiens qu'il eft faux. De lieux, de perfonnes, de temps, (c) Dieu de la Médecine & de la Chirurgie. (1) Ancien Poëte Grec, dont il nous refte quelques Tragédies. (d) C'eft une des grandes Planettes. Qu'est-ce que Jupiter? Un corps fans connoissance. Agit différemment fur ces deux hommes-ci? Où l'iront retrouver (2) les faiseurs d'Horoscope? Mérite que du moins quelqu'un d'eux l'ait prévû; De fuivre pas à pas toutes nos actions? pas; Et ces gens veulent au compas, (e) Autre Planette audeffous de Jupiter. (2) Charlatans qui veulent nous faire accroire qu'ils voient clairement tout le bien & tout le mal qui doit arriver à une perfonne, par la fituation où fe trouvent les Planettes dans le moment de fa naiffance. De tous les métiers, celui de Charlatan eft le plus aifé à apprendre. Deux chofes fuffifent pour le favoir parfaitement: La premiere, la crédulité des hommes, qui ne dépend pas du Charlatan, mais dont il s'affûre bien-tôt par le moyen de la feconde, qui confifte à leur dire hardiment qu'il fait fort bien ce qui lui eft abfolument inconnu. Et tant qu'il y aura des hommes fottement crédules, il s'en trouvera d'autres tout prêts à profiter de leur fottife. Mahomet connoiffant la fimplicité des Arabes, leur dit hardiment qu'il avoit vû DIEU, & qu'il avoit reçû de fa propre bouche les ordres qu'il leur donnoit. Les Arabes le crurent, & Mahomet les conduifit comme il voulut, Tracer le cours de notre vie! Il ne fe faut point arrêter Aux deux faits ambigus que je viens de conter. FABLE XVII. L'Ane & le Chien. IL fe faut entr'aider, c'est la loi de nature: Car il eft bonne créature. Il alloit par pays accompagné du Chien, Tous deux fuivis d'un commun maître. Dont l'herbe étoit fort à fon grẻ. Point de chardons pourtant, il s'en paffa pour l'heurer Paffer pour cette fois. Le Chien mourant de faim Je prendrai mon dîné dans le panier au pain. Point de réponse, mot: le (1) Rouffin d'Arcadie Craignit qu'en perdant un moment, Il ne perdît un coup de dent. Il fit long-temps la fourde oreille: Enfin il répondit : Ami, je te confeille Il ne fauroit tarder beaucoup. Sort du bois & s'en vient: autre bête affamée. Je conclus qu'il faut qu'on s'entr'aide. (1) Sur ce furnom de l'Ane, voyez Liv. VI. Fab. XIX. Note (s) FABLE XVIII. Le Baffa & le Marchand. UN Marchand Grec, en certaine contrée, Faifoit trafic. Un Baffa l'appuyoit Dequoi le Grec en Baffa le payoit : |