Ni d'aller chercher d'autres mondes: C'est pourquoi vous n'avez qu'un parti qui soit fûr, C'est de vous renfermer aux trous de quelque mur. Les Oifillons las de l'entendre, Se mirent à jafer auffi confufément, Que faifoient les Troyens, quand la pauvre (7) Caffandre Ouvroit la bouche feulement. Il en prit aux uns comme aux autres. Maint Oifillon fe vit efclave retenu. Nous n'écoutons d'inftincts que ceux qui font les nôtres, Et ne croyons le mal que quand il eft venu. (7) Fille du Roi Priam, dont on méprifoit les prophéties, qui cependant fe trouvoient toujours très-véritables. Le Rat de ville & le Rat des champs. Autrefois le Rat de ville Invita le Rat des champs, Sur un tapis de Turquie (1) Reftes d'oifeaux d'un goût délicat, parmi lefquels l'Ortolan paffe pour un des plus friands Je laiffe à penfer la vie Le régal fut fort honnête, A la porte de la fale Le bruit ceffe, on fe retire: C'est affez, dit le Ruftique: Demain vous viendrez chez moi. Ce n'eft pas que je me pique De tous vos feltins de Roi. Mais rien ne vient m'interrompre : Je mange tout à loifir. Adieu donc, fi du plaifir Que la crainte peut corrompre, FABLE X. Le Loup & l'Agneau. LA raison du plus fort est toujours la meilleure Nous l'allons montrer tout à l'heure. Un Agneau fe défaltéroit Dans le courant d'une onde pure. Un Loup furvient à jeun, qui cherchoit aventure, Tu feras châtié de ta témérité. Sire, répond l'Agneau, que votre Majesté Plus de vingt pas au-deffous d'elle; Et je Tu la troubles, reprit cette bête cruelle; Je n'en ai point. C'eft donc quelqu'un des tiens: Vous, vos bergers & vos chiens. Le Loup l'emporte, & puis le mange, FABLE X I. L'Homme & fon Image. POUR M. LE DUC DE LA ROCHEFOUCAULT. UN homme, qui s'aimoit fans avoir de rivaux, Paffoit dans fon efprit pour le plus beau du monde. Préfentoit partout à fes yeux Les confeillers muets dont fe fervent nos Dames, Miroirs dans les logis, Miroirs chez les Marchands, Miroirs aux poches des galans, Miroirs aux ceintures des femmes. Que fait notre (1) Narciffe? Il fe va confiner Se trouve en ces lieux écartés ; (1) On appelle Narciffe tout homme entêté de fa beauté, réelle ou chimerique, par allufion à ce que dic la Fable, d'un beau jeune homme de ce nom, qui devint fi follement amoureux de lui-même, qu'il en perdit la vie, Penfent Penfent appercevoir une chimére vaine. Il fait tout ce qu'il peut pour éviter cette eau. On voit bien où je veux venir. Je parle à tous ; & cette erreur extrême Eft un mal que chacun fe plaît d'entretenir. Notre ame, c'eft cet homme amoureux de lui-même: Tant de miroirs, ce font les fottifes d'autrui, Miroirs, de nos défauts les Peintres légitimes. Et quant au canal, c'est celui Que chacun fait, (a) le Livre des Maximes. (4) Celui des Maximes morales, compofé par le Duc de la Rochefoucault. FABLE XII. Le Dragon à plufieurs têtes, & le Dragon Préféroit, dit l'Hiftoire, un jour chez l'Empereur, Que chacun d'eux pourroit foudoyer une armée. Lui dit: Je fais par renommée B |