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pensé, Pauline? c'est que si quelqu'un dans la compagnie nous a desservis, ce ne peut être que Saint-Alban.

PAULINE.

Que vous êtes injuste? J'ai vu tout ce qu'il a écrit en votre faveur.

MÉLAC FILS.

On fait voir ce qu'on veut.

PAULINE.

Vous vous plaisez bien à l'accuser.

MÉLAC FILS.

Pas tant que vous à le défendre.

PAULINE fâchée.

Vous m'impatientez. Depuis son départ, il faut donc se résoudre à voir toutes nos conversations rentrer dans celle-ci ?

MÉLAC FILS d'un air fin.

Allons, la paix. Ils ont ensuite parlé de votre établissement.... du mien.... Mon père m'a fait signe, je me suis retiré; mais, en sortant j'ai entendu qu'il disait un mot..... Ah! Pauline..... (Il veut lui prendre la main. )

PAULINE se recule.

Eh bien! monsieur !

MÉLAC FILS.

Un certain mot.....

PAULINE l'interrompt.

Je ne suis pas curieuse. — Parlons de la petite

fête

que nous préparons à mon oncle à l'occasion de ses lettres de noblesse : y songez-vous ?

MÉLAC FILS.

J'ai tout arrangé dans ma tête. Nous commencerons par un concert; peu de monde, nous et nos maîtres. Sur la fin, on viendra l'avertir qu'on le demande. Pendant son absence, un tapis, deux paravens feront l'affaire, et nous lui donnerons la plus jolie petite pièce.....

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On ne crie pas la comédie, ce n'est qu'en parlant qu'on la joue bien. Figure charmante! organe flexible et touchant! de l'âme surtout... Que vous manque-t-il? une jeune actrice se fait toujours assez entendre lorsqu'elle a le talent de se faire écouter.

PAULINE.

Oh! ce n'est ni d'éloquence ni d'adresse qu'on vous accusera de manquer pour ramener les gens à vos idées.... Et les couplets que je vous ai de

mandés ?

MÉLAC FILS tendrement.

Vous craignez qu'on ne les oublie! injuste Pauline!.....

PAULINE l'interrompt en s'asseyant.

Essayons donc une pièce avant de m'habiller.

MÉLAC FILS s'assurant de l'accord du violon.

Volontiers.

PAULINE.

Donnez-moi le nouveau livre.

MÉLAC FILS avec humeur.

Pourquoi ne pas suivre le même ?

PAULINE.

Pour sortir un peu de l'ancien genre. Au reste, comme c'était uniquement pour vous.....

MÉLAC FILS d'un air incrédule.

Oui, pour moi!

PAULINE riant.

Voilà bien les ingrats! cherchant toujours à diminuer l'obligation, pour n'être point tenus de la reconnaissance! Cette musique n'est-elle pas plus piquante, plus variée?

MÉLAC FILS mécontent.

Piquante, variée, délicieuse! C'est le beau SaintAlban qui vous l'a choisie à Paris.

PAULINE.

Et toujours Saint-Alban! Vous êtes bien étrange! Votre souverain bonheur serait que personne ne m'aimât.

MÉLAC FILS.

Je ne serai donc jamais heureux.

PAULINE.

Vous voudriez..... qu'on ne pût me souffrir.

MÉLAC FILS.

Je ne désire point l'impossible.

PAULINE gaiement.

Hé! il ne faudrait pas trop vous presser pour vous le faire avouer ingénument.

Non;

MÉLAC FILS.'

mais il est assez simple que je n'aime point un homme qui affiche des sentimens pour vous.

PAULINE.

Pour le venger de cette humeur, vous accompagnerez sa favorite.

MÉLAC FILS.

Oh! non. (Il pose le violon sur une chaise.)

PAULINE.

Vous me refusez?

MÉLAC FILS.

J'aime mieux demander pardon de tout ce que j'ai dit. (Il se met à genoux.)

PAULINE.

Et moi, je le veux.

MÉLAC FILS.

C'est une tyrannie.

PAULINE plaisantant,

Obéissez, ou je ne vous appelle plus mon frère.

MÉLAC FILS d'un air hypocrite, en se relevant.

Si ce nom vous déplaît, vous avez un autre moyen de m'y faire renoncer.

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Vous ne m'entendez pas? Je vais.....

PAULINE lui coupant la parole.

Je vais..... je vais jouer la pièce m'accompagnerez-vous? oui ou non?

MÉLAC FILS lui baise la main.

Pardon, pardon; mais pour celle-ci, en vérité elle est trop difficile.

PAULINE avec une petite moue.

Hum........ mauvais caractère! je sais ce qui vous la fait voir ainsi. (Il lui baise les mains, elle se fache.) Finissez, monsieur de Mélac, je vous l'ai déjà dit, ces libertés m'offensent: laissez mes mains.

1. Théâtre.

II

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