partie postérieure de la cavité crânienne; mais si l'on écarte les nombreux filets qui constituent la queue de cheval, on peut voir un cordon cylindrique, assez grêle, qui continue manifestement la moelle épinière en représentant le filum terminale, et que l'on suit presque jusqu'à l'extrémité de la colonne vertébrale. Ce cordon est, en grande partie, de coloration grise; mais on y distingue cependant, sur les parties latérales, des bandes longitudinales blanches formées de faisceaux de fibres nerveuses; et l'on voit, de distance en distance, se détacher symétriquement de ces parties latérales, des filaments nerveux, véritables paires nerveuses rachidiennes. Cette disposition ne fait, du reste, que reproduire, en l'exagérant, celle que présente le filum terminale chez l'Homme lui-même. D'après nos dissections, ce cordon se terminerait, comme cela a lieu pour la moelle chez plusieurs Poissons, par un renflement d'apparence ganglionnaire d'où partiraient les nerfs destinés à la nageoire caudale. Je mets sous vos yeux une préparation qui vous montre clairement ces particularités, sauf la dernière, l'extrémité du filum terminale n'ayant pas pu être conservée. Chez le Poisson-lune, la moelle épinière se termine bien certainement vers la partie postérieure de la cavité crânienne, par deux cordons très-grêles et contigus, d'apparence ligamenteuse, répondant aux deux moitiés de la moelle, et que l'on perd presque aussitôt de vue, au milieu des nombreux nerfs qui forment une touffe volumineuse en arrière de la moelle. Le canal vertébral, ouvert jusqu'à l'extrémité du corps, ne contient que les prolongements de cette touffe constituant la queue de cheval. Il n'y a pas de cordon grisàtre situé au milieu des nombreux nerfs qui constituent cette queue de cheval, comme chez la Baudroie; et, à l'extrémité postérieure du canal vertébral, on ne trouve aucun renflement ganglionnaire terminal. Un fait bien digne d'attention, c'est le développement énorme des ganglions du système nerveux sympathique, dans la partie postérieure du corps, chez le Poisson-lune. Peut-être en est-il de même chez la Baudroie, où se trouve la condition semblable de l'absence de véritable moelle épinière intra-vertébrale; mais jusqu'ici nous n'avons pas pu examiner l'état du système sympathique chez ce Poisson. La moelle, qui est légèrement aplatie d'avant en arrière chez l'Homme et chez certains animaux, affecte, chez un bon nombre d'autres animaux, une forme à peu près cylindrique. Chez la Lamproie, ainsi que vous pouvez vous en assurer, elle a la forme d'un ruban aplati, élastique, et elle possède une ténacité remarquable: on peut en effet, après avoir coupé la tête et l'extrémité de la queue de l'animal, extraire toute la moelle sans la déchirer, en la saisissant entre les mors d'une pince dans le canal vertébral, presque à l'origine de ce canal, et en la tirant à soi. On sait que, chez les Mammifères, le cordon rachidien offre deux renflements qui correspondent, l'un à l'origine des nerfs des membres antérieurs, l'autre à l'origine des nerfs des membres postérieurs. Ces renflements se retrouvent chez la plupart des Vertébrés quadrupèdes, et sont plus ou moins volumineux, suivant les animaux, et surtout suivant que les membres auxquels ils fournissent des nerfs sont destinés à exécuter des mouvements plus énergiques, ou qu'ils sont destinés à servir d'organes tactiles plus ou moins parfaits. Chez certains Vertébrés, on a avancé que les renflements sont plus nombreux. Ainsi, d'après Arsaky, la moelle épinière du Poisson-lune présenterait plusieurs renflements. J'ai pu me convaincre que cette assertion est inexacte. La moelle épinière qui, chez un individu de moyenne taille, n'a pas plus d'un centimètre de longueur, à partir de l'extrémité postérieure du cervelet, n'a pas un volume bien plus considérable que chez les autres Poissons, et il n'y a rien qui donne l'idée de renflements successifs. Suivant Carus et Dugès, il y aurait, chez les Ophidiens, un léger renflement à l'origine de chaque paire de nerfs. M. de Quatrefages a constaté une disposition semblable chez l'Amphioxus, et M. Faivre a décrit des renflements du même genre chez le Lump (Cyclopterus lumpus). Nous avons pu étudier la moelle de plusieurs Lumps, et nous avons reconnu qu'il n'y a pas de renflements: vous pouvez vous en convaincre par vousmêmes, en examinant cette moelle de Lump. Probablement M. Faivre aura eu à sa disposition un individu déjà altéré. Mais l'existence de renflements au niveau de l'origine de chaque paire de nerfs paraît certaine chez l'Amphioxus, et c'est là un fait intéressant, car chez cet animal, le dernier des Vertébrés, on trouve ainsi une transition entre la moelle épinière et la chaîne ganglionnaire des Arthrozoaires. Je ne vous parlerai ni des sillons, ni des cordons de la moelle épinière, ni de ses enveloppes: ce sont là certainement des détails très-importants d'anatomie descriptive; mais je ne puis m'en occuper ici, et j'ai hâte d'arriver aux notions qui peuvent servir directement à nos études physiologiques. J'arrive donc immédiatement à l'indication des parties constituantes de la moelle épinière. Nous prenons toujours les Vertébrés supérieurs et plus particulièrement les Mammifères, comme types, pour nos aperçus généraux. Quand on fait une section transversale de la moelle, on voit tout d'abord, comme vous le savez, qu'elle est formée de deux substances de couleur différente. La substance la plus externe, qui sert comme d'enveloppe à la substance centrale, est blanche. L'autre, au contraire, est grise. Les divers cordons de la moelle, sorte d'enveloppe corticale, sont formés de substance blanche exclusivement. Quels sont les éléments constituants de la substance blanche? Ils sont les mêmes que ceux des nerfs; la substance blanche corticale est composée de faisceaux de fibres nerveuses dirigées pour la plupart suivant l'axe de la moelle, plus grêles que celles des nerfs, revêtues d'une enveloppe conjonctive plus ténue. Au milieu de ces faisceaux se trouve du tissu conjonctif et des vaisseaux. Le tissu conjonctif forme une couche mince appliquée sur la surface de la moelle épinière et remplit les sillons antérieurs et postérieurs. De ce tissu partent des prolongements qui s'enfoncent entre les fibres nerveuses, entourent chacune d'elles, et traversent ainsi toute l'épaisseur des faisceaux de la moelle pour aller se rendre dans la substance grise. Il constitue une sorte de gangue qui cimente tous les éléments anatomiques nerveux, ou éléments nobles; il joue du reste ici, comme partout ailleurs, le rôle physiologique important que les travaux de M. Virchow ont fait connaître: il sert de voie aux matériaux destinés à la nutrition. intime. La substance grise, substance médullaire de la moelle épinière, est constituée par des éléments divers, que nous retrouverons, plus ou moins modifiés, dans la substance grise des autres parties des centres nerveux: 1° par des cellules nerveuses, 2° par une matière granuleuse contenant des noyaux; 3° par des fibres nerveuses; 4° par des vaisseaux et du tissu conjonctif. Nous allons dire quelques mots de ces différents éléments, en commençant par les plus caractéristiques. a. Cellules nerveuses. Ce sont les organites fondamentaux des parties nerveuses centrales. On les retrouve dans toutes ces parties: moelle épinière, moelle allongée, hémisphères cérébraux, ganglions spinaux, ganglions du grand sympathique, etc. Elles existent en général chez tous les animaux; chez quelques-uns d'entre eux seulement, leur existence est douteuse. Voici les caractères des cellules nerveuses. Ce sont de petits amas d'une matière protéique nerveuse, transparente, finement granuleuse, munis d'ordinaire de plusieurs prolongements. Ces amas renferment un noyau pourvu d'un nucléole, quelquefois de deux ou trois nucléoles, et sont probablement contenus dans une membrane enveloppante extrêmement ténue. D'après des recherches faites surtout sur les ganglions spinaux (Lieberkühn, 1849; Guido Wagener, 1857;-Harless, lobe électrique de la Torpille), on peut se demander si les prolongements cellulaires ne naîtraient pas du nucléole de la cellule. Mais, au moins pour la moelle épinière, ce fait me paraît plus que douteux, car j'ai vu très-nettement, sous l'influence des réactifs colorants, le nucléole des cellules se teindre d'une façon toute spéciale, très-différente de celle du prolongement, et je n'ai jamais pu suivre ce prolongement dans l'intérieur de la cellule. Le nucléole, surtout chez les Vertébrés inférieurs, |