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montrée partout. Nous verrons même que le mode général de terminaison des nerfs conduit à considérer cette disposition comme devant être exceptionnelle.

Pour moi, je crois encore, comme je vous l'ai dit, que l'explication indiquée par Magendie, et nettement formulée par M. Cl. Bernard, est tout à fait satisfaisante. Les racines antérieures contiennent quelques fibres sensitives qui proviennent des racines postérieures, mais qui commencent leur trajet récurrent pour remonter vers les racines antérieures et la moelle, en des points d'ordinaire trèséloignés du lieu de réunion des deux racines et plus ou moins rapprochés de la périphérie. Les nerfs moteurs et les racines antérieures sont, de cette façon, doués de sensibilité comme le sont la plupart des autres organes du corps.

La sensibilité récurrente mérite à peine d'être considérée comme un fait de physiologie générale : elle n'existe pas vraisemblablement chez tous les animaux; on ne peut pas la constater chez les animaux dits à sang froid, chez les Batraciens, par exemple. M. Moreau a tenté en vain de produire des phénomènes de sensibilité récurrente chez des Poissons. Il est certain, d'autre part, que son intensité varie beaucoup dans les différentes classes de Mammifères où on l'a cherchée. J'ai examiné si la sensibilité récurrente existe dans les racines antérieures des nerfs chez les Oiseaux (Pigeons); je n'en ai pas trouvé le moindre indice.

La sensibilité récurrente n'en est pas moins un fait trèsintéressant, et dont l'étude a permis de dissiper les dernières obscurités relatives au rôle exclusif des racines des nerfs.

Telle est la physiologie des racines spinales des nerfs ;

mais, comme je vous l'ai dit en commençant cette étude, tous les nerfs ne naissent pas de la moelle épinière, il en est qui naissent du cerveau et que l'on a appelés nerfs cràniens. De ces derniers, les uns sont purement sensitifs, comme le nerf olfactif, le nerf optique, le nerf auditif; d'autres sont moteurs, comme le nerf moteur oculaire commun, le nerf pathétique, le nerf moteur oculaire externe, le nerf facial, le nerf hypoglosse, lequel présente cependant une petite racine postérieure ou sensitive chez un bon nombre de Mammifères, et le nerf spinal; enfin d'autres sont mixtes, comme le trijumeau, le pneumogastrique, le glosso-pharyngien.

Je ne dirai rien de particulier sur ces nerfs. Nous ne nous occupons que de la physiologie générale des nerfs: or, les considérations que j'ai déjà exposées, et celle que j'ai encore à développer à ce point de vue, s'appliquent évidemment aux nerfs crâniens de même qu'aux nerfs rachidiens.

HUITIÈME LEÇON.

23 juin 1864.

TERMINAISON DES NERFS.

Terminaison des nerfs dans la peau et dans les membranes muqueuses. Corpuscules de Meissner. Corpuscules de Pacini ou de Vater. — Corpuscules de W. Krause.

Terminaison des nerfs dans les muscles.

Circulation nerveuse.

- Plaques motrices terminales de Rouget.

Les travaux de Ch. Bell et de Magendie ont fait faire à la physiologie générale des nerfs un immense progrès. Les présomptions heureuses, conçues antérieurement par des esprits supérieurs, relativement à l'existence de nerfs distincts pour la sensibilité et le mouvement, seraient restées ensevelies dans l'oubli le plus profond, si les expériences de ces deux physiologistes ne les avaient remises en lumière: aussi, peut-on dire que ces vues n'avaient eu aucune influence sur la marche de la science. Toutes les fois qu'une grande découverte se produit, dans quelque région scientifique que ce soit, il est rare que l'on n'aille point remuer les

cendres du passé, et qu'on ne parvienne pas à y rencontrer un indice quelconque qui aurait pu mettre sur la voie de cette découverte; mais il y aurait une injustice évidente à vouloir ainsi diminuer le mérite de ceux qui l'ont faite. C'est donc bien à Charles Bell et surtout à Magendie que nous devons de savoir maintenant que les fonctions de la sensibilité et du mouvement s'exécutent par des fibres distinctes; que ces fibres sont entremêlées les unes aux autres dans les nerfs rachidiens, lesquels sont ainsi des nerfs mixtes; et enfin, que ces fibres sont séparées les unes des autres dans les deux racines de ces nerfs. On sait de plus, aujourd'hui, que les nerfs mixtes contiennent encore un troisième ordre de fibres, les fibres nerveuses de la vie organique, qui proviennent pour la plupart des ganglions du grand sympathique.

Ces fibres ainsi entremêlées dans les nerfs mixtes se séparent à la périphérie; les fibres motrices vont aux muscles, les fibres sympathiques se rendent surtout aux vaisseaux, aux muscles lisses et aux glandes, et les fibres sensitives se distribuent aux divers organes, mais principalement à la peau.

Comment se fait la terminaison des nerfs? C'est une question dont l'examen peut nous mettre à même de juger de la valeur de certaines hypothèses plus ou moins spécieuses, relatives au mécanisme de l'action nerveuse, et, entre autres, de l'hypothèse de la circulation nerveuse. C'est donc une question d'une haute importance. Aussi, a-t-on entrepris, surtout dans ces dernières années, de très nombreuses recherches, ayant pour but d'établir avec précision le mode de terminaison des nerfs. Nous ne pourrons pas analyser ces différents travaux, et il faudra nous

borner à en signaler les résultats les plus importants. Mais auparavant, il convient de faire quelques remarques préliminaires.

Les fibres nerveuses ne présentent, on le conçoit bien, aucune interruption réelle depuis leur origine jusqu'à leur extrémité périphérique. Elles s'accolent les unes aux autres, s'enchevêtrent pour former des plexus, puis se séparent plus loin, et conservent leur identité pendant tout leur trajet. On a, surtout autrefois, imaginé différentes hypothèses qui attribuaient un rôle physiologique spécial aux plexus nerveux. Aujourd'hui, ces hypothèses sont abandonnées, et il est probable que c'est avec raison, car les plexus ne constituent vraisemblablement qu'un simple moyen de distribution des fibres nerveuses.

Si les fibres nerveuses de fonctions différentes restent bien distinctes dans tout leur trajet, on ne peut plus admettre maintenant, comme on le croyait encore naguère, qu'elles demeurent simples d'une extrémité à l'autre. On sait en effet qu'elles se divisent presque toutes, et que le mode et le nombre de leurs divisions varient. Il est probable qu'un grand nombre d'entre elles se bifurquent ou se ramifient même pendant leur trajet de la moelle à la périphérie; mais c'est surtout près de leur terminaison que l'on a observé et étudié leurs divisions. Tantôt les fibres paraissent ne présenter qu'une seule bifurcation; tantôt les branches de bifurcation se divisent à leur tour, et ces nouvelles divisions peuvent se subdiviser encore deux ou trois fois. D'autres fibres émettent des branches, pour ainsi dire alternes, en nombre variable avant de se terminer; d'autres fibres enfin, à une certaine distance de leur terminaison, se divisent en une sorte de bouquet de fibres. Toutes ces fibres secondaires

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