Dites-moi si jamais cela se fait ainsi. Eli. N'allez point là-dessus me consulter ici : SCÈNE IV. Arsinoé, Célimène, Eliante, Alceste, Philinte, Acaste, Clitandre, Oronte. Ac., (à Célimène.) Madame, nous venons tous deux, sans vous déplaire, Clit., (à Oronte et à Alceste.) Fort à propos, messieurs, vous vous trouvez ici; Ars.(à Cél.) Madame, vous serez surprise de ma vue, Ac. Oui, madame, voyons d'un esprit adouci Clit. Vous avez pour Acaste écrit ce billet tendre. Messieurs, ces traits pour vous n'ont point d'obscurité, À connaître sa main n'ait trop su vous instruire. Mais ceci vaut assez la peine de le lire : Vous êtes un étrange homme, Clitandre, de condamner mon enjouement, et de me reprocher que je n'ai jamais tant de joie que lorsque je ne suis pas avec vous. Il n'y a rien de plus injuste: et si vous ne venez bien vite me demander pardon de cette offense, je ne vous la pardonnerai de ma vie. Notre grand flandrin de vicomte... Il devrait être ici. Notre grand flandrin de vicomte, par qui vous commencez vos plaintes, est un homme qui ne saurait me revenir ;' et, depuis que je l'ai vu, trois quarts d'heure durant, cracher dans un puits pour faire des ronds, je n'ai pu jamais prendre bonne opinion de lui. Pour le petit marquis... C'est moi-même, messieurs, sans nulle vanité. Pour le petit marquis, qui me tint hier long-temps la main, je trouve qu'il n'y a rien de si mince que toute sa personne, et ce sont de ces mérites qui n'ont que la cape et l'épée. Pour l'homme aux rubans verts... (A Alceste.) À vous le dé, monsieur. Pour l'homme aux rubans verts, il me divertit quelquefois avec ses brusqueries et son chagrin bourru; mais il est cent moments où je le trouve le plus fâcheux du monde. Et pour l'homme au sonnet... (A Oronte.) Voici votre paquet. Et pour l'homme au sonnet, qui s'est jeté dans le be esprit, et veut être auteur malgré tout le monde, je ne puis me donner la peine d'écouter ce qu'il dit; et sa prose me fatigue autant que ses vers. Mettez-vous donc en tête que je ne me divertis pas toujours si bien que vous pensez; que je vous trouve à dire, plus que je ne voudrais, dans toutes les parties où l'on m'entraîne; et que c'est un merveilleux assaisonnement aux plaisirs qu'on goûte, que la présence des gens qu'on aime. Clit. Me voici maintenant, moi. Votre Clitandre, dont vous me parlez, et qui fait tant le doucereux, est le dernier des hommes pour qui j'aurais de l'amitié. Il est extravagant de se persuader qu'on l'aime, et vous l'êtes de croire qu'on ne vous aime pas. Changez, pour être raisonnable, vos sentiments contre les siens; et voyez-moi le plus que vous pourrez, pour m'aider à porter le chagrin d'en être obsédée. D'un fort beau caractère on voit là le modèle, 1 Me revenir, me plaire. Montrer de votre cœur le portrait glorieux. Ac. J'aurais de quoi vous dire, et belle est la matière ; Mais je ne vous tiens pas digne de ma colère; Et je vous ferai voir que les petits marquis Ont, pour se consoler, des cœurs de plus haut prix. SCÈNE V. Célimène, Eliante, Arsinoé, Alceste, Oronte, Philinte. Or. Quoi! de cette façon je vois qu'on me déchire, Après tout ce qu'à moi je vous ai vu m'écrire ! Et votre cœur, paré de beaux semblants d'amour, À tout le genre humain se promet tour à tour! Allez, j'étais trop dupe, et je vais ne plus l'être ; Vous me faites un bien, me faisant vous connaître ; J'y profite d'un cœur qu'ainsi vous me rendez, Et trouve ma vengeance en ce que vous perdez. (A Alc.) Monsieur je ne fais plus d'obstacle à votre flamme, Et vous pouvez conclure affaire avec madame. SCÈNE VI. Célimène, Eliante, Arsinoé, Alceste, Philinte. Ars., (à Cél.) Certes, voilà le trait du monde le plus noir: Je ne m'en saurais taire, et me sens émouvoir. Voit-on des procédés qui soient pareils aux vôtres ? Mais, monsieur, que chez vous fixait votre bonheur, Devait-il... Alc. Laissez-moi, madame, je vous prie, Et ne vous chargez point de ces soins superflus; Et ce n'est pas à vous que je pourrai songer, Si par un autre choix je cherche à me venger. Ars. Hé! croyez-vous, monsieur, qu'on ait cette pensée, Et que de vous avoir on soit tant empressée ? Je vous trouve un esprit bien plein de vanité, Si de cette créance il peut s'être flatté. Dont on aurait grand tort d'être si fort éprise. SCÈNE VII. Célimène, Eliante, Alceste, Philinte. Alc., (à Cél.) Hé bien! je me suis tû, malgré ce que je voi, Et j'ai laissé parler tout le monde avant moi. Ai-je pris sur moi-même un assez long empire? Et puis-je maintenant... ? Cél. Oui, vous pouvez tout dire ; Mais je tombe d'accord de mon crime envers vous. Alc. Vous voyez ce que peut une indigne tendresse, 1 C'est par-là seulement que, dans tous les esprits, Et qu'après cet éclat qu'un noble cœur abhorre Il peut m'être permis de vous aimer encore. Cél. Moi, renoncer au monde avant que de vieillir! Alc. Et, s'il faut qu'à mes feux votre flamme réponde, Cél. La solitude effraie une âme de vingt ans. Alc. Non, mon cœur à présent vous déteste, SCENE VIII. Eliante, Alceste, Philinte. Alc., (à Eliante.) Madame, cent vertus ornent votre beauté, Et je n'ai vu qu'en vous de la sincérité ; De vous, depuis long-temps, je fais un cas extrême : Eli. Vous pouvez suivre cette pensée; Ma main de se donner n'est pas embarrassée ; Et voilà votre ami, sans trop m'inquiéter, Qui, si je l'en priais, la pourrait accepter. Phil. Ah! cet honneur, madame, est toute mon envie, Et j'y sacrifierais et mon sang et ma vie. Alc. Puissiez-vous, pour goûter de vrais contentements, L'un pour l'autre à jamais garder ces sentiments! |