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grandes affaires, et de grandes dissertations sur

les petites.

Je suis avec le plus profond respect,

Monsieur,

Votre très-humble et très

obéissant serviteur,

L'AUTEUR. (44)

IRONI E.

I. (45)

HERMIONE.

SEIGNEUR, dans cet aveu dépouillé d'artifice, J'aime à voir que du moins vous vous rendiez justice; Et que, voulant bien rompre un nœud si solennel, Vous vous abandonniez au crime en criminel.

Est-il juste, après tout, qu'un conquérant s'abaisse Sous la servile loi de garder sa promesse?

Non, non, la perfidie à de quoi vous tenter;
Et vous ne me cherchez que pour vous en vanter.
Quoi! sans que ni serment ni devoir vous retienne,
Recherchez une Grecque, amant d'une Troyenne?
Me quitter, me reprendre, et retourner encor
De la fille d'Hélène à la veuve d'Hector!
Couronner tour à tour l'esclave et la princesse !
Immoler Troie aux Grecs, au fils d'Hector la Grèce !
Tout cela part d'un cœur toujours maître de soi,
D'un héros qui n'est point esclave de sa foi.
Pour plaire à votre épouse, il vous faudrait peut-être
Prodiguer les doux noms de parjure et de traître.
Vous veniez de mon front observer la pâleur,
Pour aller, dans ses bras, rire de ma douleur!
Pleurante après son char vous voulez qu'on me voie ;
Mais, seigneur, en un jour, ce serait trop de joie;
Et, sans chercher ailleurs des titres empruntés,
Ne vous suffit-il pas de ceux que vous portez?
Du vieux père d'Hector la valeur abattue
Aux pieds de sa famille expirante à sa vue;
Tandis que dans son sein votre bras enfoncé,
Cherche un reste de sang que l'àge avait glacé;
Dans des ruisseaux du sang Troie ardente plongée;
De votre propre main Polyxène égorgée
Aux yeux de tous les Grecs indignés contre vous;
Que peut-on refuser à ces généreux coups? (46)

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II. (47)

EH bien! Marquise, comment vous trouvezvous des plaisirs de la nuit dernière? n'en êtes vous pas un peu fatiguée? Convenez donc que Danceny est charmant! il fait des prodiges, ce garçon-là? Vous n'attendiez pas cela de lui, n'est-il pas vrai? Allons, je me rends justice; un pareil rival méritait bien que je lui fusse sacrifié. Sérieusement, il est plein de bonnes qualités! Mais sur-tout, que d'amour, de constance, de délicatesse! Ah! si jamais vous êtes aimée de lui comme l'est sa Cécile, vous n'aurez point de rivales à craindre il vous l'a prouvé cette nuit. Peut-être à force de coquetterie, une autre femme pourra vous l'enlever un moment; un jeune homme ne sait guère se refuser à des agaceries provoquantes; mais un seul mot de l'objet aimé suffit, comme vous voyez, pour dissiper cette illusion: ainsi il ne vous manque plus que d'être cet objet-là, pour être parfaitement heureuse.

Sûrement vous ne vous y tromperez pas; vous avez le tact trop sûr pour qu'on puisse le craindre. Cependant l'amitié qui nous unit,

aussi

aussi sincère de ma part que bien reconnue de la vôtre, m'a fait désirer, pour vous, l'épreuve de cette nuit; c'est l'ouvrage de mon zèle; il a réussi : mais point de remerciemens, cela n'en vaut pas la peine : rien n'était plus facile.

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Au fait, que m'en a-t-il coûté? Un léger sacrifice et quelque peu d'adresse. J'ai consenti à partager avec le jeune homme les faveurs de sa maîtresse mais enfin il y avait bien autant de droit que moi, et je m'en souciais si peu ! La lettre que la jeune personne lui a écrite, c'est bien moi qui l'ai dictée; mais c'était seulement pour gagner du temps, parce que nous avions à l'employer mieux. Celle que j'y ai jointe, oh! ce n'était rien, presque rien; quelques réflexions de l'amitié pour guider le choix du nouvel amant: mais en honneur, elles étaient inutiles; il faut dire la vérité, il n'a pas balancé un moment.

Et puis, dans sa candeur, il doit aller chez vous aujourd'hui vous raconter tout; et sûrement ce récit-là vous fera grand plaisir! il vous dira lisez dans mon cœur ; il me le mande et vous voyez-bien que cela raccommode tout. J'espère qu'en y lisant ce qu'il voudra, vous y lirez peut-être aussi que les amans si jeunes ont leurs dangers; et encore, Tome I.

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qu'il vaut mieux m'avoir pour ami que pour ennemi.

Adieu, Marquise, jusqu'à la première occasion. (48)

ELOQUENCE.

I. (49)

MESSIEURS, au milieu de tant de débats tumultueux, ne pourrais-je donc pas ramener à la délibération du jour par un petit nombre de questions simples?

Daignez, Messieurs, daignez me répondre. Le premier ministre des finances ne vous at-il pas offert le tableau le plus effrayant de notre situation actuelle ?

Ne vous a-t-il pas dit que tout délai aggravait le péril? qu'un jour, une heure, un instant pouvait le rendre mortel?

Avons-nous un plan à substituer à celui qu'il Oui, a crié quelqu'un dans l'assemblée. Je conjure celui qui répond

nous propose?

-

Oui de considérer que son plan n'est pas connu;

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