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Mon parti est pris depuis longtemps.
Je suis pour la vérité.

Rien au monde aucun motif d'intérêt, aucune

raison d'État - ne pourrait me déterminer à accepter d'être le complice du Mensonge et de la Bêtise. N'ayant pas attendu la crise actuelle pour déclarer un patriotisme qui, je crois, fut toujours exempt de phrase et d'ostentation, je refuse de souiller ma religion par la connivence des menteurs et de la compromettre par le ridicule secours des nigauds.

Et j'aime trop passionnément l'armée pour ne pas considérer comme un exécrable sacrilège toute tentative qui consisterait à exposer son honneur à de telles solidarités.

Lorsqu'on est solidement ancré dans le ferme propos de rester fidèle à la vérité, à la justice, au devoir, on est assuré de défendre une cause qui survivra aux agitations d'un moment et aux accidents d'une crise passagère. Et l'on est sûr, par ce moyen, de se rencontrer tôt ou tard, en dehors des coteries, des conspirations et des bandes, avec tous les Français de bonne foi et de bonne volonté.

L'heure du réveil est venue, après un si pesant cauchemar. Il y a, dans la vie des peuples, comme dans la vie des individus, de ces heures décisives et courtes, où l'on tient sa fortune dans sa main. Hier, il n'était pas temps encore. Demain il sera

trop tard. C'est aujourd'hui qu'il faut se mettre à l'ouvrage, de tout notre cœur.

La troisième République, jusqu'ici tâtonnante et indécise, peut, dans un renouveau d'énergie qui marquera son age adulte, ajouter à nos annales une page digne de notre passé. Elle le peut, à condition que nous avons souci de l'héritage de gloire qui ne doit pas, sous peine de forfaiture, péricliter entre nos mains. Elle le peut, si nous nous efforçons d'être les dignes descendants des braves gens et des grands hommes qui nous ont légué un si beau patrimoine de souvenirs, de sentiments et d'idées. Elle le peut, pourvu que l'intégrité de la patrie et les droits imprescriptibles de la justice préoccupent notre pensée et stimulent notre action.

On rapporte que l'amiral Nelson, le matin du jour où il devait livrer la bataille de Trafalgar, fit signaler aux commandants des navires placés sous ses ordres ces simples mots : L'Angleterre compte que chacun fera son devoir.

Le salut des peuples est tout entier dans cette formule. Je voudrais qu'une voix plus éloquente que la mienne pùt la fixer dans la mémoire des Français, à cette heure impérieuse où tout dépend de ce que nous allons dire et faire.

Nous avons le champ libre devant l'Europe attentive. A nous de montrer si nous voulons, oui ou non, continuer l'histoire de France.

Nous la continuerons, j'en ai le ferme espoir, si nous savons reprendre l'antique tradition de notre race, suivre la noble devise des Français, enseigner aux multitudes incertaines et inquiètes l'efficace parole de loyauté, de désintéressement et de chevalerie :

FAIS CE QUE DOIS; ADVIENNE QUE POURRA.

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