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Régnier a dû vous déplaire, non » point à cause des indécences qui sont » un peu trop fréquentes dans ses poé>> sies, car c'est ce que vous pardonnez >> le plus volontiers; mais à cause de »sa candeur, de sa naïveté, et parce » que ses satires, sans fiel, sans amer>> tume, remplies de très-bons précep»tes de morale et de morceaux d'une >> excellente poésie, seront à jamais la » condamnation des vôtres, qui ont été » inspirées par la haine et par la ven» geance.

» Il ne me reste plus, dans cette » lettre, à vous parler que de Segrais, » que vous avez constamment traité de » la manière la plus méprisante, en ré» pétant sans cesse qu'on ne le lisait plus.

cite tout entière; mais elle est beaucoup trop longue pour la placer içi,

>> Il est étonnant, monsieur, que >> vous ayez porté ce jugement d'un » poète qui a excellé dans les poésies » champêtres, car vous n'avez point fait d'églogues !.... Nous n'avons rien » dans vos ouvrages, qui tienne à la » poésie pastorale, si ce n'est pour>> tant, dans votre Henriade, le neu» vième chant, qui est tout entier une » idylle sur les amours de Henri IV et >> de Gabrielle d'Estrées, mais une » idylle sans aucun dialogue, car ces » amans ne s'y disent pas un seul mot. » C'était à vous qu'il était réservé de >> faire accorder le chalumeau avec la » trompette, et d'écrire les amours » d'un guerrier, dans un poëme héroï» que, avec le style du Pastor fido. » ( Premier volume des lettres de M. Clément adressées à M. de Voltaire.)

M. CLÉMENT.

Nous en restérons là pour aujourd'hui, et je crains même d'avoir abusé du temps et de la patience des personnes si indulgentes et si redoutables par leur goût qui veulent bien m'é

couter.

LA MARECHALE.

Je puis vous assurer, monsieur, que cette lecture est aussi attachante qu'elle est instructive et solide.....

LE COMTE.

Il n'en est point, en effet, qui puisse mieux former l'esprit, le coeur et la raison. Il est certain que tous les instituteurs devraient la recommander à leurs élèves.

LE CHEVALIER.

Ce soin serait bien inutile, du moins pendant long-temps, car les écrits de Voltaire ont enivré toute notre jeu

nesse.

LE COMTE.

Je le crois bien. Comment, privée d'expérience et de réflexion, comment résisterait-elle à tant de cabales et d'intrigues? Je ne dis pas à tant de séductions; je pense, depuis bien long-temps, comme monsieur Clément, que les mauvais ouvrages de Voltaire n'en ont point; que des injures de la halle ne sont point de la gaîté, et qu'il ne faut ni grâce, ni esprit, ni talent, pour débiter des impiétés révoltantes, des principes séditieux et les obscénités les plus grossières.

M. CLÉMENT.

Oui, mais toutes ces choses mettent à l'aise les passions d'un âge turbulent et inconsidéré.

LE CHEVALIER.

Si Voltaire eût été retenu, modeste, délicat, pensant bien, il n'aurait pas le quart de la vogue que nous lui voyons.

LA DUCHESSE.

Il aurait, ce qui vaut mieux, l'estime des honnêtes gens,

LE CHEVALIER.

L'estime ne fait pas de bruit, et le scandale en fait tant!

M. CLÉMENT.

C'est le bruit du verre qui se brise; il blesse, mais, par le tumulte même

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