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» veaux. Ils oublient, sans doute, qu'il » y a mille choses dans la nature que >> l'on cache avec grand soin, et que » les imitations faites par l'art doivent >> être non-seulement naturelles, mais » décentes et instructives.

» Vous vous avisâtes le premier, et >> aussitôt beaucoup d'autres s'avisè» rent qu'il fallait donner un nouveau » ton à la poésie; que, si l'on y pou>>vait faire entrer des termes de lo

gique, de chimie, de peinture, et » même de la physique de Newton, >>> avec tout son attirail algébrique, ce >> serait une grande victoire remportée » sur le dernier siècle, où l'on croyait » que les images étaient le véritable » langage poétique; où l'on ne savait pas, » en un mot, que le système de l'attrac» tion et de la gravitation pouvait four

»nir des vers bien harmonieux et bien » coulans.

» Une plaisanterie bonne ou mau»vaise, un jeu de mots, une tournurę » épigrammatique ou sentencieuse, tout » cela vous dispensait de rien approfon» dir; et, en cinq ou six pages, Vous » aviez traité la matière la plus grave » de l'air le plus délibéré. Vous eûtes » une foule d'imitateurs en ce genre si » facile. Vous fûtes le héros des petits>> maîtres ignorans. Il n'y en eut pas » un qui, d'esprit et de philosophie, » n'apprît par cœur quelques chapitres » de vos mélanges, et ne pût, avec un »tel renfort, tenir tête à la raison » même, et déconcerter le bon sens le » plus déterminé.

» Enfin, monsieur, vous avez vu vo» tre siècle docile suivre aveuglément

» vos décisions, et former son goût sur » le vôtre. Vous avez donc, par vos » opérations littéraires, préparé cette >> révolution qui a été plus loin que vous >> ne pensiez. Elle nous a jetés à un tel » degré de mauvais goût, qu'il n'y a plus » qu'un siècle de barbarie et d'ignorance » entière qui puisse nous faire oublier >> tant de sottises, et nous remettre en » état d'avoir des notions plus simples >>> et plus saines, un jugement plus » pur et un goût plus naturel.

» Heureux encore, si vous n'aviez » égaré les esprits, que dans les choses >> d'agrément! elles tiennent, il est vrai, » à la gloire d'un peuple; mais enfin el» les ne sont pas si essentielles à » l'homme, qu'il ne puisse s'en passer, » sans qu'il en coûte rien à ses vertus » et à son bonheur! Un mal effrayant

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» et peut-être, irréparable, que la lec» ture de vos écrits a fait à votre siè de, à votre nation, c'est le coup mortel qu'ils ont porté aux mœurs. » Je ne m'arrêterai point sur tout ce que ce tableau présente de triste, et » de déplorable. Que l'on considère » seulement le funeste effet qu'ont pro» duit ces ouvrages dangereux sur les » femmes et sur les jeunes gens; car c'est à eux principalement que vous > avez droit de plaire, par la légèreté, » et j'ose dire par la frivolité de votre >> esprit.

» Je ne sais par quelle fatalité, ou » plutôt par quel effet de leur carac»tère et de leur tempérament, les » femmes, en général, son portées à » préférer l'étourderie, la folie, l'im» pertinence même, à la sagesse,

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» la prudence et à la raison. Mettez » dans une compagnie de femmes, si » l'on veut les plus honnêtes, deux >> hommes, dont l'un, tranquille et » réservé, aura l'esprit agréable, orné, >> mais solide, saura se taire et parler à >> propos; l'autre sera pétulant, bardi, grand parleur, plaisantera à tort et à >> travers sur les choses les plus res» pectables, déchirera les absens, rail» lera vivement les présens, n'écou» tera que ce qu'il dit, rira le premier » de ses saillies les plus hasardées, ré* pondra par un quolibet aux discours » les plus sensés. A coup sûr, toutes >> ces femmes n'auront des yeux et des » oreilles que pour notre étourdi; et, » quand même elles auraient quelque >> estime pour l'autre, elles se senti»ront toujours entraînées, par je ne

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