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en procès, en querelles et en dissensions? Je laisse un plus long détail, que tant de fois j'ai déjà fait en d'autres discours; et, pour finir celui-ci, j'en reviens à cet avis important que donna J. C. à saint Thomas, et que je vous donne à vous-mêmes: Noli esse incredulus, sed fidelis. Préservons-nous des désordres de l'incrédulité, en nous soumettant à la foi; soyons fidèles, et soyonsle d'esprit et de coeur: soyons-le d'esprit en nous rendant dociles aux vérités de la foi, et soyons-le de cœur par un zèle ardent pour la foi. Surtout conformons notre vie à notre foi, et honorons notre foi par notre vie. Que la foi soit la règle de toutes nos actions; que la foi soit le remède de toutes nos passions; que la foi soit le principe de toutes nos délibérations. Heureux si nous croyons ainsi! la foi comme un guide infaillible, nous conduira dans la voie du salut et nous fera parvenir à l'éternelle félicité que je vous souhaite.

Ainsi soit-il.

SERMON

DE MASSILLON.

DES DOUTES SUR LA RELIGION.

Sed hunc scimus undè sit; Christus autem cùm venerit, nemo scit undè sit.

'Nous savons d'où celui-ci vient; mais pour le Christ, lorsqu'il paroîtra, personne ne saura d'où il vient. Joan. 7, 27.

VOILA le grand prétexte que incrédulité des juifs opposoit à la doctrine et au ministère de Jésus-Christ: des doutes sur la vérité de sa mission. Nous savons qui vous êtes, et d'où vous venez, lui disoient-ils; mais le Christ que nous attendons, quand il paroîtra, nous ne saurons d'où il vient. Il n'est donc pas clair que vous soyez le Messie promis à nos pères; peut-être est-ce

un esprit imposteur qui opère par vous des prestiges à nos yeux, et qui impose à la crédulité du vulgaire ; tant de séducteurs ont déjà paru dans la Judée, lesquels, en se disant le grand Prophète qui doit venir, ont trompé les peuples, et se sont enfin attiré la punition due à leur imposture! Netenez plus nos esprits en suspens: Quousquè animam nostram tollis? et si vous voulez que nous vous croyions le Christ, montrez-nous que vous l'êtes, d'une manière qui ne laisse plus de lieu au doute et à la méprise.

Je n'oserois le dire ici, mes frères, si le langage des doutes sur la foi n'étoit devena si commun parmi nous, que nous n'avons plus besoin de précaution pour entreprendre de le combattre : voilà le prétexte presque le plus universel dont on se sert tous les jours dans le monde pour s'autoriser dans une vie toute criminelle. Tout est plein aujourd'hui de ces pécheurs qui nous disent froidement qu'ils se convertiroient s'ils étoient bien sûrs que tout ce que nous leur disons de la Religion fût véritable; que peutêtre il n'y a rien après cette vie ; qu'ils ont des doutes et des difficultés sur nos mystères auxquels ils ne trouvent point de réponse qui les satisfasse; qu'au fond, tout paroît assez incertain, et qu'avant de s'embar

quer à suivre toutes les maximes sévères de l'Evangile, il faudroit être bien assuré que nos peines ne seront pas perdues.

Or, je ne veux pas aujourd'hui confondre l'incrédulité par les grandes preuves qui établissent la vérité de la foi chrétienne: outre que nous les avons déjà établies ailleurs, c'est un sujet trop vaste pour un discours, et qui n'est pas même souvent à la portée de la plupart de ceux qui nous écoutent; c'est faire souvent trop d'honneur aux objections frivoles de presque tous ceux qui se donnent pour esprits forts dans le monde, que d'employer le sérieux de notre ministère à les réfuter et à les combattre.

Il faut donc aujourd'hui tenter une voie plus abrégée et plus facile. Mon dessein n'est pas d'entrer dans le fond des preuves qui rendent témoignage à la vérité de la foi je veux seulement vous découvrir le faux de l'incrédulité; je veux vous prouver que la plupart de ceux qui se disent incrédules ne le sont pas; que presque tous les pécheurs qui nous vantent, qui nous allèguent sans cesse leurs doutes comme le seul obstacle à leur conversion, ne doutent point; et que de tous les prétextes dont on se sert pour ne pas changer de vie, celuides doutes sur la Religion, qui est devenu

le plus commun, est le moins vrai et le moins sincère.

Il paroît d'abord étonnant que j'entreprenne de prouver à ceux qui croient avoir des doutes sur la Religion, et qui nous les opposent sans cesse, qu'ils ne doutent point en effet; cependant, pour peu que l'on connoisse les hommes, et qu'on fasse attention surtout au caractère de ceux qui se vantent de douter, rien n'est plus aisé que de s'en convaincre. Je dis à leur caractère," où entre toujours le déréglement, l'ignorance et la vanité ; et voilà les trois sources les plus ordinaires de leurs doutes : ils en font honneur à l'incrédulité qui n'y a presque point de part. C'est premièrement, le déréglement qui propose sans oser les croire. Première réflexion.

les

C'est, en second lieu, l'ignorance qui les adopte sans les comprendre. Seconde

réflexion.

C'est, enfin, la vanité qui s'en fait honneur sans pouvoir parvenir à s'en faire une ressource. Dernière réflexion.

C'est-à-dire que la plupart de ceux qui se disent incrédules dans le monde, sont assez déréglés pour désirer de l'être, trop ignorans pour l'être en effet, et assez vains cependant pour vouloir le paroître. Déve

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