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LE CHEVALIER.

L'élan est donné. Je vous prédis que Voltaire sera long-temps encore à la mode.

LE COMTE.

Tant pis pour la religion et les mœurs.

M. CLÉMENT.

Il a commencé par en affaiblir l'utile et sainte autorité, afin de prolonger son règne. C'était, avec ses projets, s'y bien prendre.

LA MARÉCHAle.

Mais il ne faut pas que monsieur Clément et tous les gens de bien se découragent.

LE COMTE.

Non, assurément. Ce qu'ils ne peuvent faire dans un temps, leurs écrits le feront dans un autre. Comme le dit notre grand Bossuet l'erreur n'a jamais de point fixe : c'est pourquoi les schismes finissent toujours par deve

nir des hérésies.

LA MARÉCHAle.

Maintenant, voyons quel jour monsieur Clé

ment pourra nous donner pour une nouvelle lecture.

LA COMTESSE.

Il ne s'étonnera pas, j'espère, que l'on soit insatiable à cet égard.

M. CLÉMENT.

De tels encouragemens me feront certainement terminer ce long et pénible ouvrage.

LE COMTE.

Vous rendrez un grand service à la religion, à la littérature et à la morale.

M. CLÉMENT.

C'est bien mon intention et mon espoir. Cet ouvrage peut sans doute être fort médiocre; mais je suis sûr, du moins, de son impartialité, et que toutes ses citations sont de la plus scrupuleuse exactitude.

LE CHEVALIER.

Les lecteurs, aujourd'hui, ne s'embarrassent guère de l'exactitude; ils se gardent bien de perdre du temps à vérifier des citations, et ils trouvent de la partialité dans tout ce qui contrarie leur opinion.

M. CLÉMENT.

Je sais très bien que nos astucieux philosophes, eux et leurs disciples, parviendront toujours, pendant bien long-temps, à étouffer les ouvrages qui les dévoilent; mais, comme le disait tout à l'heure monsieur le comte, nos écrits réunis un jour finiront par les dé

masquer.

LE CHEVALIER.

En attendant, on aura beau brûler leurs productions, quoiqu'elles ne soient pas un phénix, elles renaîtront pendant un siècle de leurs cendres.

LE COMTE.

Voilà une triste prédiction.

M. CLÉMENT.

Elle le sera plus encore pour nos neveux; le mal augmente toujours en se prolongeant.

LA MARECHALE.

Prenons donc un jour. Voulez-vous lundi ?

M. CLÉMENT.

Le choix de madame la maréchale me conviendra toujours.

LA COMTESSE.

Eh bien donc, à lundi.

TOUS, à la fois.

A lundi, à lundi.

FIN DU QUATRIÈME SOUPER.

CINQUIÈME SOUPER.

La maréchale, la duchesse de Lauzun, la princesse de P... *, la comtesse de Boufflers, le comte de Sérent, le prince de Beauvau, le chevalier de Boufflers, M. Clément.

LA MARECHALE.

Puisque vous voilà tous rassemblés, M. Clément, j'espère, va continuer son intéressante lecture.

M. CLÉMENT.

Je suis aux ordres de ces dames.

LA MARECHALE.

Madame d'Egmont et le chevalier de Chastelux n'ont pu venir; ils m'ont chargée d'expri

* On ne nomme point cette charmante personne, l'une des plus aimables et des plus spirituelles du siècle dernier, parce qu'elle existe.

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