A MADAME DE MONTESPAN (1) L'apologue est un don qui vient des immortels; Nous devons tous tant que nous sommes Le sage par qui fut ce bel art inventé. C'est proprement un charme (2): il rend l'âme attentive, Qui mènent à son gré les cœurs et les esprits. Le temps, qui détruit tout, respectant votre appui, (1) Françoise-Athénaïs de Rochechouart de Mortemart, marquise de Montespan, née en 1641, morte en 1707. (2) Cui, c'en est un sans doute; mais on ne l'éprouve qu'en lisant la Fontaine, et c'est à lui que le charme a commencé. » (Chamfort.) Tout auteur qui voudra vivre encore après lui (1) Doit s'acquérir votre suffrage. C'est de vous que mes vers attendent tout leur prix. Dont vous ne connaissiez jusques aux moindres traces. Mais il faut réserver à d'autres cet emploi; Olympe, c'est assez qu'à mon dernier ouvrage Par qui j'ose espérer une seconde vie; Sous vos seuls auspices ces vers Dignes des yeux de l'univers. Je ne mérite pas une faveur si grande; Vous savez quel crédit ce mensonge a sur nous. (1) C'est-à-dire après lui-même, se survivre. (2) Que vous, si ce n'est vous. (3) Louis XIV. Un mal qui répand la terreur, Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés: (1) Début pompeux et bien gradué, où la peste nous effraie avant d'être nommée. (2) Belle image empruntée au commencement de l'OEdipeRoi de Sophocle: « Le noir Pluton s'enrichit de nos pleurs et de nos gémissements. » A chercher le soutien d'une mourante vie; Plus d'amour, partant (2) plus de joie. Pour nos péchés cette infortune. Se sacrifie aux traits du céleste courroux; Ne nous flattons donc point; voyons sans indulgence Pour moi, satisfaisant mes appétits gloutons, Que m'avaient-ils fait? Nulle offense; Je me dévouerai donc, s'il le faut; mais je pense Sire, dit le renard, vous êtes trop bon roi, Et quant au berger, l'on peut dire Etant de ces gens-là qui sur les animaux (1) Détails d'une touchante mélancolie; Virgile en a fourni l'idée, mais la Fontaine a peut-être surpassé son modèle. (2) Par conséquent. Mais partant ne peut se remplacer. (3) «Il semblerait par ce petit vers que le lion voudrait escamoter son péché. (Chamfort.) Au reste, toute sa confession est empreinte de la plus habile hypocrisie. « C'est un piége qu'il tend aux consciences pures mais timides, et dans lequel l'âne tombera, » (Ch. Nodier.) D Ainsi dit le renard; et flatteurs d'applaudir. Du tigre, ni de l'ours, ní des autres puissances, Tous les gens querelleurs, jusqu'aux simples mâtins, La faim, l'occasion, l'herbe tendre, et, je pense, Je tondis de ce pré la largeur de ma langue (1). Un loup quelque peu clerc (3) prouva par sa harangue Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout le mal. D'expier son forfait. On le lui fit bien voir. Selon que vous serez puissant ou misérable, (1) Toutes les circonstances de la confession de l'âne seraient propres à atténuer ses torts devant un juge impartial et désintéressé; mais sa perte est résolue d'avance. (2) Cri qu'on poussait en Normandie en poursuivant les malfaiteurs. (3) Savant. (4) Cour de justice. a (5) On peut dire avec Chamfort que c'est ici le plus beau des apologues de la Fontaine et de tous les apologues. » |