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devons-nous jeter un coup d'œil sur le système du naturisme en Allemagne.

Le besoin de la philosophie séparée de la foi, était donc de reprendre la science dans sa totalité, afin de revenir au point nécessaire pour retrouver une relation entre les principes et les devoirs. A la suite des ravages de la réforme, dont les conséquences brisèrent tous les liens entre la science humaine et la théologie, le premier effort, après les dogmatistes Leibnitz et Wolf, est celui de Kant. Il a constitué une sorte de science, ayant pour but de vérifier rigoureusement : 1o la possibilité des connaissances; 2° leur fondement; 3o leur usage, avec la prétention de concilier l'apostériorisme, l'apriorisme, et le scepticisme. Il commence par voir ce que c'est que la sagesse ou la science, et il la distingue de la connaissance. La sagesse est le but le plus élevé de la raison.

La raison doit être distinguée en raison théorétique et raison pratique.

La raison théorétique ne peut que faire servir nos idées à régulariser nos connaissances; elle est fondée sur la notion de la nature.

La raison pratique est chargée de déterminer notre libre arbitre conformément aux idées de devoir et de droit. Elle est fondée sur la liberté.

Nos connaissances doivent être distinguées en connaissances réelles et en connaissances empiriques ( à posteriori).

Ces deux classes de connaissances forment deux sphères tout à fait distinctes, mais entre lesquelles intervient la faculté de juger.

Suivant Spix, Kant, distinguant le noumène (noumenon, monde réel des choses en elles-mêmes) du phé

nomène, a seulement contemplé celui-ci comme objet de la connaissance humaine.

Les sciences de la première catégorie ont pour caractère la nécessité et l'universalité. Elles comprennent la philosophie et les mathématiques. Elles sont ellesmêmes de deux sortes, synthétiques et analytiques.

Les connaissances synthétiques à priori constituent la forme de la connaissance. Elles ne peuvent être fondées que sur les lois de l'individu, et sur la connaissance qu'il a de l'harmonie de ses facultés.

La faculté de connaître théorétique, spéculative, consiste dans la sensibilité (réceptivité) et l'entendement (spontanéité).

La sensibilité a deux sortes d'éléments, les uns matériels, les autres formels.

Les éléments matériels sont les sensations; les éléments formels sont l'espace et le temps, qui ne sont qu'en nous à priori.

par

la

L'entendement recueille les matériaux fournis sensibilité, pour en former des notions, des jugements. -Les lois en vertu desquelles il opère sont les quatre catégories.

Les formes de la sensibilité et de l'entendement sont tout ce qui détermine la connaissance, en s'appliquant à la matière fournie par l'expérience.

Notre connaissance en fait d'objets réels se réduit à l'expérience. Toutefois nous ne connaissons aucune chose en soi, mais seulement des phénomènes de l'esprit humain1. Une connaissance réelle en vertu d'idées n'est pas possible, les idées n'ayant pas de terme correspondant pour nous dans le domaine de l'expérience. Il est donc impossible à la raison théorétique de dé⚫ C'est la base de l'idéalisme transcendental.

montrer la réalité ou l'existence des objets suprasensibles ou métaphysiques, non plus que les idées de l'existence de Dieu, de l'immortalité de l'âme, de la liberté. Ces choses transcendentales sont placées en dehors des limites de l'expérience et de la connaissance humaine, et sont seulement des objets de la foi.

Il affirme que la matière des représentations et des conceptions nous est fournie par l'impression des objets extérieurs, et, par conséquent, toutes les représentations, quant à cela, sont empiriques (à posteriori).

Mais que les formes de toutes les représentations et des conceptions (espace, temps, catégories) sont innées dans notre âme, et s'ajoutent, à son dire, à la matière puisée extérieurement pour produire la représentation. Sous ce rapport, toutes les représentations et conceptions sont indépendantes de l'empirisme, et sont à priori; et tous nos jugements, formés par l'un ou l'autre mode, sont synthétiques.

Donc toutes les fonctions de l'âme, sorties de la perception par les sens, remontent vers elle par la conception, le jugement, le raisonnement, la volonté et la foi 1; de telle sorte que Kant a pensé que tout dépend des formes de la sensibilité et de l'intelligence. Il pose ainsi une conception plus idéale de la composition, de la structure intime de la matière, en établissant que toute matière n'est diverse que par le degré de la force expansive et contractive.

Tel est le rapide exposé de la raison théorétique qui conduit directement à l'idéalisme, puisqu'il n'y a de réalité possible que dans les formes de la sensibilité et de l'intelligence.

'Ad illam conceptus, judicii, ratiocinii, volontatis ac fidei ascendere.

La raison pratique est autonome'; mais elle demande la liberté (libre arbitre) comme condition nécessaire. Elle se compose de connaissances pratiques, lesquelles déterminent pour nous, non ce qui est, mais ce qui doit être. La loi morale s'élève au-dessus du libre arbitre. C'est à la raison pratique que les idées de libre arbitre, d'immortalité, de Dieu, etc., doivent leur certitude; c'est une croyance, une foi attachée à la raison pratique.

Le souverain bien étant le but total de l'homme raisonnable, il s'ensuit l'harmonie de la nature sensible, de la nature rationnelle de l'homme, c'est-à-dire, l'accord de la raison théorétique et pratique.

La loi morale se distingue de la loi judaïque en ce qu'elle règle les actes intérieurs, tandis que celle-ci ne règle que les extérieurs.

La moralité n'est pas le bonheur; mais elle rend digne d'être heureux.

Le propre de Kant est donc la distinction de la connaissance et de la science. Il n'a fait entrer dans son système que l'histoire naturelle de l'homme; il passe sous silence l'étude des corps naturels; c'est pourquoi Fichte et Schelling lui ont reproché qu'il n'y avait pas de lien dans son système.

Cependant Kant a créé une sorte de science, à l'aide de laquelle on jugerait les connaissances humaines; de là, la raison théorétique et la raison pratique, entre lesquelles s'interpose le jugement.

Sa division des sciences est toujours: 1° aiguiser ou connaître l'instrument; 2° l'appliquer à la connaissance de la nature; 3° enfin, en déduire les devoirs. — Les

Sa propre loi.

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connaissances synthétiques ne peuvent être fondées que sur les facultés de l'intelligence et sur la conscience de leur harmonie. - La faculté de connaître, théorétique spéculative, consiste dans la sensibilité nommée réceptivité, et dans l'entendement, qui est la spontanéité. Par là Kant rentre évidemment dans la théorie de Locke et de Condillac, qui font tout sortir des sens. -L'entendement recueille les éléments fournis par les facultés pour en former des notions et des jugements, par les lois qui sont les catégories, à peu près analogues à celles d'Aristote. Ici Kant va sortir du positif. Les formes de la sensibilité et de l'entendement sont tout ce qui détermine la connaissance; toutefois nous ne connaissons aucune chose en soi, mais seulement des phénomènes. Là nous entrons dans l'idéalisme.

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Mais arrivés à la raison pratique, Kant nous conduit à la loi morale et au libre arbitre. Une fois qu'on est entré dans ces deux parties de sa philosophie, on y est véritablement à l'aise ; mais le lien manque, et il ne veut pas l'établir. En résultat, nous avons le perfectionnement de l'art de la connaissance distincte de la science et s'exerçant sur elle.

Voilà le point où Kant avait laissé la philosophie. Partant de cette doctrine que nous ne connaissons rien en soi, Fichte va établir le pur idéalisme, et nous conduire dans ce qu'il appelle la philosophie transcendentale.

FICHTE. Théorie ou doctrine de la science. Fichte a poussé le système de Kant comme Spinosa celui de Descartes.

Pour lui, la science est un système de connaissances déterminées par un principe supérieur, lequel exprime la valeur et la forme de notre savoir.

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