Le Coche et la Mouche. DANS un chemin montant, sablonneux, malaisé, Six forts chevaux tiraient un coche. Femmes, moine, vieillards, tout était descendu. Une mouche survient, et des chevaux s'approche, S'assied sur le timon, sur le nez du cocher. Et qu'elle voit les gens marcher, Elle s'en attribue uniquement la gloire, La mouche, en ce commun besoin, Se plaint qu'elle agit seule, et qu'elle a tout le soin, Qu'aucun n'aide aux chevaux à se tirer d'affaire. Le moine disait son bréviaire : Il prenait bien son temps! Une femme chantait: Après bien du travail, le coche arrive au haut. Ils font partout les nécessaires, Et, partout importuns, devraient être chassés. Le Rat retiré du Monde. LES Levantins en leur légende Disent qu'un certain rat, las des soins d'ici-bas, La solitude était profonde, S'étendant partout à la ronde. Notre ermite nouveau subsistait là dedans Qu'en peu de jours il eut au fond de l'ermitage Un jour, au dévot personnage S'en vinrent demander quelque aumône légère: Chercher quelque secours contre le peuple chat; On les avait contraints de partir sans argent, De la république attaquée. Ils demandaient fort peu, certains que le secours Serait prêt dans quatre ou cinq jours. "Mes amis," dit le solitaire, "Les choses d'ici-bas ne me regardent plus: En quoi peut un pauvre reclus Vous assister? que peut-il faire, Que de prier le Ciel qu'il vous aide en ceci? Le nouveau saint ferma sa porte. Qui désigné-je, à votre avis, Un moine? Non, mais un dervis : L'Aveugle et le Paralytique. AIDONS-NOUS mutuellement; La charge des malheurs en sera plus légère; Pour le mal que l'on souffre est un soulagement. Dans une ville de l'Asie Il existait deux malheureux, L'un perclus, l'autre aveugle, et pauvres tous les deux : Ils ne pouvaient mourir. Notre paralytique, Etait sans guide, sans soutien, Que l'aveugle, à tâtons, au détour d'une rue, Il entendit ses cris, son âme en fut émue. Pour se plaindre les uns les autres. "J'ai mes maux," lui dit-il, "et vous avez les vôtres : Unissons-les, mon frère, ils seront moins affreux. "Hélas!" dit le perclus, "vous ignorez, mon frère, Que je ne puis faire un seul pas; Vous même vous n'y voyez pas : A quoi nous servirait d'unir notre misère?" "A quoi?" répond l'aveugle, " écoutez: à nous deux Nous possédons le bien à chacun nécessaire: J'ai des jambes et vous des yeux; Moi, je vais vous porter; vous, vous serez mon guide; Mes jambes, à leur tour, iront où vous voudrez. Qui de nous deux remplit le plus utile emploi, L'Amour mouillé. J'ÉTAIS couché mollement, Repartit-il; "car il faut Qu'auparavant je m'essuie. N'a point gâté quelque peu Et de l'enfant prends les doigts, Prend un trait, un trait vainqueur Et de l'Amour; c'est mon nom. MAIS de Diane au ciel l'astre vient de paraître. Qu'il luit paisiblement sur ce séjour champêtre ! |