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On tolère même de nos jours cette petite négligence au théâtre, parce qu'elle y est moins remarquable.

FABLE III, page 3.

Cette petite fable est charmante par la vérité de la peinture, pour le dialogue des deux grenouilles, et pour l'expression élégante qui s'y trouve.

Plusieurs gens de goût blåment La Fontaine d'avoir mis la morale, ou à la fin, ou au commencement de chaque fable; chaque fable, disent-ils, contient sa morale dans elle-même : sévérité qui nous aurait fait perdre bien des vers charmans.

FABLE IV, page 4.

V. 5. Relevé. Mauvaise rime qu'on appelle suffisante; La Fontaine pouvait mettre, d'un pas dégagé.

V. 6. Et faisait sonner sa sonnette. Est un vers heureux et d'harmonie imitative, qui s'est trouvé sous la plume de l'auteur.

La Fontaine ne manque pas, du moins autant qu'il le peut, l'occasion de mettre la morale de son Apologue dans la bouche d'un de ses acteurs. Cette fable des deux mulets est d'une application bien fréquente.

V. 2. Celui-ci glorieux d'une charge si belle,
N'eut voulu pour beaucoup en être soulagé.

Ce mulet-là fait songer à bien d'honnêtes gens.

FABLE V, page 5.

Cette fable du loup et du chien est parfaite d'un bout à l'autre : il n'y a à critiquer que l'avant-dernier vers:

Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.

Un loup n'a que faire de trésor.

FABLE VI, page 6.

Voilà certainement une mauvaise fable que La Fontaine a mise en vers d'après Phèdre. L'association de ces quatre personnages est absurde et contre nature. Quel besoin le lion a-t-il d'eux pour chasser? Ils sont eux-mêmes le gibier qu'il cherche. Si Phèdre a

voulu faire voir qu'une association avec plus fort que soi est souvent dangereuse; il y avait une grande quantité d'images ou d'allégories qui auraient rendu cette vérité sensible. Voyez la fable du Pot de terre et du Pot de fer.

FABLE VII, page 7.

La Fontaine, pour nous dédommager d'avoir fait une fable aussi mauvaise que l'est la précédente, lui fait succéder un apologue excellent, où il développe avec finesse et avec force, le jeu de l'amour- -propre de toutes les espèces d'animaux, c'est-à-dire de l'homme, dont l'espèce réunit tous les genres d'amour-propre. On ne finirait pas si l'on voulait noter tous les vers heureux de cette fable.

V. 23. Dame fourmi trouva le ciron trop petit.

V. 28. Linx envers nos pareils et taupes envers nous. Et les deux derniers vers.

C'est donc la faute de Jupiter, si nous ne nous appercevons pas de nos propres défauts. Esope, que Phèdre a gâté en l'imitant, dit, et beaucoup mieux, chaque homme naît avec deux besaces, etc. De cette manière, la faute n'est point rejetée spécialement sur le fabricateur souverain. La Fontaine aurait mieux fait d'imiter Esope que Phèdre en cette occasion.

FABLE VIII, page 9.

Autre Apologue, excellent d'un bout à l'autre.

FABLE IX, page 21.

V. 27. Fi. Espèce d'interjection qu'on n'emploie que proverbialement et dans le style très-familier.

FABLE X, page 22.

Cette fable est connue de tout le monde, même de ceux qui ne connaissent que celle-là. Ce qui en fait la beauté, c'est la vérité du dialogue. Plusieurs personnes ne semblent voir dans cet Apologue qu'une vérité triviale, que le faible est opprimé par le 'fort. Ce ne serait pas la peine de faire une fable. Ce qui fait la beauté de celle-ci,

c'est la prétention du loup qui veut avoir raison dans son injustice, et qui ne supprime tout prétexte et tout raisonnement, que lorsqu'il est réduit à l'absurde par les réponses de l'agneau.

V. 19 et 20. Si je n'étais pas né ne rime pas avec l'an passé. Pure négligence.

FABLE X I, page 13.

Ce n'est point là une fable, quoi qu'en dise La Fontaine. C'est un compliment en vers adressé à M. le Duc de la Rochefoucault sur son livre des Maximes. Un homme qui s'enfuit dans le désert pour éviter des miroirs : c'est là une idée assez bizarre, et une invention assez médiocre de La Fontaine.

V. 21. On voit bien où je veux venir.

On le voit à travers un nuage; cela est si vrai, que La Fontaine est obligé d'expliquer son idée toute entière, et de dire enfin :

Et quant au canal, c'est celui

Que chacun sait; le livre des Maximes.

Cela rappelle un peu le peintre qui mettait au bas de ses figures, d'un coq, par exemple, ceci est un coq.

FABLE XII, page 15.

La plupart des fables et des contes ont fait le tour du globe. La Fontaine met en Europe la scène où il suppose que fut fait le récit de cette aventure, récit que les Orientaux mettent dans la bouche du fameux Gengiskan, à l'occasion du Grand Mogol, prince qui dépendait en quelque sorte de ses grands vassaux. Au surplus, ce récit ne peut pas s'appeler une fable; c'est une petite histoire allégorique qui conduit à une vérité morale. Toute fable suppose une action.

FABLE XIII, page 16.

V. 10. Au lieu de deux, etc. Voilà deux traits de naturel qu'on ne trouve guère que dans La Fontaine, et qui charment par leur simplicité.

V. 12. De nul d'eux. Transposition que de nos jours on trouverait un peu forcée, mais qui se pardonnait alors dans le style familier.

V. 13. Un quart, un quatrième.

Un quart voleur survient, etc. Voilà les conquérans appelés voleurs, c'est-à-dire par leur nom. Nous sommes bien loin de l'Epître dédicatoire, et de ce roi qui comptera ses jours par ses conquêtes.

FABLE XIV, page 27.

Encore de la mauvaise morale on peut trop louer sa maîtresse, et tout éloge qui n'a pas l'air d'échapper à un sentiment vrai, ou d'être une galanterie aimable d'un esprit facile, déplaît souvent même à celle qui en est l'objet. On peut trop louer son roi, 1.° Quand on le loue et qu'il est blàmable; 2.° quand on le loue démesurément pour une bagatelle, etc.

V. 4. Ce sont maximes toujours bonnes. Au contraire presque toujours mauvaises.

Castor et Pollux ne font pas un beau rôle dans cette fable. Quel mal avaient fait ces pauvres conviés et ces échansons? Cela dut faire grand plaisir à ce Simonide qui était fort avare.

Un jour un athlète qui avait remporté le prix aux courses de mules, lui offrit une somme d'argent pour chanter sa victoire. Simonide mécontent de la somme répondit: Moi, faire des vers pour des animaux qui sont des demi-baudets! Le vainqueur tripla la somme offerte. Alors Simonide fit une pièce très-pompeuse qui commence par des vers dont voici le sens : « Nobles filles des coursiers qui » devancent les aquilons. »

Le même Simonide fut avec Anacréon à la cour d'Hipparque, fils de Pisistrate. Le dernier ne voulut que des honneurs, il fallut des présens au premier.

V. 64. Melpomène. Tout cela signifie qu'un poëte peut tirer quelqu'avantage de ses travaux.

FABLE XVII, page 22.

V. 4 et 5. Il avait du comptant,

Et partant.

Ce vers de six syllabes, suivi d'un autre de trois, si l'on peut appeler ce dernier un vers, ne me semble qu'une négligence et non une beauté. Quand cette hardiesse sera beauté, je ne manquerai pas de l'observer.

A proprement parler, cette pièce n'est pas exactement une fable,

qui

c'est un récit allégorique; mais il est si joli et rend si sensible la vérité morale dont il s'agit, qu'il ne faut pas se rendre difficile.

FABLE XVIII, page 23.

V. 4. Besogne, (autrefois besongne) n'est pas le mot propre ; mais à cela près la fable est charmante d'un bout à l'autre. Elle me rappelle le trait d'un riche particulier qui avait fait diner ensemble un antiquaire, qui hors de là ne savait rien, et un physicien célèbre, dénué de toute espèce d'érudition. Ces deux messieurs ne surent que se dire. Sur quoi on observa que le maître de la maison leur avait fait faire le repas du renard et de la cigogne.

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Dans ce récit, La Fontaine pouvait se dispenser d'annoncer son dessein. Cela diminue la curiosité, d'autant plus qu'il y revient à la fin de la fable, et même d'une manière trop longue et peu piquante.

FABLE X X, page 25.

Ces deux petits faits, mis ainsi à côté l'un de l'autre, racontés dans le même nombre de vers et dans la même mesure, font un effet très-piquant. Les six derniers vers ne sont que l'explication des six premiers, mais le commentaire plaît autant que le texte.

V. 3. Le beau premier, le fin premier, mots reçus dans l'ancien style pour dire simplement le premier. On le disait encore de nos jours dans le style familier.

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V. 7. Les témoins déposaient; Cette formule de nos tribunaux est plaisante elle nous transporte au milieu de la société. C'est le charme et le secret de La Fontaine ; il nous montre ainsi, qu'en parlant des animaux, il ne nous perd pas de vue un seul instant.

V. 31. Plut-à-Dieu, etc. Tous les procès ne sont pas de nature à être jugés ainsi; et quant à la méthode des Turcs, Dieu nous en préserve. La voici le juge, appelé Cadi, prend une connaissance succincte de l'affaire, fait donner la bastonnadeià celui qui lui paraît avoir tort, et ce tort se réduit souvent à n'avoir pas donné de l'argent au juge comme a fait son adversaire : puis il renvoie les deux parties.

T. 3.

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