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coupure extérieure, il y a contusion, c'est-à-dire que les parties situées sous la peau sont plus ou moins atteintes. Les vaisseaux se rompent et le sang s'en échappe pour se répandre en nappe profonde, ce qui constitue l'ecchymose appelée vulgairement le bleu, qui, à mesure que la résorption s'opère, devient violet et jaune. Les contusions ont été divisées en plusieurs classes selon leur importance. La 1ère classe comprend les contusions dans lesquelles les petits vaisseaux seulement sont rompus: simple coloration sous la peau. La 2e classe, celles où les vaisseaux plus importants sont détruits et où, par conséquent, l'épanchement du sang est plus considérable: gonflement sous la peau. La 3e classe, celles où les tissus profonds sont broyés déformation des parties. La 4e classe, celles où toute la région, os et parties molles, est détruite.

Ce qui doit préoccuper dans le traitement de la contusion, c'est de favoriser la résolution où dissolution du sang épanché, sous peine de voir ce sang se convertir en pus, ou devenir dans les organes, où il a été accumulé accidentellement, la cause des désordres inflammatoires les plus graves.

Si la région contuse est située profondément, comme le foie ou le poumon, par exemple, il sera sage d'appliquer des sangsues ou des ventouses scarifiées et, autant que possible, aussitôt après l'accident.

La même pratique sera indiquée si l'épanchement de sang occasionné par la contusion sur toute autre partie du corps, occupe un espace considérable.

Dans les contusions moins graves, on aura recours à l'application de compresses imbibées d'un liquide résolutif; alcool camphré, teinture d'arnica.

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On peut ajouter à ce mélange 5 grammas de laudanum. On entourera ces compresses d'une bande roulée, légèrement serrée, la compression devant favoriser la résorption du sang épanché.

Quel que soit le liquide employé pour mouiller les linges du pansement, il faut veiller à ce que ces linges soient toujours humides, sous peine de voir la douleur devenir intolérable. Aussi est-il d'usage d'envelopper tout l'appareil d'un morceau de taffetas gommé ou de toile vulcanisée.

Dr CARRET.

BIBLIOGRAPHIE

Sciences.

LE LIVRE DES MÉTIERS MANUELS. Répertoire des procédés industriels, tours de main et ficelles d'atelier, par J.-P. Houzé. In-12, chez Hetzel & Cie, Paris, 4 fr.

Cet ouvrage prend place dans l'excellente Bibliothèque des pro fessions industrielles, commerciales et agricoles: il renferme les notions essentielles des arts manuels: c'est un guide sérieux, pratique, rédigé de

telle sorte que l'ouvrier des petites villes et des campagnes, que l'amateur qui emploie ses loisirs à travailler de ses mains sans fréquenter les ateliers, puissent être initiés aux découvertes del'industrie et aux procédés des ateliers et des manufactures des grandes villes. Comme les procédés de l'industrie ne sont que l'application des principes de la science, M. Houzé a sagement fait précéder les renseignements techniques de notions scientifiques succintes et claires, qui permettent au lecteur d'apercevoir au moins la raison d'être des procédés préconisés. Cinq planches hors texte comprenant un certain nombre de figures d'outils ou de constructions géométriques ou mécaniques aident à l'intelligence du texte.

L'éducation bourgeoise laisse trop à l'écart les connaissances usuelles; nous l'avons maintes fois regretté, en constatant l'impuissance des jeunes gens, intelligents et bien instruits du reste, en face de la moindre difficulté de travail manuel. Combien est-il de jeunes gens qui puissent seulement démonter et replacer une serrure? Combien qui sachent distinguer dans une charpente d'un chevron l'arêtier? Et pourtant de quelle utilité ne serait-il pas de les initier en passant, à l'occasion, sans les condamner à en faire une étude spéciale, aux notions élémentaires du cubage des bois, par exemple, des termes techniques employés dans la construction; et puisque la mode est aux bains de mer, de profiter du séjour sur la plage pour leur apprendre les premiers principes du droit maritime, de la construction navale, etc.

Dans ce but nous recommandons, dans cette Bibliothèque des professions industrielles, commerciales et agricoles, le Guide pratique du constructeur, de Pernot, refondu par Camille Tronquon et Ch. Baye; le Guide thoérique et pratique du cubage des bois, par Louis Frochot, le Livre de poche du charpentier, par Merly, les Notions pratiques de droit maritime, par Alf. Doneaud; le Guide pratique d'architecture navale, par Gustave Bousquet; et aussi, l'ouvrage intéressant et instructif de Viollet-le-Duc, Comment on construit une maison, si rempli de sages conseils et d'utiles aperçus, encore que la maison que construit le jeune Paul sous la direction de son grand cousin soit déjà assez peu ordinaire, puisqu'il ne s'agit de rien moins que d'une résidence de campagne évaluée deux cent mille francs. Mais les principes fondamentaux sont aussi bons et efficaces s'il est question d'une moindre construction.

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CARNET D'UN CURIEUX

Un livre de prières tissé'en soie.

Il y a quelques années, Egger, le savant helléniste de l'Institut, contait à l'un de ses anciens élèves de l'Ecole normale, M. Heinrich, alors doyen de la Faculté des lettres à Lyon, qu'il écrivait un ouvrage intitulé le Livre, c'est-à-dire une étude sur les divers systèmes par lesquels l'homme a fixé et transmis sa pensée. Le doyen lui répondit que sûrement il pourrait lui citer un livre fait par un procédé qu'il ne connaissait pas ; et, pour appuyer son dire, lui annonça qu'il venait de se produire à Lyon un vrai livre non imprimé, mais avec des caractères tissés dans la soie. Egger s'informa, et, dans un rapport communiqué

à l'Institut, dit qu'un disciple de Jacquard (ce fut son expression), M. J. A. Henry, fabricant à Lyon, venait d'inventer le livre tissé en soie, c'est-à-dire le livre aux caractères inaltérables, dont la matière pourrait défier le temps par sa solidité. Ce livre était le poème des laboureurs de Lamartine. C'était une recherche de tissage dont les rares exemplaires n'ont jamais été dans le commerce. L'un deux est à la Bibliothèque nationale; un autre, plus riche, édition unique, fut commandé tout spécialement et sous condition qu'il n'en serait plus tissé d'autres, pour être offert au comte de Paris.

que

L'ouvrage actuel dont le premier exemplaire a été offert à Sa Sainteté Léon XIII, le Livre de prières, est le résultat des précédentes recherches et peut être considéré comme le prototype du livre tissé. Nous savons que celui qui l'a fait n'a pas eu la prétention de faire mieux ses prédécesseurs, auteurs de tableaux tisses, tels que le Testament de Louis XIV. par Maisiat, le Jacquard de Bonnefond, par Didier Petit, une Vierge de Raphaël par Furnion, l'Appel à la civilisation, par Verzier, le magnifique portrait de Washington, par Mathevon et Bouvard, et celui de Humboldt, par Lamy et Giraud. Il a voulu faire autre chose et nous ne voulons nous-même établir aucune comparaison. Dans le livre tissé, en effet, neuve est l'idée, nouvelle est la manière.

Le plus précieux des concours fut acquis à M. J.-A. Henry, celui d'un artiste aussi distingué que modeste, ie R. P. Hervier, de la Société de Marie; c'est lui qui, à titre gracieux, s'est plu à faire le choix des prières et à dessiner ensuite d'une main savante, délicate, ingénieuse, les pages toutes différentes dans les styles gothiques du XIVe au XVIe siècle. M. Roux, libraire-éditeur bien connu, vint joindre sa compétence spéciale, sa collaboration effective dans les frais, et se charger d'être l'intermédiaire auprès du public. Ce fut avec une joyeuse ardeur que M.J-A. Henry entreprit le tissage des charmants desseins du R. P. Hervier. Les feuillets du livre sont tissés avec les plus belles soies cénevoles de la marque privilégiée de l'Argentière de MM. Palluat et Testenoire. L'armure qui sert de fond est un satin si serré qu'il prend l'aspect d'une armure particulière. Contrairement à ce qui s'est fait jusqu'à ce jour, le livre présente la chaîne horizontalement, tandis que la trame produit les caractères dans le sens vertical. Les mouvements de mécanisme sont d'un dixième de millimètre. Une des grandes difficultés vaincues est celle de la finesse du tissu, qui compte 400 passées de trame ; mais tout se réalise avec l'ouvrier de Lyon auquel on peut tout demander, avec lequel on peut tout oser.

Le R. P. Hervier, M. Henry et M. Roux ont désiré que le premier exemplaire de cet ouvrage, unique en son genre, fut déposé aux pieds de Sa Sainteté Léon XIII pendant ses fêtes jubilaires. Sa Grandeur Mgr l'archevêque de Lyon a bien voulu leur témoigner l'intérêt qu'il prenait à cette œuvre, en se chargeant de la présenter; et ils ont eu la joie d'apprendre que le Saint-Père a parcouru le Livre de prières page à page et a déclaré se le réserver après l'Exposition pour sa bibliothèque particulière. C'est la plus belle récompense que les auteurs aient pu souhaiter pour cet ouvrage d'un petit volume, il est vrai, mais fruit de beaucoup d'études, de dépenses et de labeur.

CH. COMTE.

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La thèse que M. l'abbé Lebarq, professeur (1) au petit séminaire de Rouen, vient de présenter et de soutenir en Sorbonne, pour obtenir le grade de docteur ès-lettres, a fait faire un pas décisif, et, peut-être définitif à la critique des sermons de Bossuet et à la constitution de leur texte. Je voudrais d'abord signaler les principaux mérites du beau livre de M. Lebarq, et en profiter pour redire, à ma façon, ce que chacun sait du génie oratoire de Bossuet.

I

La révélation de l'insuffisance en matière de critique, quand il s'agit de nos grands écrivains français, fut faite par Cousin, à l'occasion des Pensées de Pascal. Sous sa direction, l'abbé Vaillant essaya, en 1851, l'histoire du texte des sermons de Bossuet, qui, après sa mort trop tôt arrivée, fut continuée par M. Floquet, par Gandar, et reprise de de nos jours, par MM. Lachat, Gazier et Brunetière. Cette histoire est curieuse. De son vivant, Bossuet n'avait fait imprimer que les six grandes Oraisons funèbres et le sermon sur "l'Unité de l'Eglise; il désa-. voua l'édition qu'on publia de la vêture de Mlle de La Vallière. Bossuet mort, les manuscrits de ses sermons passèrent aux mains de son neveu, l'évêque de Troyes, qui se garda bien de les publier. Il s'en servait pour lui-même ; il les prêtait à ses amis, aux prêtres de son diocèse.

Ce ne fut que dans l'édition de 1767 que parurent, pour la première fois, les Sermons ; préparée par l'abbé Pérau, cette édition fut continuée par l'abbé Leroi. Dans la lourde charge de donner à la France le monument digne de Bossuet qu'elle attendait, il avait eu pour successeur l'abbé Lequeux, qui mourut trop tôt pour mener à bonne fin la tâche qu'il avait entreprise. Elle passa aux mains des Bénédictins des Blancs-Manteaux, dont le plus renommé fut dom Déforis. Il s'adjoignit pour collaborateur l'abbé Maury, qui fit un Bossuet corrigé à sa manière; le Maury était mêlé avec le Bossuet. La Révolution mit fin à ce coupage immoral où se noyait l'énergie native de notre Bossuet. Dom Déforis mourut sur l'échafaud: Maury, pendant ces temps malheureux, sut vivre et garder jusqu'à des temps meilleurs le fruit heureux d'une éloquence non vulgaire et les résultats d'une politique plus qu'habile. Les Sermons de Bossuet furent enfin publiés dans l'édition

(1) Histoire critique de la Prédication de Bossuet, d'après les manuscrits autographes et des documents inédits: Chez Desclée, De Brouwer et Cie, à Lille

dite de Versailles, et dans celle de M. Lachat. J'ai cité plus haut des travaux qui, depuis, ont été consacrés au texte et à la langue des Sermons de Bossuet.

Ce bilan était nécessaire pour se mieux rendre compte de la grande valeur du livre de M. Lebarq. Sans doute, il a mis à profit les recherches de ses prédécesseurs; mais il les surpasse, et les résultats qu'il apporte distancent de beaucoup leurs conclusions. Il a pu classer, en effet, et corriger, d'après les manuscrits les plus estimés, la précieuse collection des Sermons de Bossuet. Le portrait qu'il nous offre, aujour d'hui de Bossuet sermonnaire l'emporte donc sur tous les autres, par la loyauté de la transcription aussi bien que par l'étude approfondie du modèle. Dur labeur! Besogne délicate et angoissante! Si la Bibliothèque nationale, à Paris, s'enorgueillit, comme d'un de ses plus rares trésors, des Manuscrits de Bossuet, ne sait-on point à quelles difficultés se heurte et se meurtrit le lecteur qui veut avoir raison de l'écriture et même de l'orthographe de Bossuet? Que de ratures ! Que de surcharges! il faut choisir entre ces leçons nombreuses, celle qui traduit le plus exactement la pensée de Bossuet; il faut éliminer les variantes les plus plausibles, pour, en tenant compte de circonstances diverses qu'a traversées Bossuet, placer les sermons à telle époque plutôt qu'à telle autre, pour les attribuer à telle inspiration plutôt qu'à tel autre mouvement d'idées.

Mais M. Lebarq ne s'est point contenté des seuls manuscrits de la bibliothèque nationale; il a tenu à découvrir les autres qui subsistent. Multipliant les voyages et les démarches, il a compulsé ceux de Meaux, de Juilly, de Metz; il a eu entre les mains les papiers de M. Floquet. De sa laborieuse excursion il a rapporté une riche moisson de documents nouveaux grâce auxquels il a pu s'orienter dans son étude, avec des indications plus sûres et plus nettes.

"Tant de peines n'ont pas été perdues, dit, dans un excellent article du Monde, le savant professeur de l'Institut catholique, M. Ragon; en y mettant plus d'attention, M. Lebarq, en maint endroit, a mieux lu que les autres et restitué la vraie leçon de Bossuet; en tenant un compte plus exact des signes et des renseignements divers fournis par les manuscrits mêmes, il a pu réunir ce qu'on avait maladroitement séparé, rendre à leur vraie destination des morceaux indûment rapprochés et violemment amalgamés, assigner leur date précise à un grand nombre de compositions, et même retrouver plusieurs fragments inédits, dont quelques-uns ne sont pas sans importance.

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Rien de plus tristement curieux, en effet, que le chapitre deuxième de la première partie de l'ouvrage dont je parle M. Lebarq y a sigalé "les accidents " auxquels a été soumis le vrai texte de Bossuet; soutures inintelligentes de fragments qui appartiennent à des discours différents; interversions ridicules dans le placement de leurs parties; lectures arbitraires qui défigurent la pensée, parce que le manuscrit pas été assez consciencieusement suivi; tout autant d'altérations graves qui jettent leurs taches sur Bossuet et le déforment. Les exemples cités par M. Lebarq sont écrasants; mais comme on ne saurait trop le remercier de sa patiente investigation, le féliciter de son esprit critique, de son flair délicat qui dépiste une erreur avec tant de sagacité !

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