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« L'affliction sied aussi bien à Israël qu'une Rose rouge à un cheval blanc (1). »

Cette dernière phrase nous apprend que chez les Hébreux on était dans l'usage de parer les chevaux avec des Roses.

Dans les Métamorphoses d'Apulée, les Roses font le dénoûment de ce roman. L'auteur suppose que son héros, appelé Lucius, a été changé en âne, et qu'il doit recouvrer sa première forme lorsqu'il trouvera des Roses et qu'il pourra en manger. Après beaucoup de traverses, il rencontre heureusement des prêtres d'Isis qui vont faire un sacrifice, et dont le chef tient une couronne de Roses à la main; comme ce dernier a été averti en songe par la Déesse que ces fleurs doivent rendre à Lucius sa première forme, quand il l'aperçoit sous celle d'un animal, il lui présente sa couronne, que celui-ci s'empresse de saisir pour la dévorer, et, aussitôt qu'il l'a fait, il redevient homme.

Le Jardin des Roses de Saadi (2) ne répond pas du

(1) Buxtorf, Lexicon chaldaicum, talmudicum, et rabbinicum, au mot Rose.

(2) Ce célèbre poète persan étant tombé entre les mains des Francs, lorsqu'il se rendait en pèlerinage à Jérusalem, fut chargé de fers, conduit à Tripoli et confondu avec la foule des captifs qui travaillaient aux fortifications de cette ville. Un marchand d'Alep racheta Saadi de sa captivité, en payant aux chrétiens une somme de dix écus d'or, et lui en donna cent autres pour la dot de sa fille qu'il lui fit épouser. (Michaud, Histoire des Croisades, tom. III, pag. 357.)

tout à ce titre. Cet ouvrage se compose de huit chapitres qui contiennent une suite de fables, de contes, d'apologues et de maximes sur différents sujets. L'auteur, dans sa préface, fait seulement quelques allusions aux Roses, et il dit qu'en composant son livre sous le titre de Jardin des Roses son intention a été de faire un ouvrage de morale qui contînt les préceptes les plus utiles de la vie, et qu'en y répandant toutes les fleurs d'une érudition agréable, il a espéré, s'il a pu y réussir, que ces fleurs n'auraient à craindre ni l'inclémence des saisons, ni le souffle brûlant de l'été, ni les rigueurs de l'hiver, mais qu'elles feraient les délices des hommes studieux, et brilleraient d'un éclat toujours durable.

On trouve le trait suivant dans un des ouvrages du même poète : « Un jour, dit Saadi, je vis un Rosier environné d'une touffe de gazon. Quoi! m'écriai-je, cette vile plante est-elle faite pour se trouver dans la compagnie des Roses? Et je voulus arracher le gazon, lorsqu'il me dit humblement : «< Épargnez-moi, je ne suis pas Rose, il est vrai, mais à mon parfum on connaît au moins que j'ai vécu avec des Roses. » Ce qui enseigne, selon le poète, qu'il y a tout à gagner avec une compagnie choisie.

Le poème intitulé Roman de la Rose, publié dans le moyen âge, est un ouvrage galant, qui a été comparé à l'Art d'aimer d'Ovide. Les quatres vers qui suivent expliquent les motifs qui ont porté Guillaume de Loris à donner ce titre à son ouvrage :

« Celle pour qui je l'ai empris (entrepris)
C'est une dame de haut prix,

Et tant est digne d'être amée (aimée)

Qu'elle doit Rose être clamée (proclamée).»

Dans ce poème allégorique, la Rose que l'amant veut conquérir représente sa maîtresse.

CHAPITRE V.

Usages de la Rose chez les anciens dans les cérémonies dans les fêtes, etc.

La Rose, chez les anciens, brillait dans les pompes sacrées et dans les fêtes publiques et particulières. Les Grecs et les Romains entouraient de guirlandes de Roses les statues de Vénus, d'Hébé et de Flore. On prodiguait ces fleurs aux fêtes de cette dernière déesse. Dans celles de Junon à Argos, la statue de l'épouse du souverain des Dieux était couronnée de lis et de Roses. Dans les fêtes de l'hymen à Athènes, les jeunes gens des deux sexes couronnés de Roses, et parés de fleurs, formaient des danses qui avaient pour objet de peindre l'innocence des premiers temps.

A Rome, dans les réjouissances publiques, on jonchait quelquefois les rues de Roses et d'autres fleurs ; c'est ainsi que Lucrèce nous fait la description de la manière dont étaient célébrées les fêtes de Cybèle. « Aussi, dit ce poète (1), tandis que la statue muette

(1)

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Frgo cùm primùm, magnas invectá per urbes
Munificat tacita mortales mutâ salute;

Ære atque argento sternunt iter omne viarum.
Largificâ stipe ditantes, ninguntque Rosarum

Floribus, umbrantes matrem comitumque catervas.>>

(Lib. II, vers. 625.)

de la Déesse, portée à travers les grandes cités, répand en secret sur les mortels les effets de sa munificence, on verse à pleines mains sur son passage l'airain et l'argent, et l'on fait tomber une pluie de Roses sur l'image de la mère des Dieux et sur le cortège qui l'accompagne.»>

Répandre ainsi des fleurs sur le passage du convoi d'un citoyen était un honneur qui n'était pas ordinaire à Rome; mais Pline (1) nous apprend qu'un Scipion, qui appartenait à l'illustre famille de ce nom, et qui, pendant' son tribunat, en avait rempli les fonctions à la satisfaction du public, étant mort sans laisser de quoi faire les frais de ses funérailles, le peuple se cotisa pour subvenir à cette dépense, et qu'à l'aspect du corps chacun jetait des fleurs sur son passage.

A Baies (2), lorsqu'on donnait des fêtes sur l'eau, toute la surface du lac Lucrin paraissait couverte de Roses.

L'usage de se ceindre la tête, et de s'entourer le cou, et même la poitrine, de couronnes et de guirlandes de Roses en différentes circonstances, et particulièrement pendant les derniers actes d'un festin joyeux, lorsqu'après les mets solides on passait au dessert et aux vins rares, est bien connu par les odes d'Anacréon (3), et par

(1) Liv. XXI, chap. 3. (2) Seneca, Epist. LI. (3) Odes V et VI.

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