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les sentiments tendres; elle vient se placer, comme d'elle-même, dans toutes les images gracieuses; son nom seul fait naître dans les cœurs sensibles une foule d'idées riantes, en même temps qu'il éveille la sensation des plaisirs les plus délicieux et des plus douces jouissances.

Quant au nom de reine des fleurs, qui a été donné à la Rose depuis une époque presque immémoriale, il est bon de dire que cette dénomination s'applique particulèirement à la Rose cent-feuilles, celle qui entre toutes les autres espèces est la plus belle, la plus parfaite, et qui réunit, à elle seule et au plus haut degré, toutes les qualités dont ses congénères ne possèdent qu'une partie. Celle-ci brille au premier rang dans nos jardins, c'est là qu'il faut la voir dans tout son éclat; mais la modeste Rose sauvage, qu'on ne trouve que dans les lieux agrestes et déserts, embellit de même les solitudes où elle croît ses corolles d'une forme si régulière, d'une couleur si douce et si tendre, qui n'ont rien emprunté à l'art, réunissent dans leur simplicité naturelle un charme qui fait qu'elles plaisent encore à côté des plus jolies fleurs; et lorsque plus tard les champs sont dépouillés de leur verte parure, ses fruits d'un rouge corail qui couronnent les buissons présentent aussi un aspect fort agréable.

de

Les nations les plus nombreuses, les cités les plus vastes, les royaumes les plus riches ont disparu de la surface de la terre; les dynasties les plus puis

santes ont été englouties dans les révolutions et les bouleversements des empires survenus dans la suite des siècles, et une simple fleur a bravé tous les orages politiques; elle a vu cent générations se succéder; elle a vu les mortels inconstants changer les objets de leur culte, et briser les dieux qu'ils s'étaient faits; elle seule a traversé tous les âges sans voir changer son destin : les hommages qu'on lui rendait, l'amour qu'on lui portait sont toujours les mêmes; maintenant, comme aux temps les plus reculés, nous décernons à la Rose la première place dans l'empire de Flore; de nos jours comme dans ceux de l'antiquité, nous saluons la Rose du nom de reine des fleurs, parce qu'elle est toujours la plus belle, et qu'aucune autre ne peut nous offrir autant de charmes; à l'élégance, à la beauté des formes, elle réunit la fraîcheur et l'éclat des couleurs les plus agréables et, comme si la nature s'était plue à la combler en même temps de tous les dons les plus précieux, elle a joint à ses autres qualités brillantes un parfum enchanteur, qui seul eût suffi pour lui mériter une place distinguée parmi les autres vėgėtaux, quand bien même ses formes et ses couleurs n'eussent présenté rien de remarquable (1).

(1) En terminant l'Histoire de la Rose, j'éprouve le besoin de faire mes remerciments bien sincères et de témoigner toute ma reconnaissance à MM. Amyot, Bailly (Prosper), Barbier, Desnoyers, Dezeimeris, Dubeux, de L'Escalopier, Grangeret de La Grange, Julien (Stanislas), Lemercier, Pillon, et Reynaud, biblio

thécaires, conservateurs ou employés de la Bibliothèque royale, de celle de l'Arsenal, de l'École de médecine, du Muséum d'histoire naturelle et de la ville de Paris, qui tous ont bien voulu, non-seulement me faire part des riches dépôts qu'ils ont à leur disposition, mais dont plusieurs ont même eu l'obligeance de faire pour moi des recherches particulières qui m'ont servi à enrichir mon travail.

FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE.

DEUXIÈME PARTIE.

CHAPITRE PREMIER.

Culture des Roses chez les anciens.

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Le Rosier, dont les poètes de l'antiquité la plus reculée ont célébré les fleurs dans leurs chants, a sans doute été une des premières plantes dont les hommes aient voulu embellir les jardins qu'ils formèrent autour des nouvelles demeures qu'ils se construisirent, en quittant les campagnes pour les villes. Ce qu'il y a de certain, c'est que les auteurs les plus anciens qui ont écrit sur la culture, et dont les ouvrages sont parvenus jusqu'à nous, Théophraste chez les Grecs, Varron, Columelle, Palladius et Pline chez les Romains, ont tous traité de la culture. des Rosiers. Le dernier surtout, est celui chez lequel on trouve le plus de renseignements à ce sujet. Dans le vingtième livre de son Histoire naturelle, il a consacré aux Roses un chapitre entier (le quatrième), et il en parle encore çà et là dans quelques autres parties de son ouvrage; mais tout ce qu'il en

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