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Jusqu'à présent j'ai donné sur Deutz des renseignemens qui étaient à ma connaissance personnelle, ou qui m'avaient été fournis de Rome. Mais comme il a consommé sa trahison loin de moi et de mes amis, j'ai peu de chose à ajouter à ce que le public sait déjà relativement à ce drame de Nantes qui a mis Simon-Judas au pilori de l'histoire universelle.

Je ne m'occuperai donc dans ce dernier chapitre que du système que le traître a adopté dans son libelle pour excuser sa trahison, de quelques détails qui m'ont été communiqués par des témoins oculaires, et surtout des circonstances qui ont précédé son arrivée dans la Vendée. Des faits notoires, ses propres lettres et ses grossières contradictions, mettront encore ici à nu ses mensonges et ses perfidies.

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Afin d'écarter la grave accusation d'avoir vendu à prix d'argent à la police la duchesse de Berri, Deutz cherche à persuader à ses lecteurs, que sa trahison a été tout-à-fait désintéressée de sa part, qu'elle n'avait eu d'autre but que de servir la patrie en empéchant la guerre civile, qui était éteinte, et l'invasion EXTÉRIEURE, qui ne pouvait être dans les projets des souverains étrangers et aurait trouvé pour premier obstacle la duchesse de Berri, décidée en cas d'invasion, à faire de son corps un rempart à la France.

Mais, comme tous ceux qui mettent en avant de mauvaises raisons, Deutz multiplie trop les excuses. Il ne se contente pas du beau rôle qu'il se donne d'avoir rendu un service immense au pays, ou plutôt il sent lui-même que ce rôle ne lui va pas. Il assigne donc, en outre, d'autres motifs à sa

trahison.

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Sachez donc que Simon Deutz (dont les principes religieux et politiques, vrais caméléons, chan

gent de couleur selon l'intérêt du moment), est, à ce qu'il dit, ennemi du carlisme, dont il n'espère plus rien, et dévoué corps et âme au philipisme dont il espère quelque chose.

Ce n'est pas tout. Il ne suffit pas à notre sauveur de la patrie d'avoir agi selon ses convictions politiques, sa glorieuse expédition de Nantes avait encore, toujours selon lui, d'autres mobiles. Comme le loup de la Fable, il cherche querelle à la restauration, et notamment à la duchesse de Berri. Celle-ci aurait trempé dans le complot, dont elle n'a certainement pas eu connaissance, ayant eu pour objet d'enlever les enfans de M. Drach à la sœur de prédilection de Deutz, laquelle soeur de prédilection les avait soustraits traîtreusement à leur père, et n'a jamais voulu, la bonne mère ! ni les rejoindre, ni s'en occuper Quant à la restauration même, Deutz catholique a à lui reprocher ses terribles persécutions religieuses contre les juifs, et en particulier contre la famille Deutz. (Voy. le libelle, pag. 14). Et comme messire loup, il s'est écrié ::

...

Vous ne m'épargnez guère
Vous, vos bergers et vos chiens.
On me l'a dit: Il faut que je me venge!

Entrons en matière.

Il est avéré que jusqu'en 1833, partout où il a séjourné ou demeuré, Deutz s'était déclaré zélé

partisan de la légitimité. Nous verrons d'ailleurs dans les passages de ses lettres, que je vais transcrire, la même profession de foi politique. On a déjà vu dans le chapitre précédent, que dans les premiers momens de sa conversion il renonça à son projet de retourner à Paris immédiatement après son baptême, parce que le vent y était au libéralisme. Mais chez lui, dévotion religieuse, dévouement politique, attachement personnel, tout n'est que calcul, tout n'a qu'un but, celui de saisir les moyens de bien vivre sans travailler; car il n'a qu'un culte, n'encense qu'une idole : c'est son moi! Parens, amis, bienfaiteurs, ne lui sont plus rien du jour où il perd l'espérance d'en tirer du profit. Bien heureux encore, si l'ingratitude de Simon envers eux se borne à l'oubli. Le plus souvent les bienfaits excitent en cet homme une haine implacable, et un désir de vengeance qui ne s'assouvit jamais les chapitres précédens de cette brochure, en fournissent une foule d'exemples (128).

Après avoir exploité pendant trois ans la charité des catholiques, et ayant beaucoup perdu dans leur esprit, Deutz vit diminuer sensiblement ses ressources. Il fallait aviser à quelque autre expédient, car le métier de nouveau converti allait mal. C'est alors qu'on lui entendait souvent répéter ce mot qui a été rapporté par les journaux: Je ferai fortune, ou je périrai.

L'occasion de tenter fortune, ne se fit pas long-temps attendre. MADAME tenait sa cour à Massa. Le génie actif et le courage mâle de cette grande princesse ne permettaient pas de douter qu'elle ne nourrit des projets pour mettre son fils sur le trône de France. Deutz prend sa route par Massa, et s'y lie avec des personnes attachées à S. A. R. Dans ses conversations il laisse échapper, comme sans intention, qu'il devait se rendre en Espagne et en Portugal POUR UNE MISSION DE CONFIANCE. Certes, aucune affaire ne l'y appelait, et encore moins était-il chargé d'une MISSION quelconque; mais il présumait, comme tout le monde, que la mère de notre HENRI espérait des gouvernemens dans ces deux pays, des secours en faveur de son entreprise. Il déclamait beaucoup contre les révolutionnaires, les usurpateurs, et surtout contre les PARJURES qui avaient trahi la cause sacrée de la légitimité pour obtenir ou conserver des places lucratives. COMment peut-on, disait-il, pour un VIL INTÉRÊT, SACRIFIER SON OPINION, VENDRE SON HONNEUR ! etc. etc. (129)

Ces sermons si édifians lui gagnèrent la confiance de MADAME, d'autant plus facilement que l'imposteur osait dire que depuis long-temps il possédait toute celle du pape. S. A. R. résolut donc de mettre à profit l'imminent voyage de Deutz, et elle lui accorda une audience dont il

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