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LES OCCLUSIVES SONORES

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LES SONORES b, d, g

Le point d'articulation des occlusives sonores b, d, g est sensiblement le même que celui des sourdes correspondantes p, t, k; mais les muscles sont moins tendus, l'occlusion est moins forte, et la glotte vibre fortement depuis le commencement de l'implosion jusqu'à l'explosion :

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deux, dos,

gué, gui, gueux,

bas, bis, bœufs, bon, bien, bal, bu, beau, bout, doux, dix, dé, doge, dent, don, daigner, dalle, goût, garçon, goinfre, gain, guerre, guet, guérite, sabot, robinet, carabine, abbé,

adage, aider, idylle, odeur, bouder, moderne, madame, — léguer, aigu, égoutler,

tube, robe, aube, — raide, rade, rôde, ride, rude, coude, fade, - bague, bègue, digue, dogue, langue, longue,

blé, bleu, blouse, bras, brun, brute, bulbe, barbe, herbe, faible, noble, sabre, lugubre, arbre, drap, drôle, dresser, adjudant,

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garde, corde, perdre, mordre, cadre, coudre, glace, glotte, gris, gros, gras, grand, algue, orgue, aigle, tigre, nègre, augmenter, suggestion (gž).

Le se prononce p (non pas b sourd) devant une sourde dans l'intérieur d'un mot :

abcès, absolu, abstenir, obtenir, obstination.

Le g ne se prononce pas dans sangsue. Le c se prononce 9 dans second, seconder.

Le groupe graphique gu se prononce g dans les exemples cités ci-dessus. Mais dans Guadeloupe, guano, il se prononce gw; dans arguer gü ou gü; inextinguible se dit plutôt gi que givi; aiguille a givi, mais dans aiguiser gi commence à l'emporter sur givi; guise substantif ne connaît que gi, mais Guise nom propre se dit giz et aussi gwiz; Guillaume n'a que gi, Guillot de même, mais Guyot (et cela montre bien l'influence de la graphie sur ces prononciations) hésite entre gi et givi.

Dans les b, d, g germaniques l'implosion est d'ordinaire entièrement sourde, en sorte que nous entendons à la place des p, t, k faibles. Pour corriger ce défaut on s'exerce à prononcer ab, d, eg en ayant soin de faire vibrer la glotte jusqu'à l'explosion de la consonne; quand cette habitude glottale est prise, on supprime la voyelle à, et la consonne s'articule d'elle-même correctement.

Certaines langues, comme l'allemand, assourdissent toutes les consonnes finales; les Allemands doivent s'exercer à prononcer des b, d, g finaux bien sonores.

LECTURES

Apostrophe à Voltaire.

Dors-tu content, Voltaire, et ton hideux sourire
Voltige-t-il encor sur tes os décharnés?

Ton siècle était, dit-on, trop jeune pour te lire;
Le nôtre doit te plaire, et tes hommes sont nés.
Il est tombé sur nous, cet édifice immense
Que de tes larges mains tu sapais nuit et jour.
La Mort devait t'attendre avec impatience,
Pendant quatre-vingts ans que tu lui fis ta cour;
Vous devez vous aimer d'un infernal amour.
Ne quittes-tu jamais la couche nuptiale

Où vous vous embrassez dans les vers du tombeau,
Pour t'en aller tout seul promener ton front pâle
Dans un cloître désert ou dans un vieux château?
Que te disent alors tous ces grands corps sans vie,
Ces murs silencieux, ces autels désolés,
Que pour l'éternité ton souffle a dépeuplés?
Que te disent les croix? que te dit le Messie?
Oh! saigne-t-il encor, quand, pour le déclouer,
Sur son arbre tremblant, comme une fleur flétrie,
Ton spectre dans la nuit revient le secouer?
Crois-tu ta mission dignement accomplie,
Et comme l'Eternel, à la création,

Trouves-tu que c'est bien, et que ton œuvre est bon?
Au festin de mon hôte alors je te convie.

Tu n'as qu'à te lever;

-

quelqu'un soupe ce soir

Chez qui le Commandeur peut frapper et s'asseoir.

(A. DE MUSSET, Rolla.)

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SCAPIN. LEANDRE. que c'est.

SCAPIN.

Le serviteur infidèle.

Je vous ai fait quelque chose, monsieur?

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Oui, coquin, et ta conscience ne te dit que trop ce

Tu l'ignores!

Je vous assure que je l'ignore. LÉANDRE, s'avançant pour frapper Scapin. OCTAVE, retenant Léandre. — Léandre! SCAPIN. - Hé bien, monsieur, puisque vous le voulez, je vous confesse que j'ai bu avec mes amis ce petit quartaut de vin d'Espagne dont on vous fit présent il y a quelques jours, et que c'est moi qui fis une fente au tonneau, et répandis de l'eau autour, pour faire croire que le vin s'étoit échappé.

LEANDRE.

C'est toi, pendard, qui m'as bu mon vin d'Espagne, et qui as été cause que j'ai tant querellé la servante, croyant que c'étoit elle qui m'avoit fait le tour?

SCAPIN. LEANDRE.

Oui, monsieur, je vous en demande pardon.

Je suis bien aise d'apprendre cela. Mais ce n'est pas l'affaire dont il est question maintenant.

SCAPIN.
LEANDRE.

Ce n'est pas cela, monsieur?

Non; c'est une autre affaire qui me touche bien plus, et je veux que tu me la dises.

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Monsieur, je ne me souviens pas d'avoir fait autre

LEANDRE, voulant frapper Scapin. ·
SCAPIN. Hé!

Tu ne veux pas parler?

OCTAVE, retenant Léandre. Tout doux!

SCAPIN. Oui, monsieur; il est vrai qu'il y a trois semaines que vous m'envoyâtes porter, le soir, une petite montre à la jeune Egyptienne que vous aimez. Je revins au logis mes habits tout couverts de boue, et le visage plein de sang, et vous dis que j'avois trouvé des voleurs qui m'avoient bien battu, et m'avoient dérobé la montre. C'étoit moi, monsieur, qui l'avois retenue.

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C'est toi qui as retenu ma montre?

Oui, monsieur, afin de voir quelle heure il est.

- Ah! ah! j'apprends ici de jolies choses, et j'ai un serviteur fort fidèle, vraiment! Mais ce n'est pas cela encore que je demande.

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LEANDRE. Non, infâme; c'est autre chose encore que je veux que tu me confesses.

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LEANDRE, voulant frapper Scapin.

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OCTAVE, se mettant au-devant de Léandre. — Hé!

SCAPIN. - Ilé bien! oui, monsieur, vous vous souvenez de ce loupgarou, il y a six mois, qui vous donna tant de coups de bâton la nuit, et vous pensa faire rompre le cou dans une cave où vous tombâtes en fuyant.

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SCAPIN. - C'étoit moi, monsieur, qui faisois le loup-garou.

LÉANDRE.

C'étoit toi, traître, qui faisois le loup-garou? SCAPIN.Oui, monsieur, seulement pour vous faire peur, et vous ôter l'envie de nous faire courir toutes les nuits comme vous aviez de coutume.

(MOLIÈRE, Les Fourberies de Scapin )

Consonnes doubles.

Il n'est pas exceptionnel de rencontrer en français des consonnes doubles, c'est-à-dire dont la prononciation fait l'impression qu'une consonne est émise deux fois de suite. En fait c'est simplement une consonne prolongée, dont l'implosion, au lieu d'être immédiatement suivie de l'explosion, en est séparée par une tenue plus ou moins longue.

Ce phénomène apparaît dans des formes grammaticales comme :

je courrai, tu mourras,

dans des mots qui ont perdu un e inaccentué :

il serr(e)ra, nett(e)té, verr(e)rie, embaum(e)ment,

dans des rencontres de mots (avec ou sans chute d'un e inaccentué):

en d(e)dans, il l'a, ell(e) le dit, chaqu(e) quartier, tu gratt(es) ton papier, il pass(e) son temps, un tub(e) brisé, ça ne coup(e) pas, ce n'est pas l(e) lieu, partir résolument,

enfin dans l'intérieur des mots :

malléable, illégal, parallèle, syllabe, allitération, irréligion, irrespectueux, transsubstantiation, appétence, reddition, attique, mammifère, immigration, décennal.

Dans les trois premières catégories le doublement ou prolongement est obligatoire; dans la dernière il n'est guère que permis. Il ne faudrait pas croire que l'on

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