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Quatrième menfonge de Clauftre.

IL dit qu'on ne laiffe jouir Defmartres fils que de dix mille livres de rente; que ce n'est pas affez pour lui Clauftre et pour fa nièce Boutaudon; qu'il comptait fur un fonds de deux millions.

A l'égard de ces deux millions, il faut bien que Clauftre et fa nièce Boutaudon s'en paffent; mais il a été prouvé que le fieur Defmartres fils jouissait de quatorze mille livres de rente, provenantes de l'administration fage de fon père, et qu'à la mort de ce père il jouira de quinze mille livres de penfion qu'il eft obligé de lui faire; ce qui compofera environ trente mille livres de rente au fieur Defmartres fils. C'eft un bien fort honnête; il y a beaucoup de gens d'efprit dans Paris qui n'en ont pas tant, et qui n'ont pas des Clauftre pour directeurs de confcience et de finances.

Cinquième menfonge de Clauflre.

IL fait dire à Defmartres fils qu'étant malade, en 1760, fon père le força de faire un teftament par lequel il inftituait ce père fon héritier univerfel, et il fe trouve que ce teftament fut fait, le 11 avril 1757, dans la ville d'Aigueperfe, fon père étant alors à cent lieues de là; ce père Defmartres n'eft point inftitué héritier univerfel, c'est l'oncle même Jean-François. Quand on a reproché à Clauftre qu'il avait dit la chose qui n'est pas, il a répondu qu'on peut en ufer ainfi pour le bien des mineurs, que des patriarches ont fait des menfonges officieux, mais qu'en effet il a diť la vérité,

puifqu'il y a eu un teftament. Voilà le point principal; la date et le contenu ne font que des acceffoires.

Sixième menfonge de Clauftre.

Nous paffons quelques menues fraudes qui feraient exceffivement ennuyeuses, et que les curieux peuvent voir dans les mémoires imprimés; mais en voici une importante. Il accuse le fieur de la Borde, fermier général, d'avoir volé cinquante - huit mille livres avec les arrérages à fa belle-fœur, la dame Defmartres, mère du complaignant.

Voici le fait. La dame Defmartres, ayant confervé quelques inclinations de la Hollande, fon pays, fe plaifait quelquefois à mettre de l'argent dans le commerce de Cadix. Elle fit une avance de cinquantehuit mille livres fur des effets eftimés foixante- fept mille, que le fieur Jean-François de la Borde envoyait à Buenos-Aires, en 1731. Jean-François de la Borde perdit prefque tout. Il ne reçut qu'en 1751 les faibles débris de cette espèce de banqueroute, et cependant il eut la générofité, dès 1744, de rembourfer les 58000 livres avec les intérêts. Alonzo, Rubio de Rivas et Bartholomé Pinto de Ribera, chargés de la commiffion de vendre au Pérou les effets du fieur de la Borde, s'en étaient fort mal acquittés, malgré leurs grands noms. Je n'en fuis point étonné; ces meffieurs m'ont caufé, à moi qui vous parle, une perte de plus de cent mille livres ; mais n'ayant point à faire à un dévot, je n'ai pas effuyé de procès pour furcroît de ma perte. Clauftre, au contraire, a redemandé les

58000 livres avec les intérêts, quoiqu'ils euffent été payés, et qu'on eût la quittance. Cela eft effronté; mais il ne faut s'étonner de rien.

Septième menfonge de Claustre.

IL prétend que fon Defmartres fils était abandonné de fon père et de fon oncle, et qu'on lui retenait fon bien dans le temps même qu'il était majeur; mais une preuve qu'on ne lui retenait pas fon bien et qu'il en pouvait disposer, c'est qu'alors il fe rendait caution de plufieurs emprunts que fefait fon coulin JeanBenjamin de la Borde, fils du fermier général JeanFrançois.

Huitième menfonge de Clauftre.

Le prêtre ayant fait trois libelles contre le fieur Jean-François de la Borde, son bienfaiteur, en fait un quatrième contre fon élève Jean-Benjamin de la Borde le fils, qui fut fon bienfaiteur auffi dès qu'il eut atteint le moment de fa majorité. Dans ce libelle injurieux il étale des craintes chimériques fur les engagemens pris par Pierre de la Borde Defmartres en faveur de fon coufin germain Jean-Benjamin; engagemens mutuels, remplis, acquittés, annulés; affaires nettes, affaires confommées. Il voudrait les faire revivre pour en faire naître quelque nouveau procès. Dans cette honnête intention, ne fachant comment s'y prendre, il avance que dans le temps du premier engagement des deux coufins, ils étaient tous deux majeurs. Il ment encore fans utilité et par pure habitude. Le premier engagement

eft du 18 février 1759. Or Benjamin ne fut majeur que le 5 septembre de cette année. Le lecteur fe foucie fort peu, et moi auffi, du temps où les parties furent majeures; mais le public n'aime pas qu'un prêtre mente. Je hais ces menfonges facrés plus que perfonne, parce que je fais ce qu'il m'en a coûté.

Neuvième menfonge de Claustre.

CE bon prêtre, fachant bien que Pierre de la Borde Defmartres n'était pas fi riche que Jean-François de la Borde, ancien fermier général, a voulu s'adresser à lui plutôt qu'à Pierre; il s'eft imaginé qu'il pourrait le faire paffer pour tuteur des enfans de fa fœur, et pour adminiftrateur de leur bien, afin de pouvoir tomber fur lui. Il dirigeait ainfi fes attaques contre ceux qui étaient en état de payer la plus groffe rançon. Il s'eft encore trompé dans cette fuppofition. Les accufateurs font obligés d'avoir doublement raison, et Clauftre a toujours eu tort.

Voici ce qu'il demandait avec difcrétion.

58000 livres qui avaient été payées. 103888 livres auffi déjà payées.

77155 liv. auffi déjà payées en plufieurs articles.

Voici déjà une fomme d'environ deux cents trenteneuf mille francs que ce Clauftre, qui voulait paffer fa vie à la doctrine chrétienne, demandait pour lui et pour la demoiselle Boutaudon, fous le nom du fieur

Defmartres fils qui n'en favait rien. Il y a encore d'autres articles; le tout monte à environ cent mille écus. Il a déjà été condamné d'une voix unanime aux requêtes du palais fur prefque tous les articles.

IL

Conclufion.

Il y a deux fortes de juftices, celle du barreau et celle du public. Au barreau l'on eft débouté, c'est-à-dire, déchu de fes prétentions injuftes, debotat et debotavit; le public juge l'hypocrifie, l'ingratitude, l'esprit de rapacité et le menfonge. A quoi condamne-t-il un tel coupable? il le déboute de ses prétentions à la piété et à l'honneur; il lui confeille de retourner à la doctrine chrétienne, de ne plus apporter le glaive, mais la paix dans les familles, de ne plus diviser le fils et le père, la fille et la mère, la bru et la belle-mère. Cela eft très-bon ailleurs, mais non dans un précepteur qui reçoit des gages; chaque chofe, chaque homme doit être à fa place.

Tel eft le petit précis très - informe de la cause célèbre ou non célèbre de l'abbé Clauftre. Je n'ai pas l'honneur d'être de l'ordre des avocats, mais je fuis de l'ordre de ceux qui aiment la vérité et l'équité,

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