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Ce que c'est qu'une

Images forcées.

· Les

image. C'est une sensation vraie. surcharges d'images. Images précieuses et boursouflées. Images trop suivies. Le goût est la mesure des images. Les images sont la magie du style.

Comme nous l'avons dit, nous laisserons de côté l'examen des figures de mots et des figures de pensée. Le lecteur trouvera dans les Manuels de littérature les plus abondants détails sur la signification et la valeur des tropes, soigneusement cataloguées, classées, circonstanciées, selon le procédé des anciennes méthodes littéraires. On n'a qu'à ouvrir le premier recueil venu pour savoir ce que c'est que la prosopopée, l'exclamation, l'apostrophe, la réticence, la prétérition, l'interrogation, la gradation, l'antithèse, l'épiphonème, la litote, l'hyperbole, la syllepse, l'antonomase, le pléonasme, l'allégorie, la catachrèse, la synecdoque.

Tout cela est sans importance.

CE QUE C'EST QU'UNE IMAGE

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Nous ne parlerons que des métaphores ou plutôt des images, car la métaphore est toujours une image.

La métaphore consiste à transporter un mot de sa signification propre à quelque autre signification, en vertu d'une comparaison qui se fait dans l'esprit et qu'on n'indique pas. C'est une transposition par comparaison instantanée.

Si vous dites en parlant de Condé : Ce lion s'élance, vous faites une métaphore. Mais dites ensuite: Condé s'élance comme un lion, vous faites une comparaison.

Quand le prophète-roi dit au Seigneur : Votre parole est une lampe devant mes pas, il fait une métaphore; s'il avait dit : Votre parole éclaire mes pas comme une lampe de sa lumière, il aurait exprimé la comparaison, et il n'y aurait point eu de figure.

La métaphore est une image résultant d'une comparaison sous-entendue. Mais une image n'est pas toujours une métaphore.

L'image est une manière forte d'écrire, une façon de rendre un objet plus sensible.

Quand Bossuet dit que les hommes « allaient s'enfonçant dans l'iniquité », il ne fait pas une comparaison, il dit d'une façon plus forte, imagée, que les hommes devenaient de jour en jour plus méchants. I peint l'iniquité comme un gouffre où l'homme descend par degrés.

Au contraire, ce vers de Delavigne :

La vie est un combat dont la palme est aux cieux

est une image qui renferme une comparaison.

L'ART D'ÉCRIRE.

18

Sa voix redoutable
Trouble les enfers.
Un bruit formidable
Gronde dans les airs.
La terre tremblante
Frémit de terreur;
La lune sanglante

Recule d'horreur.

Ces vers de J.-B. Rousseau offrent des images qui ne sont pas des métaphores.

La métaphore fait partie du style même. Elle est inhérente non seulement au style, mais à la langue. On ne peut écrire sans en faire; on en fait à chaque instant en parlant.

Bouillants de colère, voler au combat, aborder froidement, parler avec sécheresse, planter un drapeau, la pénétration de l'esprit, la rapidité de la pensée, la chaleur du sentiment, la dureté de l'âme, l'aveuglement du cœur, le torrent des passions. Le feu de la jeunesse, le printemps de la vie, la fleur de l'âge, les glaces de la vieillesse, l'hiver de la vie, le poids des années. Enivré de gloire, glacé d'effroi, bercé d'espoir, ballotté de crainte, etc.

Ce sont là autant de métaphores plus ou moins heureuses.

Ce sont là aussi autant d'images. C'est dans les métaphores et, pour simplifier, dans les images, que réside la grande force du style.

Au lieu de dire que Dieu soutiendra une personne faible et malheureuse, Voltaire dit dans Zaïre:

Le Dieu qui rend la force aux plus faibles courages, Soutiendra ce roseau plié par les orages.

COMMENT ON TROUVE LES IMAGES

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Cette idée : Je meurs avant le temps, s'embellit d'une riche métaphore dans ce vers de M. de Lamartine :

La coupe de mes jours s'est brisée encor pleine.

Au lieu de dire : empêcher la destruction de la race de David, Racine dit :

Et de David éteint rallumer le flambeau.

La science d'écrire ne consiste pas toute dans l'image; mais la magie du style, sa couleur, son éclat, son effet, sa vie sont certainement dans l'image.

Nous parlerons donc des images dénominatives sous laquelle sont comprises les métaphores.

Il ne faut pas abuser des métaphores, parce qu'à la longue elles fatiguent, comme une ornementation surchargée; mais il ne faut pas craindre de multiplier les images. Suivez le conseil de Buffon, qui a été jusqu'à dire, à propos du style : « Que chaque pensée soit une image ».

Il y a des métaphores hardies, celles qui sont tirées d'objets trop peu semblables à ceux qu'on veut exprimer, comme si l'on appelait le tonnerre la trompette du ciel. On ne peut faire passer de pareilles métaphores qu'à l'aide d'un pour ainsi dire ou de quelque autre tournure :

...

Les soins ne purent faire

Qu'elle échappât au temps, cet insigne larron;
Les ruines d'une maison

Se peuvent réparer. Que n'est cet avantage

Pour les ruines du visage!

(LA FONTAINE.)

Evilez les images (images ou métaphores):

1° Quand elles sont forcées, prises de trop loin, et dont le rapport n'est point assez naturel, ni la comparaison assez sensible. C'est ainsi qu'un poète appelle les gazons les cheveux de Cérès.

2° Quand elles sont tirées d'objets bas et dégoûtants. C'est ainsi que Tertullien dit en parlant du déluge universel:

Le déluge fut la lessive générale de la nature;

et Benserade :

Dieu lava bien la tête à son image.

3o Quand les termes métaphoriques, dont l'un est dit de l'autre, excitent des idées qui ne peuvent être liées. Telle est cette métaphore de Malherbe :

Prends ta foudre, Louis, et va comme un lion
Porter le dernier coup à la dernière téte
De la rébellion.

Louis se trouve successivement comparé à Jupiter maître de la foudre, à un lion, et à Hercule terrassant l'hydre de Lerne.

Rousseau a commis la même faute dans la strophe

suivante :

L'hiver, qui si longtemps a fait blanchir nos plaines,
N'enchaîne plus le cours des paisibles ruisseaux;
Et les jeunes zéphirs, de leurs chaudes haleines,
Ont fondu l'écorce des eaux.

Fondre se dit de la glace ou du métal; on ne peut lonc pas dire, même au figuré, fondre l'écorce. D'ail

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