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OPUSCULES,

OU

PETITS TRAITÉZ.

Le I. De la Hardieffe, & de la Crainte.

Le II. De l'Ingratitude.

Le III. Du Commerce.

Le IV. De la grandeur, & petiteffe des Corps.

Le V. Des Couleurs.

Le VI. Du Menfonge.

Le VII. Des Monftres.

QUATRIEME PARTIE.

Tome III. Part. I.

A

D

que

AU

CARDINAL

MAZARIN.

MONSEIGneur,

La bonté dont il plût à vôtre Eminence d'ufer en recevant les derniers Opufcules que je lui dédiai, m'obligeroit toute feule à vous en préfenter la fuite, quand je n'y ferois porté de ce feul motif. Mais comme je me fens votre redévable au delà de toute expreffion, l'on m'auroit pû reprocher l'ingratitu de que je rends fi criminelle dans l'un de ces Traités, fi n'aiant rien pour l'heure de plus confidérable, je ne vous euffe offert ce petit Travail. Les Livres des Anciens nous apprennent, qu'en reconnoiffance d'une fanté par

faite de tout le corps, ils fe contentoient de préfenter à Dieu leur chevelure qu'ils mettoient fur fes Autels. Je les imite fans idolatrie, MONSEIGNEUR, quand je confacre dans vôtre incomparable Bibliotheque un Ouvrage de fi peu de confidération; donnant à celle de qui je tiens tout ce que je fai, une portion de mes études, qui ne vaut que ce que mon zéle la peut faire valoir. Car je ne fuis pas témeraire jusques-là, de préfumer que mes veil- les doivent tant foit peu arrêter une Ame inceffamment agiffante, comme celle de vôtre Eminence. L'on ne fauroit fans crime la diver. tir des foins continuels qu'elle prend pour la grandeur de cette Monarchie. Et c'est affés à ceux qui me reffemblent, de lui demander (comme je fais avec toute forte de refpect) la faveur que ce qu'ils mettent au jour puiffe avoir lieu dans ce Temple des Muses, parmi le nombre innombrable de volumes qui le vendent le plus auguste qui foit aujourd'hui dans le Monde. C'eft où fe chantent tous les jours les Hymnes dûs à la gloire de vôtre Nom, comme au lieu où paroît le plus manifeftement l'inclination de vôtre Eminence pour les

1. Ethic.

cap. 12.

Sciences, qui ne sont jamais bien eftimées ni
protegées que par ceux qui les connoiffent &
les poffedent. Mais parce que j'ai appris du
plus celebre Autheur qui s'y trouve, qu'encore Arift. 1.
que les Vertus ordinaires reçoivent avec rai-
fon beaucoup de lounge, il y en a'd'autres
fi élevées qu'elles ne font pas loüables, à cause
qu'elles font au deffus de ces mêmes louanges; Je
m'empêcherai bien d'entreprendre ici le moin-
dre difcours qui puisse être pris pour un Eloge
médité. En effet, il n'y a point de termes
qui me fatisfaffent dans cette pensée. Tous
ces grands furnoms de Héros n'ont point de
proportion avec ce que je conçois. Et à moins

que
d'en trouver un qui fignifie toutes les Ver-
tus reünies enfemble, comme on veut que la
Pantaure contienne toutes celles des autres pier-
res, je penserai toûjours mieux faire de laif-
fer votre mérite fans recommandation,`que
de lui donner des attributs trop au deffous
de lui. L'on a dit d'un des grands Génies
de l'Antiquité, mais de beaucoup inferieur à
celui de vôtre Eminence, que fa gloire étoit
arrivée au point de ne pouvoir plus croître
par des paroles obligeantes, ni diminuer par

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