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Qui donc es-tu, spectre de ma jeunesse,
Pèlerin que rien n'a lassé?

Dis-moi pourquoi je te trouve sans cesse
Assis dans l'ombre où j'ai passé.
Qui donc es-tu, visiteur solitaire,

Hôte assidu de mes douleurs?

Qu'as-tu donc fait pour me suivre sur terre?
Qui donc es-tu, qui donc es-tu, mon frère?
Qui n'apparais qu'au jour des pleurs?

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LA VISION.

Ami, notre père est le tien.
Je ne suis ni l'ange gardien,
Ni le mauvais destin des hommes.
Ceux que j'aime, je ne sais pas
De quel côté s'en vont leurs pas
Sur ce peu de fange où nous sommes.

Je ne suis ni dieu ni démon,

Et tu m'as nommé par mon nom
Quand tu m'as appelé ton frère;
Où tu vas, j'y serai toujours,
Jusques au dernier de tes jours,
Où j'irai m'asseoir sur ta pierre.

Le ciel m'a confié ton cœur.
Quand tu seras dans la douleur,
Viens à moi sans inquiétude,

Je te suivrai sur le chemin ;

Mais je ne puis toucher ta main ;

Ami, je suis la Solitude.

Novembre 1835.

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3.

CHANSON DE BARBERINE.

BEAU chevalier qui partez pour la

Qu'allez-vous faire

Si loin d'ici?

guerre,

Voyez-vous pas que la nuit est profonde,
Et que le monde

N'est que souci?

Vous qui croyez qu'une amour délaissée
De la pensée

S'enfuit ainsi,

Hélas! hélas! chercheurs de renommée,

Votre fumée

S'envole aussi.

Beau chevalier qui partez pour la guerre,
Qu'allez-vous faire

Si loin de nous?

J'en vais pleurer, moi qui me laissais dire
Que mon sourire

Était si doux.

1836.

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S'il en est ainsi, parle bas,
Mystérieuse messagère ;

S'il n'en est rien, ne réponds pas ;

Dors sur mon cœur fraîche et légère.

Je connais trop bien cette main,
Pleine de grâce et de caprice,
Qui d'un brin de fil souple et fin
A noué ton pâle calice.

Cette main-là, petite fleur,
Ni Phidias ni Praxitèle

N'en auraient pu trouver la sœur
Qu'en prenant Vénus pour modèle.

Elle est blanche, elle est douce et belle,
Franche, dit-on, et plus encor;

A qui saurait s'emparer d'elle

Elle peut ouvrir un trésor.

Mais elle est sage, elle est sévère ;
Quelque mal pourrait m'arriver.
Fleurette, craignons sa colère.
Ne dis rien, laisse-moi rêver.

1838.

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