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Et, se détournant à demi,
Me montra du doigt la colline.

A l'âge où l'on croit à l'amour,
J'étais seul dans ma chambre un jour,
Pleurant ma première misère.

Au coin de mon feu vint s'asseoir
Un étranger vêtu de noir,

Qui me ressemblait comme un frère.

Il était morne et soucieux;
D'une main il montrait les cieux,
Et de l'autre il tenait un glaive.
De ma peine il semblait souffrir,
Mais il ne poussa qu'un soupir,
Et s'évanouit comme un rêve.

A l'âge où l'on est libertin,
Pour boire un toast en un festin,
Un jour je soulevai mon verre.
En face de moi vint s'asseoir
Un convive vêtu de noir,

Qui me ressemblait comme un frère.

Il secouait sous son manteau

Un haillon de pourpre en lambeau.
Sur sa tête un myrte stérile,

Son bras maigre cherchait le mien,
Et mon verre, en touchant le sien,
Se brisa dans ma main débile.

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Qui laisse sa laine au buisson,
Senti se dénuer mon âme ;

Partout où j'ai voulu dormir,
Partout où j'ai voulu mourir,
Partout où j'ai touché la terre,
Sur ma route est venu s'asseoir
Un malheureux vêtu de noir,

Qui me ressemblait comme un frère.

Qui donc es-tu, toi que dans cette vie
Je vois toujours sur mon chemin?
Je ne puis croire, à ta mélancolie,
Que tu sois mon mauvais Destin.
Ton doux sourire a trop de patience,
Tes larmes ont trop de pitié.

En te voyant, j'aime la Providence.

Ta douleur même est sœur de ma souffrance;
Elle ressemble à l'amitié.

Qui donc es-tu?- Tu n'es pas mon bọn ange;
Jamais tu ne viens m'avertir.

Tu vois mes maux (c'est une chose étrange !)
Et tu me regardes souffrir.

Depuis vingt ans tu marches dans ma voie,
Et je ne saurais t'appeler.

Qui donc es-tu, si c'est Dieu qui t'envoie?
Tu me souris sans partager ma joie,

Tu me plains sans me consoler !

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