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l'activité de votre secrétaire semblait vous promettre pour l'Académie plus de vigueur et d'éclat que jamais. Ce n'est pas que M. Maillard de Chambure, successeur de M. Pingeon, ne puisse par l'étendue et la variété de ses connaissances, vous rendre moins sensible la perte que vous avez faite; mais, vous ne l'ignorez pas, de nombreux travaux stimulent ailleurs son zèle et réclament l'emploi d'un temps qu'il eût été, sans d'impérieuses circonstances, en mesure de consacrer de la manière la plus distinguée pour l'honneur de l'Académie. Différents motifs s'opposent à ce qu'il apporte cette année le tribut de ses lumières pour la partie du Compte-rendu qui regarde les belles-lettres et les arts; quant à la partie scientifique, les circonstances m'ont amené à vous en présenter moi-même l'analyse.

Je ne puis nier cependant d'avoir été retenu par une crainte légitime, en réfléchissant que je devais vous entretenir d'un ensemble de faits dont la connaissance vous avait été acquise à une époque où je n'avais pas encore l'honneur d'appartenir à l'Académie. Ce n'était point une difficulté légère, celle d'introduire et de coordonner, dans le cadre étroit d'un compte-rendu, des observations éparses, que je n'avais pas pu recueillir de la bouche des membres qui s'étaient plu à vous en transmettre les détails.

Bien que l'analyse des travaux les plus importants que l'Académie a vu s'accomplir depuis deux ans, ne soit ni aussi complète, ni aussi étendue qu'elle aurait dû l'être, je dois néanmoins déclarer que je suis redevable à l'obligeance de l'un de nos collègues les plus laborieux, de plusieurs renseignements sur la série de faits qui ajoutent annuellement à la variété de vos richesses. M. Vallot a donc bien voulu nous communiquer le

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sommaire des travaux qui lui sont propres, et nous avons pensé qu'il n'y avait rien de mieux à faire làdessus, qu'à laisser notre collègue vous rappeler luimême le souvenir de ses intéressantes communications. Du reste, vous reconnaîtrez, Messieurs, que nous avons suivi le même ordre qu'avait adopté notre prédécesseur.

MÉDECINE, CHIRURGIE ET ANATOMIE

SUR DES SUJETS DIVERS DE MÉDECINE.

M. Salgues a lu dans nos Séances particulières, trois notices, dont l'une, insérée dans les Mémoires de l'Académie de cette année, se rapporte à la Pneumonie, qui à Mirebeau ne saurait jamais être traitée par la saignée,. sans de graves inconvénients, tandis que cette opération est rigoureusement nécessaire dans plusieurs villages, voisins, pour combattre avec succès la même maladie.. La seconde notice est intitulée « Commémoratif

:

pathologique de l'infirmerie des filles de Ste.-Anne, pour les années 1835 et 1836. » M. Salgues démontre dans ce Mémoire, que ces filles étant soumises à des règles hygiéniques particulières, dépendantes d'habitudes qu'elles ne peuvent modifier, leurs maladies offrent des caractères spéciaux, où la débilité des forces domine, et où l'on ne saurait, qu'avec la plus grande circonspection, employer les médications affaiblissantes et antiphlogistiques.

L'expérience a démontré à M. Salgues, que près de ces filles il n'y a de succès à obtenir dans leurs maladies, que par l'usage souvent réitéré des émétiques,

des purgatifs et des vésicatoires. Il part de là, pour blamer les méthodes exclusives, si souvent fàcheuses dans leurs applications en médecine.

Dans sa troisième notice enfin, M. Salgues signale un fait de prolapsus du cœur, fait dans lequel cet organe était couché transversalement sur le diaphragme, sa base à droite et sa pointe à gauche. Cette grande anomalie organique était congéniale.

SUR DIFFÉRENTS CAS D'
D'EMPOISONNEMENT.

Diverses observations relatives à la Toxicologie vous ont été communiquées l'année dernière par M. Tilloy : nous n'essaierons pas de vous en présenter nous-même l'analyse, dans la crainte de nuire à l'intérêt dont ces observations sont susceptibles, et nous laissons à M. Tilloy le soin de vous faire connaître lui-même les circonstances qui lui ont permis de tirer un parti fort avantageux de plusieurs substances qu'il s'empressa d'administrer comme un remède spécifique contre des poisons violents.

1re OBSERVATION.

Empoisonnement par l'Opium.

à

Un porte-faix, après avoir accumulé par petites portions, la quantité de seize grammes de laudanum liquide (ce qui équivaut à quatre grammes d'opium), la prit dans l'intention de se détruire. Il ne tarda pas être atteint de stupeur; son sommeil devint extrêmement agité et comme convulsif. Appelé en hâte par sa femme, et après un examen du liquide que ce malheureux s'était administré, je lui fis prendre une solution de quinze centigrammes de tartre stibié, et de plus un lavement où entrait la même quantité d'émétique. Une demi-heure

après, comme les symptômes de l'empoisonnement semblaient avoir un peu moins d'intensité, je revins à l'émétique à la dose de cinq centigrammes, et l'amélioration devint d'une extrême évidence, si bien que le lendemain le malade put reprendre son travail.

2o et 3° OBSERVATIONS.-Empoisonnement par l'Arsenic.

Une domestique avait fait manger à sa maîtresse, par étourderie, des gaudes qui renfermaient de l'arsenic et que l'on avait préparées pour détruire des rats. Cette dame s'aperçut de suite de la méprise et m'en fit prévenir. Je lui donnai du persulfure de chaux convenablement dilué, les vomissements survinrent presqu'aussitôt; pendant quelques heures, la malade continua l'usage de ce médicament qui fut étendu dans une plus grande quantité d'eau. Enfin, il n'y eut plus de vomissements, et l'arsenic ne donna lieu de cette manière à aucun résultat fàcheux.

A cette observation il convient de joindre la suivante, pour montrer l'utilité du persulfure de chaux, dans les cas où il est nécessaire de provoquer de prompts vomisse

ments.

Un père de famille laissa par mégarde de l'arsenic sur une table; son enfant âgé de quatre ans en prit une pincée qu'il porta dans sa bouche et qu'il avala; ce fut du moins la crainte du père. Un médecin mandé de suite se disposait à recourir à l'émétique, afin de provoquer le rejet de la substance vénéneuse. Mais dans la crainte que l'arsenic ne fût absorbé avant que l'émétique n'eût produit l'effet désiré, je recommandai l'emploi du persulfure de chaux qui répondit de la manière la plus complète à mon attentę.

4 OBSERVATION.

- Empoisonnement par la Strychnine.

A l'époque de l'année où, par une sage mesure de sûreté, la police fait empoisonner les chiens, un de ces animaux de forte taille fut victime d'une semblable précaution, et son maître ne s'en aperçut que quand se manifestèrent les premiers symptômes occasionnés par la strychnine. Je fis prendre au chien vingt centigrammes d'acétate de morphine; une demi-heure après, les vomissements n'augmentaient pas; mais comme l'animal me paraissait encore sous l'influence de la strychnine, je continuai l'usage de l'acétate de morphine à la dose d'un décigramme; il se rétablit bientôt, et six à huit heures après il semblait ne plus se ressentir de rien.

Bien que la morphine eût annihilé les effets de la strychnine, je pensai que ce n'était peut-être pas le remède spécial, et je songeai à recourir à l'eau de laurier-cerise. En effet, après avoir fait prendre cinq centigrammes de strychnine à un chien de petite taille, je lui donnai de suite une cuillerée d'eau de lauriercerise; l'animal vomit promptement et ne fut pas malade. Le lendemain je renouvelai sur lui le même essai et j'attendis l'effet du poison, c'est-à-dire le complet développement des accès tétaniques; je lui fis boire alors une cuillerée d'eau de laurier-cerise qu'il rendit à l'instant ; nouvelle dose fut administrée sans avoir été rejetée cette fois; mais les mouvements convulsifs moins violents, il est vrai, n'avaient pas entièrement disparu; ils ne cédèrent complètement qu'à une troisième dose d'eau de laurier, et peu de temps après l'animal reprit sa vivacité naturelle.

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