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et la suivante :

Lorsque votre ame anéantie

Aura bien déploré le destin du Messie

Mort abreuvé de fiel au calvaire des Rois.

En général la pièce est une fort belle composition, mais qui aurait eu besoin d'être revue, afin d'en faire disparaître les fautes de détail.

3e Pièce. LA DERNIÈRE nuit d'un CONDAMNÉ.

Ce titre rappelle un ouvrage bien connu de l'un de nos plus illustres écrivains.

Les sensations désolantes d'un homme condamné au dernier supplice sont retracées avec une effrayante énergie.

Tantôt ce malheureux se reporte à ses premières années, temps d'innocence et de bonheur; tantôt il blasphême la Divinité, désire que le jour du dernier jugement arrive et que le monde finisse avec lui.

D'épouvantables imprécations sortent de sa bouche contre ce peuple ivre de sang, qui court à une exécution à mort comme à une fête.

Epuisé par ses transports, il succombe au sommeil et rêve qu'il a brisé ses fers, s'est mis en mer, et qu'après avoir essuyé une tempête, il aborde en Amérique.

Là se trouve une description riante du pays où il est descendu, description qui fait un singulier contraste avec ce qui précède.

Il croit voir en songe d'abord la femme qu'il aimait, ensuite un homme à visage sinistre qui égorge des agneaux sans défense. Il veut fuir et ne trouve point d'issue. Les détails de ce cauchemar sont bien rendus.

Il s'éveille et éprouve un instant de bonheur, mais de

courte durée; il se retrouve dans sa prison où le jour commence à pénétrer.

Une voix consolatrice se fait entendre, c'est celle d'un ministre des autels qui le presse dans ses bras; il revient à de meilleurs sentiments, tombe à genoux et prie; mais tout à coup la porte de la prison s'ouvre, on vient le chercher pour le conduire au lieu de son supplice.

Ici l'auteur a eu l'étrange idée d'attendrir le cœur du condamné. Sa passion pour la femme qu'il aimait et qui l'a trahi se réveille. Elle a, dit-il, ses vœux, sa dernière pensée, il la regrette plus que la vie.

Un sentiment pareil, dans un tel moment, est d'autant plus inconcevable que cette femme lui a préféré un autre amant et qu'il n'a été condamné que pour avoir poignardé son rival.

Enfin il voit entrer dans son cachot l'homme qui lui avait apparu dans son rêve...... le bourreau.

La versification de cette pièce est à peu près irréprochable; mais la composition pèche par l'invraisemblance de certaines sensations prêtées au condamné, par leur incohérence qui détruit l'intérêt, et surtout par des tableaux gracieux et des vers d'idylle déplacés dans un sujet pareil.

4 Pièce. SAINTE CÉCILE, MARTYRE.

Ode.

L'auteur entre en matière par le tableau des préparatifs d'un supplice; ce n'est point un criminel, un sacrilège, ni un parricide qui va le subir; c'est une vierge chrétienne, innocente et pure.

Il raconte les premières années de Cécile, elle a été élevée dans le culte des faux dieux ; chanter et jouer du

luth, voilà ses plaisirs, voilà toute sa vie. Un jour la Vierge lui apparaît, dessille ses yeux et l'invite à embrasser la foi des chrétiens.

Cécile obéit, elle renonce au monde, mais non pas au culte de l'harmonie. Elle se retire dans une solitude où elle chante les louanges du Très-Haut et pleure ses erreurs passées.

Là est un éloge de la musique et de la poésie qui n'est pas un hors-d'œuvre dans un pareil sujet.

Cécile est enlevée de sa retraite par les persécuteurs de la foi chrétienne qui lui ordonnent de chanter Auguste et les dieux olympiens; elle refuse, on la menace du plus cruel des supplices, du feu; rien ne peut l'ébranler ; elle est conduite au bûcher, y monte d'un front serein et chante le bonheur qui l'attend au ciel dans un hymne ( un peu long pour la situation); enfin les sons de sa voix et de sa harpe s'affaiblissent et expirent. Son ange protecteur l'emmène au ciel; le chœur des élus l'y reçoit en chantant, et l'enfer pousse des cris de rage.

Les chrétiens viennent recueillir ses cendres et rendent les devoirs funèbres à ces restes saints. Ils trouvent sa lyre intacte sur le bûcher; elle a été miraculeusement préservée des flammes.

Telle est l'analyse de cette pièce, dont le sujet était éminemment poétique, et favorisait le talent de l'au

teur.

Son style est généralement pur et d'une clarté qui ne se dément jamais ( qualité rare et trop négligée de nos jours); on peut lui reprocher des longueurs qui affaiblissent l'intérêt, l'invraisemblance des chants au milieu des flammes, ce qui ne pourrait s'expliquer que par un miracle; mais alors il eût fallu le faire mieux sentir;

l'auteur a eu ce soin pour la lyre conservée intacte ; enfin une strophe très-faible où Cécile est menacée de la mort la plus amère et où ses persécuteurs lui disent que sa fierté téméraire se changera en un tremblant effroi. Il est surprenant que l'auteur qui se montre homme de goût dans le reste de son ouvrage, ne se soit pas aperçu de l'extrême médiocrité de ce passage, ou qu'il n'ait pas pris la peine de le corriger.

La dernière strophe manque aussi d'harmonie, ce ce qui est une maladresse: il faut toujours soigner les derniers vers d'une pièce de poésie, l'impression qu'ils laissent au lecteur s'efface moins que toute autre.

L'Académie, après avoir entendu la lecture de ce Rapport, a délibéré dans sa séance du 10 août 1839, qu'il ne serait point décerné de prix ; mais elle a accordé une médaille d'encouragement de la valeur de 100 f. à chacun des auteurs des pièces ayant pour titre : La princesse Marie et Les deux Napoléon, et une mention honorable à M. DELMAS, de Dijon, auteur de Sainte Cécile, martyre, ainsi qu'à l'auteur de La dernière nuit d'un condamné.

Ces récompenses ont été décernées dans la séance publique du 21 août 1839.

En conséquence, une médaille d'encouragement a été remise à Me JULIA MICHEL, domiciliée à Paris; et une seconde médaille d'encouragement a été remise également à M. Th. WAINS-DESFONTAINES, à Ussel (Corrèze ).

PRIX

QUI ONT ÉTÉ ACCORDÉS DANS LA CLASSE DES SCIENCES.

ÉCONOMIE Politique.

A l'occasion du concours sur le déboisement, une médaille d'encouragement a été décernée, dans la même séance, à M. J.-B. THOMAS, demeurant à Paris.

AGRICULTURE.

Un prix, consistant en une médaille en or, a été décerné en même temps à M. V. NOEL, pour les soins avec lesquels il a su introduire et favoriser la culture du houblon à Beire-le-Chatel (Côte-d'Or.)

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