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aisément ce genre de renseignements en consultant le Précis alphabétique qui, lui-même, renverra le lecteur à certains passages du volume.

La connaissance des maux qui désolent l'Occident et des remèdes qui peuvent le guérir figure parmi les informations les plus utiles. De nombreux détails sont donnés à ce sujet dans les monographies de familles publiées dans ce volume. L'usage habituel du Précis alphabétique apprendra bientôt au lecteur le moyen d'arriver directement aux passages où sont données ces sortes de renseignements.

L'Introduction et l'Épilogue joints à chaque volume offrent, en général, une lecture plus facile que celle des monographies. J'y ai souvent groupé dans une forme sommaire la réponse à beaucoup de questions qui préoccupent aujourd'hui l'attention publique. C'est ainsi que dans les sept paragraphes suivants, j'indique comment tant de races, après avoir conquis la prospérité, tombent aujourd'hui dans la souffrance. J'explique notamment comment les familles stables se constituent; comment les peuples prospèrent; comment ils se corrompent et souffrent par la prospérité même; comment enfin ils échappent à la ruine en se réformant.

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COMMENT LES DEUX SORTES DE FAMILLES STABLES SE CONSTITUENT PAR LA PRATIQUE DU DÉCALOGUE ET LA SOUMISSION A L'AUTORITÉ PATERNELLE; COMMENT ELLES SE PERPETUENT DANS LES LOCALITÉS OÙ ABONDENT LES DEUX GRANDES PRODUCTIONS SPONTANÉES.

Les herbes des steppes et les poissons des rivages maritimes se classent au premier rang parmi les productions

spontanées du sol et des eaux. Ces deux grandes ressources procurent aux populations, avec la moindre somme de travail, la subsistance la plus permanente. Elles abondent particulièrement en Europe; et elles ont contribué, dès les premiers âges, à constituer les deux sortes de races d'où sont sorties, en s'agglomérant sur place ou en émigrant vers d'autres régions, les sociétés les plus stables.

Les steppes sont des plaines ou des plateaux plus ou moins élevés, où les herbes croissent en abondance, à l'exclusion des arbres. Elles sont éminement propres à la multiplication des grands animaux herbivores qui euxmêmes, par leur lait, leur chair, leurs peaux et leurs toisons, fournissent les matières les plus utiles à la subsistance de l'homme. Ces produits donnent, en effet, tous les éléments d'une nourriture propre au développement complet du corps humain. Elles offrent, en outre, les matériaux au moyen desquels on fabrique le vêtement et l'habitation qui, sous le climat des steppes, constituent des abris indispensables à l'existence d'une race d'hommes. C'est sur les steppes que les races humaines s'établissent partout le plus aisément.

Les populations des steppes ont pour caractère principal la mobilité des habitations et certaines habitudes qui en dérivent. Elles réunissent en troupeaux les animaux sociables, enclins à subir la domination de l'homme. Chaque propriétaire s'attribue la portion de steppe qui correspond à l'importance du troupeau nécessaire à sa famille. Pour assurer sa propre subsistance, chaque famille se transporte successivement sur tous les points de son pâturage, à mesure que s'épuisent les herbes de chaque station; et c'est ainsi qu'une impérieuse nécessité impose à la race entière la vie demi-nomade et pastorale.

Ordinairement, plusieurs familles, conformément à de

vicilles coutumes, participent à la propriété d'un pâturage et le parcourent en commun avec leurs troupeaux. Elles constituent ainsi des circonscriptions locales, nommées douars en Algérie, plus tranchées que ne sont les communes de la vie sédentaire et agricole. Néanmoins, comme chez ces dernières, la famille nomade forme une unité marquée par certains traits spéciaux qui se reproduisent chez tous les nomades, et qui restent longtemps visibles chez les agriculteurs constitués peu à peu par le défrichement du sol. Plusieurs tendances se réunissent pour organiser la famille des pasteurs et pour déterminer la forme des essaims qui en sortent sous les régimes de fécondité. Le père est porté, par deux sentiments trèsénergiques, à conserver près de lui chaque fils marié et à associer le jeune ménage à l'exploitation de son troupeau : le premier mobile est l'amour paternel qui voit une calamité domestique dans la séparation d'existences qui avaient été intimement unies; le second, plus impérieux encore dans les âmes d'élite, est de veiller journellement à la transmission de la loi morale dans le cœur des jeunes générations qui vont naître. Le fils est porté par intérêt vers une association qui hâte l'époque de son établissement comme chef de ménage et qui lui procure, à ce titre, un premier degré d'émancipation. Le douar n'oppose d'ailleurs aucun obstacle à l'adjonction des nouveaux ménages, tant qu'elle ne compromet pas les moyens de subsistance que chacun a trouvés jusqu'alors dans son pâturage. Au contraire, lorsque certaines années peu favorables à la production des herbes démontrent au douar qu'il touche à la limite où les ressources alimentaires deviendraient insuffisantes, les familles se concertent pour organiser des essaims. L'émigration de ces essaims est l'un des éléments caractéristiques de la con

stitution des pasteurs nomades. Elle varie selon la nature des régions contiguës à leurs territoires; et, en général, elle se produit spontanément en vue de deux destinations principales. Quand une région de la steppe n'est point encore peuplée, ou bien quand elle a été ravagée par les révolutions du sol ou les désordres de l'atmosphère, toutes les familles fournissent leur contingent à un fort essaim qui, tout d'abord, introduira, dans la région déserte, un premier noyau de douar, capable de pourvoir à sa propre sécurité. Quand, au contraire, le débouché de l'émigration est établi chez une nation sédentaire, riche et commerçante, les émigrants s'y transportent isolément ou par petits essaims. Souvent ceux-ci se constituent seulement en vue de la sécurité ou de l'économie du voyage: rendus au lieu de destination, ils se répartissent selon leurs convenances personnelles pour répondre aux besoins que fait naître le développement des arts, ou pour combler les vides produits, dans le régime du travail, par l'abus de la richesse et la corruption des mœurs.

Le trait principal de cette organisation des sociétés est le groupement des générations successives autour de l'aïeul dont elles sont issues. Par ce motif elle est justement nommée «< la constitution patriarcale ». C'est le régime qui pourvoit le mieux au bien-être de chacun. En effet, la famille patriarcale offre aux jeunes enfants une hiérarchie de protecteurs dévoués. Elle procure de bonne heure aux adultes, quelque nombreux qu'ils soient, les bienfaits moraux et matériels des fiançailles et du mariage, car, pour chaque nouveau ménage, il suffit d'ajouter au matériel de la communauté une tente et un chariot. Les hommes faits pourvoient à tous les travaux qui assurent le bienêtre de la communauté, parce qu'ils disposent d'un personnel nombreux et obéissant. Enfin les vieillards affaiblis

par l'âge, les infirmes et les malades peuvent compter en toutes circonstances sur des égards traditionnels et des soins affectueux.

Les rivages maritimes fournissent aux populations des moyens de subsistance aussi importants que ceux des steppes. Les poissons, les crustacés et les mollusques de la mer n'offrent pas, il est vrai, aussi complétement que le lait et la chair des troupeaux, tous les éléments nécessaires au meilleur développement du corps humain. Le travail du pêcheur-côtier, pour constituer une solide race d'hommes, doit être, en général, complété par la récolte ou même par la culture de certains produits du sol. Il exige d'ailleurs des efforts plus pénibles que ceux qui s'imposent aux pasteurs. Enfin les produits de la pêchecôtière sont transportés moins facilement que les troupeaux aux lieux de consommation. Par tous ces motifs, les pêcheurs-côtiers ont été prêts moins tôt que les pasteurs à constituer des sociétés complètes; et, par ces motifs réunis, ils n'ont pas pris une part aussi grande à l'histoire de l'antiquité. Par compensation, ils ont coopéré plus efficacement pendant l'ère moderne à la formation des races stables. Les poissons ne sont point détruits accidentellement, comme les troupeaux, par les désordres de l'atmosphère; et, en conséquence, ils offrent une base plus sûre à la subsistance d'une race d'hommes. Les avantages sociaux se balancent donc sous les deux régimes; et ils y font naître également la stabilité, bien que, sur plusieurs points essentiels, ils introduisent la diversité dans les aptitudes et les sentiments. Ces différences apparaissent surtout en ce qui touche l'organisation de la famille ; et, comme on va le voir, elles ont leur origine principale dans le contraste des travaux qui procurent journellement aux pêcheurs-côtiers et aux pasteurs nomades les moyens de subsistance.

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