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A

M. MIGNET

L'UN DES QUARANTE

DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE

SECRÉTAIRE PERPÉTUEL

DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES MORALES

ET POLITIQUES.

MONSIEUR.

Ous me pardonnerez, je l'espère, si j'inscris votre nom en téte de ces modestes études et si je vous prie d'en accepter le sincère hommage.

Ce n'est pas seulement à l'ami qui

depuis quatorze années m'a constamment soutenu de son affection et de ses conseils que je veux donner ce témoignage bien insuffisant d'attachement et de gratitude; ce n'est pas seulement à l'historien éloquent qui occupe un rang si élevé dans la république des lettres parce qu'il n'a jamais cherché que dans la vérité, poursuivie avec patience et exposée avec art, les moyens d'intéresser et d'émouvoir; c'est encore et surtout à l'homme excellent dont le nom me paraît mieux placé que tout autre au commencement de ce petit livre, parce qu'il est peut-être moins éloigné que tout autre de cet équilibre de l'âme et de cette modération dans la conduite que la plupart des moralistes honorent avec raison du beau nom de sagesse.

Si, en effet, l'accomplissement tranquille et régulier du devoir, l'attache

ment sans ostentation à la justice, le goût de l'étude, l'amour du bien et du beau, éclairé et tempéré par la raison, si le dévouement à l'amitié, aux lettres, au pays, peuvent mériter à quelqu'un le nom de sage, ce nom vous appartient et votre empressement à vous y dérober vous le confirme. Quelque chose eût manqué peut-être à votre vie si, après avoir joui en bon citoyen et surtout en philosophe, du triomphe trop court de la liberté parmi nous, vous n'aviez eu l'occasion de partager ses épreuves et de lui rester fidèle; mais les malheurs publics vous ont permis de montrer votre invariable attachement aux vrais principes de cette grande révolution dont vous avez si noblement raconté les débuts et dont le terme, hélas! échappe encore à tous les regards.

La consolation élevée que vous avez

cherchée dans la poursuite de vos sévères études, je l'ai rencontrée dans la lecture assidue de ce petit nombre de grands écrivains qui sont appelés, d'un consentement universel, les Moralistes français, et qui représentent en effet, avec autant de variété que d'éclat, le génie de notre pays appliqué à l'observation et à la peinture du cœur humain. Après avoir joui de leurs beautés je n'ai pu m'empêcher de les louer à mon tour, et j'ai ajouté, non sans défiance de moi-même, mon commentaire à tant de commentaires. Nul travail ne pouvait mieux me délasser des luttes inégales de la presse et d'un effort si longtemps stérile, quoique opiniâtre, pour la défense des intérêts publics et du bon droit. Si vous trouvez quelque plaisir à parcourir ces pages, si elles ne vous paraissent pas trop indignes des grands noms qu'on y rencontre et des

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