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FABLE IV.-(107.)

Jupiter et le Métayer.

Jupiter eut jadis une ferme à donner.
Mercure en fit l'annonce, et gens se présentèrent,
Firent des offres, écoutèrent:

Ce ne fut pas sans bien tourner;

L'un alléguoit que l'héritage

Étoit frayant et rude, et l'autre un autre si.
Pendant qu'ils marchandoient ainsi,

Un d'eux, le plus hardi, mais non pas le plus sage,
Promit d'en rendre tant, pourvu que Jupiter

Le laissât disposer de l'air,

Lui donnât saison à sa guise,

Qu'il eût du chaud, du froid, du beau temps, de la bise, Enfin du sec et du mouillé,

Aussitôt qu'il auroit bâillé.

Jupiter y consent. Contrat passé, notre homme
Tranche du roi des airs, pleut, vente, et fait en somme
Un climat pour lui seul : ses plus proches voisins
Ne s'en sentoient non plus que les Américains.
Ce fut leur avantage : ils eurent bonne année,
Pleine moisson, pleine vinée.

Monsieur le receveur fut très-mal partagé.
L'an suivant, voilà tout changé :
Il ajuste d'une autre sorte
La température des cieux.

LIVRE VI, fable IV.

Son champ ne s'en trouve pas mieux :
Celui de ses voisins fructifie et rapporte.
Que fait-il? Il recourt au monarque des dieux;
Il confesse son imprudence.

Jupiter en usa comme un maître fort doux.

Concluons que la Providence

Sait ce qu'il nous faut mieux que nous.

GRECS. Es.-Cor., 265; II 265.

9

LATINS. R. Holch., lect. 9; J. Her., serm. 108; J. Raul., de pœnit., serm. 39; Abst., 2; Faern., 93; Grat. a Sto Elid, 10.

FRANÇAIS. Desm., 1; Guill. Haud., 269.

ITALIENS. Ces. Pav., 104; Guicc., p. 149; Verdizz., 99.

FABLE V.—(108.)

Le Cochet, le Chat, et le Souriceau.

Un souriceau tout jeune, et qui n'avoit rien vu,
Fut presque pris au dépourvu.

Voici comme il conta l'aventure à sa mère.

J'avois franchi les monts qui bornent cet état,
Et trottois comme un jeune rat
Qui cherche à se donner carrière,
Lorsque deux animaux m'ont arrêté les yeux :
L'un doux, bénin et gracieux :
Et l'autre turbulent, et plein d'inquiétude;
Il a la voix perçante et rude,

Sur la tête un morceau de chair,
Une sorte de bras dont il s'élève en l'air
Comme pour prendre sa volée,
La queue en panache étalée.

Or c'étoit un cochet dont notre souriceau
Fit à sa mère le tableau

Comme d'un animal venu de l'Amérique.
Il se battoit, dit-il, les flancs avec ses bras,
Faisant tel bruit et tel fracas,

Que moi, qui, grâce aux dieux, de courage me pique,
En ai pris la fuite de peur,

Le maudissant de très-bon cœur.
Sans lui, j'aurois fait connoissance

LIVRE VI, Fable v.

Avec cet animal qui m'a semblé si doux :

Il est velouté comme nous,

Marqueté, longue queue, une humble contenance,
Un modeste regard, et pourtant l'œil luisant.
Je le crois fort sympathisant

Avec messieurs les rats: car il a des oreilles

En figure aux nôtres pareilles.

Je l'allois aborder, quand d'un son plein d'éclat
L'autre m'a fait prendre la fuite.

Mon fils, dit la souris, ce doucet est un chat,
Qui, sous son minois hypocrite,

Contre toute ta parenté

D'un malin vouloir est porté.

L'autre animal, tout au contraire,

H

Bien éloigné de nous mal faire, Servira quelque jour peut-être à nos repas. Quant au chat, c'est sur nous qu'il fonde sa cuisine.

Garde-toi, tant que tu vivras,

De juger des gens sur la mine.

GRECS. Es.-Camer., 394, 328.

fer. 4;

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LATINS. Anon. vet. inéd. (Manusc. de la biblioth. du Roi, 7616) 63; Phil., 9; Abst., 65; Morl., 14; Barl., serm. quadr. hebd. Jac. de Lend., fol. 29.

FRANCAIS. YsOp. 1, 63; R. Gob.; Guill. Haud., 231; Bens., 117. ITALIENS. Al. Cinth., prov. 22, cant. 1; Verdizz., 21.

ESPAGNOLS. C. G. Tej., fol. 319.

ALLEMANDS. Minn.-Zing., 43.

ANON. VET. INED.

De Gallo et Mure.

Mus genuit murem; dogmatizavit eamdem :
Filia pulchra mihi, dogmata disce patris;
Cùm procu! exieris lustrura foramine nostro,
Occurrenti tibi militi fide probo;
Miles adest gallus armatus cuspide rostro.
Orans in cinere balbitat ipse catus,
Sis secum: tibi non sit formidine miles.

Subdolus hypocrita te vorat ipse catus ;
Hypocritis adhibenda fides non est neque fictis.
| Multis mellita verbula sæpè nocent :
Dissimulare student conceptum mente venenum.
Duplicibus verbis sæpè venena fovent.

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