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duisent au milieu des mêmes conditions d'existence. Les différences de formes qui apparaissent ne correspondent jamais à des propriétés physiologiques évidemment plus favorables que les précédentes. Elles reposent essentiellement sur de faibles différences qui ne s'accusent que peu à peu, dans la structure anatomique et la situation réciproque des ramures. Chez ces organismes élémentaires, la lutte pour l'existence se réduit à une lutte pour conserver leur place. Le seul point qui aurait ici quelque importance, la diversité, le nombre, l'aptitude à se conserver des formes de la reproduction, n'explique nullement d'une manière évidente la constance de la direction que la série a suivie dans son développement. L'observation de cette série et d'autres semblables de plantes inférieures ne permet pas de méconnaître que les premières modifications de la forme, dans ces organismes très-élémentaires, sont de nature purement morphologique, c'est-à-dire qu'elles n'ont aucun rapport à une fonction physiologique quelconque, laquelle serait importante pour la conservation de l'existence. L'existence de ces séries d'espèces, qui ne se distinguent que par des caractères morphologiques, me paraît trancher d'une façon décisive la question de l'origine des espèces. Pour ne parler ici que des algues, est-ce que les séries des Protococcacées, des Palmellacées, des Desmidiacées, des Diatomées, des Conferves, des Ulothrithées, des Céramiées, des Polysphoniées, ne sont pas différenciées par de purs caractères morphologiques, en contradiction flagrante avec la doctrine darwinienne? Pourtant, on observe dans toutes ces séries un développement des formes, qui va toujours du simple au composé, ou, si l'on veut, du moins parfait au plus parfait? Ces séries inférieures.purement morphologiques prouvent évidemment que la lutte pour l'existence ne suffit pas seule à expliquer l'accumulation des différences morphologiques dans la direction, constante à travers la création entière, du simple au composé. Cette lutte suppose même nécessairement que les variétés naissantes ont une constitution physiologique plus favo

rable; et que ces propriétés favorables s'accumulent dans la direction préférée. Mais, dans le développement des séries d'espèces ces conditions font défaut à la production des différences purement morphologiques des végétaux inférieurs. Ici les forces intimes, directrices, qui accumulent les différences progressives dans la direction préférée, se manifestent avec toute leur pureté, et agissent indépendamment de la lutte pour l'existence; et leur action se révėle par des phénomènes incontestables. »

Page 307, ligne 5.

Un autre zoologiste, Moritz Wagner, est, comme Kölliker partisan de la théorie de la descendance; mais, en même temps, il regarde la théorie de la sélection non-seulement comme insuffisante, mais encore comme erronée et tout à fait sans valeur. L'opposition est ici sans doute portée trop loin. Mais les arguments de Wagner contre l'application excessive que fait Darwin de la théorie de la sélection méritent certainement l'attention. Wagner les a rassemblés dans divers essais, et récemment encore dans l'Ausland (1875, mai à juillet). Ses conclusions sont que la séparation locale d'un ou de quelques individus d'avec ceux de leur espèce ne sert pas seulement à favoriser, comme Darwin aussi l'admet, la formation d'une espèce nouvelle, mais est la condition indispensable, et en même temps la raison suffisante de cette transformation. Si Wagner avait raison de soutenir que le retour de la variété produite et sa disparition au sein de l'espèce maternelle, par l'effet du croisement, ne peut être prévenue que par la séparation locale d'un ou de plusieurs couples du reste de l'espèce (et cela en tout cas n'est pas encore démontré), la séparation ne serait toujours que la condition, mais jamais la cause de l'apparition de l'espèce nouvelle. La question relative à la cause qui produit véritablement ces variétés importantes au sein des individus séparés, et dont les effets ne se conservent que par la sépa

ration locale, serait aussi peu résolue qu'auparavant. Les exemples apportés par Wagner sont de telle nature que recourir pour les expliquer au principe posé par Geoffroy de l'action des circonstances extérieures différentes sur l'organisme, réussit encore moins ici, qu'en appeler comme Darwin à la sélection. Wagner lui-même, pour compléter sa théorie de la séparation locale et la rendre applicable en fait, est obligé de reconnaître « des forces internes, directrices », ou une « tendance inhérente au développement, c'est-à-dire un principe organisateur qui détermine le sens de la variation.

Page 308, ligne 20.

L'hypothèse que j'émettais ici a trouvé sa confirmation dans la découverte du pharmacien de marine A. Bavay sur les roches volcaniques de l'île de la Guadeloupe. Une espèce de petites grenouilles (hylodes martinicencis), que l'on y rencontre en quantités considérables, ne trouvant pas de marais et d'eaux douces pour vivre de la vie d'un tétard, accomplit simplement dans l'œuf la phase de son évolution comme tétard et sort de l'œuf à l'état de petite grenouille toute formée mais sans queue (Naturforscher, 1873, no 17). Dans ce cas spécial, la métamorphose est renvoyée à la période de la vie embryonnaire, mais ne conduit au développement d'aucun organisme supérieur. L'exemple nous aide du moins à entendre par analogie comment les reptiles, d'où sont sortis les ordres supérieurs du règne animal, ont pu naître de salamandres.

Page 310, à la fin.

Comparez à ce chapitre mon écrit: Vérité et erreur dans le Darwinisme. Exposition critique de la théorie de la descendance. Traduit chez Germer-Baillière, 1876.

Page 313, ligne 23.

(Voir mes Éclaircissements à la métaphysique de l'Inconscient, page 52-57.)

Page 324, ligne 27.

(Rapprochez de ce chapitre mes Éclaircissements à la métaphysique de l'Inconscient, p. 57-74.)

Page 354, ligne 14.

Et dans A. Taubert le Pessimisme et ses adversaires (Berlin, chez C. Duncker, 1873), page 70-76. L'Hégélianisme lui-même n'est pas hostile au pessimisme, et le comprend comme l'une des phases de l'évolution universelle. On peut seulement lui reprocher de voir écraser sans pitié et avec trop d'indifférence sous les roues d'airain du char du progrès les destinées sans nombre des individus; mais il reconnaît que toute existence finie est condamnée à la loi douloureuse de se détruire elle-même par ses propres contradictions: c'est ce que Volkelt a très-habilement mis en lumière dans l'Inconscient et le Pessimisme, page 246-255.

Page 362, à la fin.

(Voir, en outre, Taubert, le Pessimisme et ses adversaires, n° II: Le prix de la vie et la façon dont on la juge ».

Page 364, au bas.

(Voir Taubert, le Pessimisme, page 27-28.)

Page 366, ligne 35.

Ou si réellement une volonté inconsciente devait exister,

elle serait toujours trop faible pour que ses contrariétés soient senties; et l'on doit conclure de là que ce degré de volonté doit surtout être bien trop faible, pour que ses satisfactions soient remarquées.

Page 380, ligne 6.

Rapprocher de ce passage le chapitre III du Pessimisme de Taubert: « sur les biens privatifs et sur le travail ».

Page 395, ligne 2..

(Voir aussi 1er vol; page 267, ligne 26.) La conciliation de l'instinct avec les conceptions philosophiques de la conscience éclairée par le monisme ne peut être tout d'abord qu'un postulat théorique, qui ne doit être réalisé au point de vue pratique que par un combat perpétuel, par une lutte morale contre les résistances toujours renouvelées de l'égoïsme. La conciliation, que promet la philosophie, à savoir la moralisation de l'instinct naturel, n'est pas un résultat conquis une fois pour toutes, un bien dont la possession ne sera plus après troublée et disputée. Elle exige de la raison de l'UnTout inconscient, après qu'elle aura été élevée à la conscience, une lutte incessante contre l'égoïsme nécessaire de l'individualité naturelle. Cette lutte seule, si elle est soutenue avec une énergie infatigable et favorisée par les dispositions du caractère, peut conduire à l'harmonie et à l'habitude de la vertu. Mais ce n'est pas là l'état ordinaire de la conscience humaine de notre temps, pas plus que la disposition à se sacrifier naïvement, absolument à l'instinct de la nature. L'état normal est plutôt le conflit de la conscience individuelle et de son égoïsme avec les exigences de la raison instinctive et philosophique, qui vont bien au delà des intérêts de l'individu : soit que cette opposition ne se montre qu'en germe dans l'innocence naïve de l'état de nature, soit qu'elle apparaisse déjà développée et présente le caractère d'un conflit en apparence insoluble, soit enfin que la conscience

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