Je conviens que ce titre eft applicable indiftin&tement au grand nombre de ceux qui parlent fans entendre; au petit nombre de

ceux qui entendent fans parler; & au très-petit nombre de ceux qui favent parler & entendre; quoique ma Lettre ne foit guere qu'à l'usage de ces derniers.

. Je conviens encore qu'il eft fait à l'imitation d'un autre qui n'est pas trop bon:

mais je fuis las d'en chercher un meilleur (*). Ainsi

de quelque importance que

vous paroiffe le choix d'un titre, celui de ma Lettre reftera tel qu'il est.

Je n'aime guere les citations; celles du grec moins que les autres: elles donnent à un ouvrage l'air scientifique, qui n'eft plus chez nous à la mode. La plupart des

(*) Lettre fur les Aveugles, à l'ufage de ceux qui voient.

Lecteurs en font effrayés;

& j'ôterois d'ici cet épouvantail, fi je penfois en Libraire; mais il n'en eft rien: laiffez donc le grec par-tout où j'en ai mis. Si vous vous fouciez fort peu qu'un ouvrage foit bon, pourvu qu'il fe life; ce dont je me foucie moi, c'eft de bien faire le mien, au hafard d'être un peu moins lu.

Quant à la multitude des objets fur lesquels je me

S

plais à voltiger, fachez &

apprenez à ceux qui vous

confeillent, que ce n'eft

point un défaut dans une

lettre, où l'on eft cenfé con

verfer librement, & où le dernier mot d'une phrase eft une transition fuffifante.

Vous pouvez donc m'imprimer, si c'est là tout ce qui vous arrête; mais que ce foit fans nom d'Auteur, s'il vous plaît; j'aurai toujours le temps de me faire

connoître. Je fais d'avance à qui l'on n'attribuera pas mon Ouvrage; & je fais bien encore à qui l'on ne manqueroit pas de l'attri

buer, s'il y avoit de la fin

gularité dans les idées, une

certaine imagination, du

ftyle, je ne fais qu'elle har

dieffe de penfer que je ferois bien fâché d'avoir, un étalage de Mathématiques, de Métaphyfique, d'Italien, d'Anglois, & sur-tout moins