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moins certains, felon que

les hypo

thefes dont on eft parti font plus ou moins compliquées. Lorfque le calcul eft fondé fur une hypothefe fimple, alors les conclufions acquierent la force de démonftrations géométriques. Lorfqu'il y a un grand nombre de fuppofitions, l'apparence que chaque hypothese foit vraie, diminue en raison du nombre des hypotheses; mais augmente d'un autre côté par le peu de vraisemblance que tant d'hypothefes fauffes fe puiffent corriger exactement l'une l'autre, & qu'on en obtienne un résultat confirmé par les phénomenes. Il en feroit en ce cas comme d'une addition dont le résultat feroit exact, quoique les fommes partielles des nombres ajoutés euffent toutes été prifes fauffement. On ne peut difconvenir qu'une telle opéra

tion ne foit poffible, mais vous voyez en même-temps qu'elle doit être fort rare. Plus il y aura de nombre à ajouter, plus il y aura d'apparence que l'on fe fera trompé dans l'addition de chacun; mais auffi moins cette apparence fera grande, fi le résultat de l'opération eft jufte. Il y a donc un nombre d'hypothefes tel, que la certitude qui en réfulteroit feroit la plus petite qu'il eft poffible. Si je fais A, plus B, plus C, égaux à 50, conclurai-je de ce que 50 eft en effet la quantité du phénomene, que les fuppofitions repréfentées par les lettres A, B, C, font vraies? Nullement; car il y a une infinité de manieres d'ôter à l'une de çes lettres & d'ajouter aux deux autres, d'après lefquelles je trouverai toujours 50 pour résultat; mais le cas de trois hypothefes combinées, est

peut-être un des plus défavorables.

Un avantage du calcul que je ne dois pas omettre, c'eft d'exclure les hypothefes fauffes, par la contrariété qui fe trouve entre le réfultat & le phénomene. Si un Phyficien se propofe de trouver la courbe que fuit un rayon de lumiere en traverfant l'athmofphere, il eft obligé de prendre fon parti fur la denfité des couches de l'air, fur la loi de la réfraction, sur la nature & la figure des corpufcules lumineux, & peut-être fur d'au tres élémens effentiels qu'il ne fait point entrer en compte, foit parce qu'il les néglige volontairement, foit parce qu'ils lui font inconnus; il détermine enfuite la courbe du rayon. Eft-elle autre dans la nature que fon calcul ne la donne ? fes fuppofitions font incomplettes ou fauffes: le rayon prend-il

prend-il la courbe déterminée? il s'enfuit de deux chofes l'une, ou que les fuppofitions fe font redreffées, ou qu'elles font exactes; mais lequel des deux ? il l'ignore : cependant voilà toute la certitude à laquelle il peut arriver.

J'ai parcouru les élémens d'algebre de Saunderfon, dans l'efpérance d'y rencontrer ce que je défirois d'apprendre de ceux qui l'ont vu familiérement, & qui nous ont inftruits de quelques particularités de fa vie; mais ma curiofité a été trompée, & j'ai conçu que des élémens de Géométrie de fa façon auroient été un ou vrage plus fingulier en lui-même, &z beaucoup plus utile pour nous. Nous y aurions trouvé les définitions du point, de la ligne, de la furface, du folide, de l'angle, des intersections

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des lignes & des plans, où je ne doute point qu'il n'eût employé des principes d'une Métaphyfique très-abftraite & fort voifine de celle des Idéalistes. On appelle Idéaliftes ces Philofophes qui, n'ayant confcience que de leur existence & des fenfations qui fe fuccedent au-dedans d'eux-mêmes, n'admettent pas autre chofe : fyftême extravagant, qui ne pouvoit, ce me semble, devoir fa naissance qu'à des aveugles; fyftême qui, à la honte de l'efprit hu main & de la Philofophie, eft le plus difficile à combattre, quoique le plus abfurde de tous. Il eft exposé avec autant de franchise que de clarté dans trois Dialogues du Docteur Berkeley, Evêque de Cloyne; il faudroit inviter l'Auteur de l'Effai fur nos connoiffances, à examiner cet ouvrage : il y trouveroit matiere à des obferva

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