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mais encore assez respecter le public pour ne l'entretenir que de choses qui peuvent intéresser un lecteur honnête et sepsé.

Les Anciens sont nos maîtres dans l'art d'écrire l'histoire. Supérieurs en ce genre aux meilleurs historiens modernes, ils ont en général la marche plus libre, plus noble, plus naturelle, des transitions plus heureuses dans le récit et l'enchaînement des faits; plus de sagesse, de gravité, de nerf, et enmême-temps de simplicité dans la diction; des traits plus frappans, d's coups de pinceau plus vigoureux dans la peinture des mœurs et des caractères. Il serait trop long de faire connaître ici tous les bons historiens, tant anciens que modernes. Je vais seulement indiquer les principaux, soit grecs, soit latins, soit français.

Historiens grecs. Hérodote, né à Halicarnasse, capitale de la Carie, dans l'Asie mineure, vers l'an 484 avant Jésus-Christ, a été appelé le Père de l'his toire, parce qu'il a été le premier qui l'ait écrite. Mais il l'a défigurée par une foule d'oracles menteurs et de contes puériles: c'est ce qui lui a fait donner aussi le nom de Père du mensonge. Son ouvrage contient, outre l'histoire des guerres des Perses contre les Grecs, depuis le règne de Cyrus jusqu'à celui de

Historiens

en ce genre.

Xerces; celle de la plupart des autres nations. Il passa dans la Grèce, se rendit à Pise, pendant qu'on y célébrait les jeux olympiques, et y lut son histoire. Elle fut si applaudie, qu'on donna le nom des neuf muses aux neuf livres qui la composent. La narration d'Hérodote est en effet coulante, le style plein de grâces, de douceur et de noblesse. Le savant Larcher a donné une fort bonde traduction de cette histoire, qu'il a enrichie d'excellentes notes.

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Diodore de Sicile, ainsi appelé parce qu'il était né (environ soixante ans avant Jésus-Christ) à Agyre, ville de Sicile, avait fait une Bibliothèque historique divisée en quarante livres, dont quinze seulement nous sont parvenus avec quelques fragmens. Cet ouvrage comprenait l'histoire des Egyptiens, des Syriens, des Mèdes, des Perses, des Grecs, des Romains et des Carthaginois. Le style en est simple et grave. Mais on accuse cet auteur de n'être pas toujours exact et impartial. L'abbé Terrasson l'a fidèlement traduit.

Thucydide, né à Athènes l'an 475 avant Jésus-Christ, en entendant lire l'histoire d'Hérodote aux jeux olympiques sentit naître, dit-on, son talent pour ce genre d'ouvrage. Il écrivit en effet l'Histoire de la guerre du Péloponèse, qu'il ne conduisit que jusqu'à la vingt

unième année. C'est le plus parfait de tous les historiens grecs, soit pour la manière de raconter, soir pour l'exactitude des faits, soit pour la noblesse, la chaleur et la précision du style: presque tous ses mots, suivant Cicéron, sont des sentences. Il a été traduit par d'Ablancourt.

Xénophon, né à Athènes, vers l'an 450 avant Jésus-Christ, publia l'histoire de Thucydide, et la continua sous le titre d'Histoire grecque, jusqu'à la bataille de Mantinée. Nous avons aussi de lui la Cyropédie, ou Histoire de Cyrus, ainsi ́que l'Histoire de l'expédition de Cyrus le jeune, et de la mémorable Retraite des Dix-mille. Il charme par la pureté, la douceur, et tous les agrémens de la diction. Les Grecs lui donnèrent les surnoms d'Abeille grecque, et de Muse athénienne. D'Ablancourt a traduit son Histoire grecque, et Dacier sa Cyropédie. Le premier a donné aussi une traduction de la Retraite des Dix-mille; mais elle est oubliée depuis que Larcher a publié la sienne.

Polybe, né à Mégalopolis, ville du Péloponèse, dans l'Arcadie, vers l'an 203 avant Jésus-Christ, fut du nombre de ces mille Achéens qui, durant, la guerre des Romains contre Persée, roi de Macédoine, furent emmenés à Rome. Il y avait composé, mais en grec, une

Histoire universelle, qui commençait aux guerres puniques, et finissait à celle de Macédoine. Elle était divisée en quarante livres, dont il ne nous reste que les cinq premiers, avec des extraits de quelques endroits des autres. On en trouve le style un peu négligé. Mais cet écrivain est généralement regardé comme un des plus judicieux de l'antiquité. Il paraît s'être principalement proposé, dans son histoire, de former des politiques et des militaires. Don Thuilier en a donné une traduction, qui était presque ignorée, lorsque le chevalier Folard la tira de l'oubli, en y ajoutant un excellent commentaire. C'est un corps de science militaire, enrichi de notes historiques et critiques, où toutes les grandes parties de la guerre sont expliquées et démontrées.

Je dois remarquer ici que les militaires ne sauraient lire avec trop de réflexion Thucydide, Xénophon et Polybe. Ces écrivains étaient eux-mêmes de très-bons généraux, et la description qu'ils font des batailles, en hommes du métier, ne peut que donner les plus grandes connaissances de l'art de la guerre. Le lecteur est conduit, c mme par la main, dans les siéges et les combts qu'ils décrivent. Les ruses, les stra-. tagèmes, les fausses marches, les attaques vraies ou simulées, les campemens, les

décampemens, rien n'échappe à ces capitaines historiens. Tout est présenté sous le point-de-vue le plus favorable pour faire naitre ou perfectionner les idées.

Plutarque, né à Chéronée, dans la Béotié, vers l'an 50 de l'ère chrétienne, écrit avec force et avec clarté dans ses Vies des hommes illustres. Cet ouvrage est un chef-d'œuvre, et le plus propre, en ce genre, à former les hommes, soit pour la vie publique, soit pour la vie privée. Nous y voyons d'ailleurs les plus grands héros que Rome et la Grèce aient produits. Les comparaisons que fait l'auteur de ces Grecs et de ces Romains, sont d'une justesse et d'une sagacité d'esprit admirables. Nous avons quatre traduction de cet ouvrage, l'une d'Amyot, en vieux gaulois, qui offre encore un air de fraîcheur; l'autre de Tallemant, la troisième de Dacier, et la quatrième de l'abbé Ricard.

Pausanias, né à Césarée en Cappadoce, dans le deuxième siècle de l'ère chrétienne, a laissé un Voyage historique de la Grèce, où il avait fait un long séjour; ouvrage aussi instructif, par la vaste érudition dont il est rempli, qu'agréable par la description des objets et par la richesse du style. En faisant connaître la situation des lieux, les beautés de la nature et les monu. mens des arts, l'auteur nous trace l'ori

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