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C'est la cour du roi Pétaud.

Cela se dit d'une assemblée sans ordre et sans ascendant, d'une maison où tout le monde commande. Pétaud vient probablement du mot latin Peto, par lequel on désignait le roi ou chef des anciennes corporations de gueux et qui signifie Je demande. Ce roi avait peu de pouvoir sur ses sujets, et quand on voit combien il est parfois difficile à certains présidents de maintenir l'ordre dans de graves assemblées, on s'explique ce que pouvait être dans une réunion de gueux l'autorité du roi Pétaud.

De pétaud on a fait pétaudière pour désigner une assemblée confuse, en désordre, où chacun fait le maître.

Chic.

Ce mot s'emploie comme adjectif et comme substantif. On dit : C'est chic ou cela a du chic, d'une chose qui a un certain cachet d'habileté, de savoir-faire, d'élégance et d'originalité, d'une chose bien réussie et qui fait grand effet. C'est surtout des ateliers de peinture que l'usage de ce mot ainsi entendu s'est répandu dans le monde et s'y est fait une place, disputée d'abord, mais généralement reconnue aujourd'hui.

A l'origine il répondit surtout à l'idée de subtilité, et comme la subtilité se dit des choses délicates, finies et mignonnes, on l'a fait dériver du celtique chic ou de l'espagnol chico qui signifie petit.

L'idée de finesse attachée alors à ce mot en avait fait un terme de palais, familier aux avocats et aux huissiers. Là il a donné naissance à chicane et à chicaneurs, gens ergoteurs et pointilleux qui trouvent matière à discussion sous les prétextes les plus futiles,

Coiffer Sainte Catherine.

Cette locution veut dire rester vieille fille. Elle vient de la coutume, qu'on avait dans certains pays, d'habiller et de coiffer les statues des saintes qui se trouvaient dans les églises. Sainte Catherine, étant la patronne des vierges, c'est toujours à une jeune fille qu'était dévolu le soin de la parer. Cet honneur très agréable, quand on avait seize ans, n'était pas de ceux qu'on aimait à avoir toujours, et quand une demoiselle vieillissait, solitaire dans sa vertu, et était menacée de faire longtemps la toilette de sa patronne, on disait ironiquement: Elle restera pour coiffer Sainte Catherine.

Colin-Maillard.

C'est le nom d'un jeu où l'un des joueurs, les yeux bandés, cherche à attraper un des autres. Des grammairiens l'ont expliqué en disant que c'est un jeu où Colin cherche Maillard.

D'autres ont imaginé l'explication historique

suivante :

999.

Jean Colin Maillard est un guerrier du pays de Liège, qui fut fait chevalier par le roi Robert en Il doit son nom de Maillard à l'habitude qu'il avait de s'armer toujours d'un maillet pour le combat. Dans la dernière bataille, qu'il livra au comte de Louvain, Jean Colin eut les yeux crevés, et il continua de combattre guidé par ses écuyers.

Si c'est à ce souvenir historique qu'il faut rapporter la dénomination de ce jeu, le Colin-Maillard c'est l'enfant qui, les yeux bandés, cherche à saisir l'un des autres enfants qui fuient à son approche.

Colin-Tampon.

On dit familièrement: Je m'en moque comme de Colin-Tampon, d'une chose dont on ne se soucie pas, dont on fait fi. On fait remonter l'origine de cette expression à la bataille de Marignan, où François I infligea une grande défaite aux Suisses.

Colin-Tampon est l'onomatopée du bruit du tambour battant la marche des Suisses, et les Français, frappés de ce bruit qui annonçait la présence ou l'arrivée des Suisses, appelaient ceux-ci en manière de dérision des Colins-Tampons.

Compère-Loriot.

On appelle ainsi de petits abcès qui viennent sur les paupières et que leur ressemblance avec un grain d'orge a fait appeler proprement orgelets.

Le loriot est un oiseau d'un très beau jaune, auquel les anciens attribuaient la propriété d'attirer par les yeux les humeurs bilieuses, et de guérir en les regardant les personnes qui avaient la jaunisse. De cette superstition il n'y avait qu'un pas à faire pour croire que les personnes qui avaient de l'humeur aux yeux l'avaient reçue, comme l'oiseau, de quelque émanation morbifique, qu'elles avaient joué le rôle du Compère-Loriot. Du malade le nom passa au mal et s'est conservé dans la langue populaire.

Compère-Loriot est le nom vulgaire du loriot

commun.

Cordon bleu.

C'est l'expression, par laquelle on désigne communément une cuisinière qui sait bien son métier. Le cordon bleu était l'insigne de l'ordre du Saint-Esprit, institué par Henri III. C'était un

ordre exclusif; il ne comptait que cent membres. Etant une distinction particulière, le cordon bleu exprima bientôt l'idée d'un mérite supérieur, et l'on prit l'habitude d'appliquer ce mot à certaines personnes distinguées.

Cette comparaison fit si bien son chemin qu'elle alla jusqu'à la cuisine, et ce qu'il y a de plaisant, c'est que cette manière de désigner les célébrités culinaires survécut à toutes les autres d'employer par comparaison le terme de cordon bleu.

L'ordre du Saint-Esprit a été aboli; le cordon bleu ne sert plus dans le langage figuré à rappeler un grand mérite ou un grand nom, il n'y a plus d'autre cordon bleu qu'une bonne cuisinière.

Coup de Jarnac.

Donner à quelqu'un un coup de Jarnac, c'est lui faire un mauvais tour auquel il ne s'attendait pas, et qui le met en très mauvais état, qui le ruine, qui détruit sa fortune.

Cette expression eut cours après le fameux duel entre le Seigneur de Jarnac et La Chataigneraie. Dans ce duel Jarnac porta à son adversaire un coup au jarret, auquel celui-ci ne s'attendait pas et que n'autorisaient pas les règles du combat singulier. La Chataigneraie mourut à la suite de cette blessure.

Croquer le marmot.

Le sens de cette expression est attendre longtemps avant d'être reçu, bien plus longtemps qu'il n'est agréable.

On en a donné plusieurs explications. La plus généralement acceptée est celle-ci, qui parait avoir pris naissance dans l'atelier des peintres. L'ar

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tiste qu'on fait languir sur un escalier, dans un vestibule, dans une anti-chambre, pour tromper la longueur du temps, s'amuse à barbouiller, à croquer une petite figure de marmot contre la muraille.

Croquer c'est faire un croquis, et marmot est le masculin de marmotte, animal qu'on peut dresser à se tenir sur les pattes de derrière, ce qui a fait appeler par comparaison un petit enfant un marmot.

Etre sur un grand pied dans le monde.

C'est occuper une belle position, faire grande figure dans le monde. Geoffroy Plantagenet, comte d'Anjou, avait un pied difforme. Pour le cacher il porta un soulier très long. Les courtisans l'imitèrent et portèrent des souliers longs et recourbés.

Les grands souliers " à la poulaine" (du nom de Poulain, leur inventeur) devinrent au 14° siècle la mesure de la distinction. Les souliers d'un prince étaient plus longs que ceux d'un baron; celui-ci les avait plus longs qu'un chevalier et ainsi de suite. De là est venue l'expression très usitée encore: Etre sur un grand pied dans le monde.

Faire des châteaux en Espagne.

Faire des châteaux en Espagne c'est faire des projets chimériques, des rêves de fortune qui ne se réaliseront pas. En Espagne il n'y a pas de châteaux vouloir les honneurs ou la fortune qu'on n'a pas, c'est vouloir des châteaux en Espagne. Il parait que dans le temps, où les Maures faisaient de fréquentes excursions en Espagne, il était défendu de bâtir dans la campagne des châteaux,

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