Le vieil HORACE. Loin de blâmer les pleurs que je vous voi répandre ; Je croi faire beaucoup de m'en pouvoir défendre ; Et céderois peut-être à de fi rudes coups, Si je prenois ici même intérêt que vous. Non qu'Albe par fon choix m'ait fait haïr vos freres, Tous trois me font encor des perfonnes bien chéres; Mais enfin l'amitié n'eft pas de même rang, Et n'a point les effets de l'amour ni du fang. Je ne fens point pour eux la douleur qui tourmente Sabine comme fœur, Camille comme amante, Je puis les regarder comme nos ennemis ; Et donne fans regret mes fouhaits à mes fils. Ils font, graces aux dieux, dignes de leur patrie, Aucun étonnement n'a leur gloire flétrie ; Et j'ai vû leur honneur croître de la moitié, Quand ils ont des deux camps refusé la pitié. Si par quelque foibleffe ils l'avoient mendiée, Si leur haute vertu ne l'eût répudiée, Ma main bien-tôt fur eux m'eût vengé hautement De l'affront que m'eût fait ce mol confentement. Mais lorsqu'en dépit d'eux on en a voulu d'autres, Je ne le cele point, j'ai joint mes vœux aux vôtres. Si le ciel pitoyable eût écouté ma voix, Albe feroit réduite à faire un autre choix; Nous pourrions voir tantôt triompher les Horaces, Sans voir leurs bras fouillés du fang des Curiaces ; Et de l'événement d'un combat plus humain Dépendroit maintenant l'honneur du nom Romain. La prudence des dieux autrement en dispose, Sur leur ordre éternel mon efprit fe repose, Il s'arme en ce befoin de générofité ; Et du bonheur public fait fa félicité. Tâchez d'en faire autant pour foulager vos peines, Et fongez toutes deux que vous étes Romaines; Vous l'étes devenuë, & vous l'étes encor, Un fi glorieux tître eft un digne trésor, Un jour, un jour viendra que par toute la terre Rome fe fera craindre à l'égal du tonnerre; h Et que tout l'univers tremblant deffous fes loix, SCENE VI. Le vieil HORACE, SABINE, N Le vieil HORACE. Ous venez-vous, Julie, apprendre la victoire ? Mais plûtôt du combat les funeftes effets. Rome eft fujette d'Albe, & vos fils font défaits, Le vieil HORACE. O d'un trifte combat effet vraiment funefte ! Mille de nos remparts comme moi l'ont pû voir. Le vieil H ORACE. Et nos foldats trahis ne l'ont point achevé ! Je n'ai rien voulu voir après cette défaite. O mes freres ! CAMILLE. Le Le vieil HORACE. Tout beau, ne les plurez pas tous, Qu'ils ont vû Rome libre autant qu'ils ont vécu ; Que vouliez-vous qu'il fît contre trois ? Qu'il mourût, Ou qu'un beau défespoir alors le fecourût. SABIN E. Ecoutez un peu moins ces ardeurs généreuses; Sabine, votre cœur se console aisément, Vos Vos freres font vainqueurs quand nous fommes trahis ; [Le vieil Horace fort.] SABIN E. Suivons le promptement, la colere l'emporte. Fin du troifiéme acte. ACTE ACTE IV. SCENE PREMIERE: Le vieil HORACE, CAMILLE. NE Le vieil HORACE. E me parlez jamais en faveur d'une infame, Ah! Mon pere, prenez un plus doux sentiment, Le vieil HORACE. Le jugement de Rome eft peu pour mon regard, |