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nement ne doit pas être indéfini, les Juges doivent le fixer fimplement à une fomme qui faffe la fûreté du Regnicole.

Enfin, nous permettons au citoyen la voie d'Arrêt, pour dette incertaine & non liquide, & nous lui accordons la contrainte par corps contre l'étranger, dans les matieres ordinaires où un citoyen n'y feroit pas foumis (a).

XXII.
Les François qui

micile, qui fe ma

ger, & qui tranfleur fortune, per. dent les biens qu'ils poffedolent en France.

portent ailleurs

Les François qui changent de domicile fans efprit de retour, & qui transportent ailleurs leur fortune, se privent changent de dotellement de tous les droits civils dont ils jouiffoient dans rient en pays étran le Royaume, que non-feulement ils font exclus des fucceffions qui leur étoient échues, mais encore qu'il y a ouverture de fucceffion pendant leur vie, même en faveur de ceux qui n'y devoient être appellés qu'après leur mort (b), avec cette reftriction, que ces particuliers fortis du Royaume, changeant de volonté, & venant rétablir leur domicile en France, ils font admis aux fucceffions par droit de retour, pourvu que la demande n'en foit pas prefcrite par le laps de trente ans : relâchement de la loi fondé fur les droits de la nature qui ne s'efface pas facilement par la volonté des hommes.

Une Françoise qui prend un établissement fixe dans un pays 'étranger, devient elle-même étrangere. Elle eft réputée par là avoir renoncé pour jamais à fa patrie, & en adoptant celle de fon mari, elle adopte en même temps l'incapacité qui réfide en la perfonne du mari, de pouvoir, en aucun cas, fuccéder dans le Royaume. Cette maxime a lieu même à l'égard des Princeffes du Sang Royal; & l'Avocat Général Servin la posa dans une cause importante, dans laquelle il porta

(4) Les Actes publics & les Billets qui n'emportent point contrainte par corps en France, l'emportent, par exemple, dans tous les Etats de Terre-ferme du Roi de Sardaigne, lorfqu'on ne trouve ni meubles ni immeubles, à moins que le débiteur ne foit un pupille, une femme, qu un feptuagenaire. Voyez lart. 7. du Tit. 34. du liv. 3. du Code Victorien,

(b) Aubains font étrangers, qui font venus s'habituer dans ce Royaume, ou qui en étant natifs, s'en font volontairement étrangés. Loifel, Regl. 49. DD dd

Tome IV.

XXIII.

Ce que c'est que

en France.

la parole pour le Roi le 7 de Février 1602: Une fille même de Roi (dit ce Magistrat) étant mariée à un Prince étranger » perd le droit de cité, & conféquemment d'hérédité (a).

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Le François qui quitte fa patrie, qui paffe fous un Ciel étranger, qui y fixe fa demeure, perd les droits de cité, & fe trouve exclus de toutes les fucceffions en France. Ce font des plantes qui ont pris racine dans une autre terre, ce n'eft plus à notre Ciel à fournir la rofée néceffaire à leur accroiffement. Ce font des hommes qui ont paffé en la poffeffion d'autrui; & comme ils ont renoncé à nos Loix, ils ne doivent plus compter fur nos priviléges. Ils fe font voués à une domination étrangere, ils ne peuvent plus nous regarder comme nos concitoyens.

L'aubaine eft un droit qui acquiert au Roi Très-Chrétien le Droit d'Aubaine la fucceffion des étrangers qui meurent en France (b), fans enfans nés dans le Royaume: Se aucun aubain ou bâtard ( dit l'Ordonnance de S. Louis) muert fans hoir ou fans lignage li Roi eft hoir, ou li Sire fous qui il eft, fe il muert, el cuert du chaftel.

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Je dis fans enfans nés dans le Royaume, car les enfans d'un aubain nés en France lui fuccédent, & leur naiffance leur tient lieu de Lettres de naturalité. Un Auteur (c) nous apprend que, de fon tems, les enfans même de l'étranger ne lui fuccédoient point; mais cette rigueur a été modérée, & ne s'obferve plus que contre les enfans nés hors du Royaume ainfi que le prouvent les Regiftres du Parlement de Paris (d).

(a) Plaidoyer 55. des Mat. Royales & Seigneuriales, pag. 533. édit. de 1640. (b) Jus fuccedendi peregrino in univerfa bona quæ peregrinus habebat, tem pore mortis in Galliâ. Bacquet, dans fon Traité d'Aubaine.

(c) Benedicti, fur le Chapitre Raynutius.

(d) J. Du Luc, au titre de Statu hominum; & d'après lui Le Bret, de la Sou veraineté du Roi, p. 222. de l'édition de 1632.

Ce droit fondé fur ce que l'étranger qui vit libre en France, y meurt comme ferf, n'eft pas feulement le droit de la France, c'est celui de tous les Etats, qui n'ont pas jugé à propos d'y renoncer ; & il eft fi ancien pour chaque Etat, que les Empereurs Romains en jouiffoient (a). Le Roi de Sardaigne jouit de ce droit, qu'il appelle en fa langue Ubena, comme nous l'appellons Aubaine dans la nôtre (b). L'Allemagne qui contient environ cent cinquante Souverainetés, ne forme qu'une feule République dont tous les fujets font concitoyens ; & néanmoins plusieurs Princes Allemands ont un droit de Wildfang (c). C'eft en Allemagne un droit qu'a le Souverain du lieu de fuccéder, en cas de mort, aux étrangers qui n'ont point de maître qui les reclame, aux bâtards, & aux vagabonds, dans tous les biens meubles & immeubles fans exception, quand ils n'en ont pas difpofés par un teftament légitime. Il fuccede aussi par ce même droit, à tous ceux qui meurent fans héritier.

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Les Auteurs François font partagés en différentes opinions fur l'origine de l'aubaine (d). Les uns difent que le droit d'aubaine fut introduit en France en haine des Anglois (e), parce qu'Edouard III fit défenses aux François d'habiter dans ses Etats fous peine de la vie (f). Les autres prétendent que ce droit eft auffi ancien que la Loi Salique. D'autres difent qu'il est venu des Lombards, & citent une Loi de ce peuple, qui défendoit à l'étranger, quand il n'avoit point d'enfans légitmes

(a) Le mot Latin Peregrinitas avoit la même fignification que notre mot François Aubaine.

(b) Nous déclarons pour incapables de fuccéder à nos Sujets, tant dans les Fiefs que dans les biens Allodiaux, foit par teftament, ab inteftat, ou par quelque autre acte de derniere volonté que ce puiffe être, les étrangers de quelque état, qualité, ou conditions qu'ils foient, qui n'habitent pas dans nos Etats, de même que ceux lefquels y ayant leur habitation, n'auront pas obtenu des Lettres de Naturalité. Code Victorien de 1729, lib. 6. Tit. 12, della Legge d'Ubena, art. 2. (c) Voyez, dans l'Introduction, l'article de la République Germanique, Tom. II. (d) Albinatus.

(e) Les Anciens appelloient Albion l'Ile de la Grande-Bretagne. (f) Fait rapporté par Polidore Virgile.

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d'aliéner fes biens, fans la permiffion du Roi (a). Quelquesuns (b) penfent que le droit d'aubaine tire fon origine de ce qui arriva vers le commencement de la troifieme race de nos Rois, lorfque les Seigneurs, après avoir ôté la liberté à leurs vaffaux, la ravirent auffi aux aubains qui vinrent dans leurs terres, d'où il arriyoit que les fucceffions des vaffaux morts fans enfans légitimes nés dans le Royaume, appartenoient aux Seigneurs. Ceux qui font de cette opinion disent, que nos Rois jugerent à propos dans la fuite d'unir à leur Couronne ce droit important, & qui étoit d'autant plus jufte, qu'il n'y a jamais eu qu'eux qui ayent pû accorder des Lettres de naturalité (c). Quelques autres enfin (d) font de ce fentiment, que le droit d'aubaine a été introduit en France par le Teftament de Charlemagne, & par celui de Louis le Débonnaire, parce que ces deux Souverains qui partagerent leur Empire entre leurs enfans, les y réferverent aux fucceffions l'un de l'autre, & ordonnerent que tous les fujets de ces jeunes Princes fe fuccéderoient auffi les uns aux autres, comme fi l'Empire n'eût pas été divifé. Je ne vois pas pourquoi les Ecrivains qui font de cette derniere opinion, n'ont pas fait remonter l'origine du droit d'aubaine à l'Empire Romain, au lieu de se borner à fe l'Empire François que fonda Charlemagne. La clause insérée dans le Teftament de Charlemagne, & dans celui de Louis le Débonnaire, fuppofe que, cette claufe ceffant, les fujets des deux Etats n'auroient pas hérité les uns des autres ; & cette fuppofition n'eft pas gratuite, puifque les biens des étrangers & ceux des ôtages donnés par les Traités faits avec les

a) Loix des Lombards, L. 3. Tit. 15:

(b) Lauriere, dans fes notes fur Ragueau.

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(Les preuves de cette opinion fe tirent d'un Cartulaire de Philippe Augufte; de l'ancien Coutumier de Champagne; & des Ordonnances de Charles VI. Voyez Lauriere, ubi fuprà.

(d) Brodeau fur Louet.

ennemis étoient dévolus aux Empereurs Romains (a), & que les ôtages ne pouvoient tefter fans la permiffion des Empereurs (b). Qu'est-ce que cette confifcation, fi ce n'eft le droit d'aubaine?

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France,

Ecoliers, des Miniftres publics; & fi

les souverains droit étrangers en que

Les écoliers étrangers ne font pas foumis au droit d'aubaine (c), ils en ont été difpenfés en faveur des fciences, dont l'empire fpirituel s'étend par tout l'univers, & n'a bornes que l'ignorance & la barbarie (d). Le bénéfice de cette remise ne va pas jufqu'à faire participer l'étranger au civil du pays, ce feroit faire trop de violences aux regles ordinaires; mais de faire ceffer l'autorité de la Loi du pays fur fes effets mobiliaires, après la mort de la perfonne, pour les remettre à la difpofition des Loix de fon propre pays, où il devoit naturellement les faire repaffer.

Les habitans du Languedoc, & ceux de la ville de Bordeaux, ont obtenu un semblable privilége en faveur des étrangers qui vont s'établir chez eux. Dans ces pays là, les étrangers peuvent tefter. Ç'a été une faveur accordée au commerce par Louis XI, fçavoir pour la ville de Toulouse & tout le Languedoc, par des Lettres de l'an 1475 (e); & pour la ville de Bordeaux, par des Lettres de l'an 1474 (f). Ces priviléges ont été confirmés par des 'Arrêts des Tribunaux de France (g). Deux Auteurs François (h) attribuent le même privilége à la ville de Lyon, & (a) Divus commodus obfidum bona ficut & captivorum omni modo in fifcum effe cogenda refcripfit. Ulp. L. 31. ff. de Jure fifci.

(b) Leg. 11. Qui Teftamenta facere poffunt. Tacite, Polybe, Appien, Libiques. (c) Edit de 1315 conforme à l'Ordonnance de Frédéric en l'Auth. Habita, C. Ne fil. pro patre.

(d) Rebuffe, Bugnyon, Le Bret, Traité de la Souveraineté du Roi, p. 228; Bacquet, Traité du Droit d'Aubaine, Part. I. Ch. 13. & 14.

(e) Elles font tranfcrites à la fin du premier Livre du franc- Alleu de Languedoc, par Cafeneuve.

(f) Elles font auffi tranfcrites à la fuite de la Décifion 13. de Boërius.

(g) Ils font rapportés par La Roche-Flavin, l. 4. Tit. 5. Lettre T. art. 5'. & l. 6: Tit 9; par Maynard, l. 4. Ch. 57 ; & par Cambolas, 1. 5. Ch. 49.

(h) Gui Coquille, en fon Commentaire fur la Coutume de Nivernois, Tit. des 'Succeffions, article 24; & Philbert Bugnyon, en fon Traité des Loix abrogées, fiv. 1. art. 7.

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