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oppofée à la premiere, elle y fera dans le fonds entiére>ment conforme, puifqu'elles dépendront toutes deux de » ce principe: Le Jalut du peuple eft la fuprême Loi. J'ai dit qu'un grand Etat devenu acceffoire d'un autre, s'affoiblif» foit & même affoibliffoit le principal. On fçait que l'Etat » a intérêt d'avoir fon Chef chez lui, que les revenus publics » foient bien adminiftrés; que fa monnoye ne forte point » pour enrichir un autre pays. Il eft important que celui qui » doit gouverner ne foit point imbu de maximes étrange» res; elles conviennent moins que celles qui font déja éta»blies d'ailleurs, les hommes tiennent prodigieufement à » leurs Loix & à leurs Coutumes, elles font la félicité de » chaque Nation; il eft rare que l'on les change fans de grandes fecouffes & une grande effufion de fang, comme les Hiftoires de tous les pays le font voir. Il fuit de-là, » que, si un grand Etat a pour héritier le poffeffeur d'un grand Etat, le premier peut fort bien l'exclure, parce qu'il est » utile à tous les deux Etats que l'ordre de fucceffion foit changé. Ainfi, la Loi de Russie faite au commencement du » regne d'Elizabeth, exclut-elle très-prudemment tout héritier qui poffederoit une autre Monarchie; ainfi, la Loi de Portugal réjette-t-elle tout étranger qui feroit appellé à la Couronne par le droit du fang. Que fi une Nation peut exclure, » elle a, à plus forte raifon le droit de faire renoncer. Si elle craint qu'un certain mariage n'ait des fuites qui puiffent lui » faire perdre son indépendance ou la jetter dans un partage, » elle pourra fort bien faire renoncer les Contractans, & ceux qui naîtront d'eux, à tous les droits qu'ils auroient fur elle; >> celui qui renonce & ceux contre qui on renonce, pourront d'autant moins fe plaindre, que l'Etat auroit pu faire une pour les exclure (a).

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Loi

(a) De l'Esprit des Loix. Liv. 26. Ch, 13. pag. 164. de la II. partie, Genève 17496

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LXVII.
Le Prince doit

executer les pro-
meffes, les Con-
trats, & les autres

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Des engagemens que le Souverain prend avec fes Sujets ou avec les Sujets des autres Princes, & de ceux qu'avoit pris fon Prédécesseur.

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que

N Prince qui joue avec un particulier, ne doit pas moins obferver lui toutes les loix du jeu : dès qu'il conventions qu'il joue avec lui, il devient fon égal pour le jeu feulement. fait avec les Sujets. Dans toutes les affaires qu'un fupérieur & un inférieur ont ensemble, indépendamment de la relation de supériorité, le droit d'égalité a lieu comme entre des perfonnes égales. II eft même des cas où celui qui eft fupérieur, à certains égards, fe trouve inférieur à d'autres ; & alors le droit de fupériorité change par rapport aux mêmes perfonnes, felon la nature des choses. C'est ainfi qu'un Magiftrat qui doit honorer fon pere & sa mere & se soumettre par conféquent, jufqu'à un certain point, à leur volonté, en tout ce qui ne regarde point les affaires publiques, eft non feulement difpenfé d'avoir aucun égard à l'intention de fes parens, mais qu'il peut encore foumettre fes parens à la fienne, en tout ce qui a rapport à l'adminiftration publique (a). C'est fur ce principe qu'il faut examiner la question, fi les Souverains ont quelque privilége particulier pour ne pas exécuter les Contrats & les conventions qu'ils font avec leurs Sujets, & pour ne pas remplir les engagemens qu'ils prennent avec

eux.

Les conventions que les Souverains font avec leurs Sujets font foumises aux Loix des Contrats que les Citoyens font (4) Voyez le Traité du Droit des Gens. Chap. IV. Sect. V.

entre eux, parce que la Loi naturelle oblige les Princes comme les Sujets à garder leur foi. Les Souverains font d'autant plus obligés de garder la leur, que la fource de leurs engagemens a été plus libre, & que leur puiffance exclud toute forte de contrainte. Dieu lui-même, toujours indépendant & toujours fidéle dans fes promeffes, eft lié par celles qu'il fait (a). Comment les Souverains ne le feroient-ils point par les leurs !

Les regles des Contrats entre un Prince & fes Sujets sont donc les mêmes que celles qui doivent s'observer de particulier à particulier. Lorfqu'un Sujet a vendu quelque chofe à fon Prince, le Prince n'eft pas moins tenu de payer le Sujet, que tout autre acquéreur y feroit obligé. A la bonne heure que les befoins publics fufpendent pour un tems l'effet des promesses du Prince; mais il doit avoir perpétuellement la volonté de remplir fon engagement, & il faut qu'à la fin que le Sujet foit payé de ce qui lui est dû, & dédommagé du préjudice que le retardement peut lui avoir caufé.

Le Souverain peut contraindre fon Sujet de lui payer ce qui lui est dû; mais le Sujet, créancier du Prince, n'a pour lui que l'autenticité de l'engagement. Les Princes permettent, il est vrai, à leurs Sujets d'expliquer leurs prétentions devant les Juges qu'eux-mêmes ils leur donnent; mais les Jugemens qui peuvent les déclarer bien fondées, ne contraignent pas les Princes à payer, s'ils ne le veulent, parce que perfonne n'a une autorité coactive fur le Prince de maniére que ces fortes de procédures font fondées fur l'équité naturelle, plutôt que fur le Droit public. Un Prince sage ne refusera jamais d'exécuter un jugement, s'il fait réflexion que fon éminente dignité & fa propre conservation ne font fondées que fur la bonne foi des conventions, & que rien n'est (a) Hieronym. 45.

:

LXVIII.

Il doit exécuter

fait avec des Sujets

plus honteux à un homme établi pour faire regner

regner la juftice; que de la refuser, au gré de fon intérêt particulier.

Si les Sujets obtiennent de leur Souverain la même justice qu'ils pourroient forcer les particuliers de leur rendre, c'est une marque certaine de la félicité de fon regne.

Les Sujets qui fe révoltent, violent leurs engagemens les Traités qu'il envers leur Souverain, & fe privent de la protection que le rebelles. Souverain leur devoit. S'ils font foumis par les armes, le Souverain irrité peut fe rendre telle juftice qu'il juge à propos; mais s'il eft entré dans quelque accommodement avec eux, il doit tenir les paroles qu'il a données.

eux,

Qu'il faffe paffer au fil de l'épée les Sujets révoltés qu'il prend les armes à la main; qu'il faccage une Ville rebelle, qui, bien loin de recourir à fa clémence, fe défend jusqu'à la derniére extrémité; il le peut tant qu'il n'a pas traité avec & qu'il n'a agi avec eux que comme avec des révoltés. Il le peut, dis-je, fauf le droit de repréfailles, fi les révoltés font en état & en volonté de les exercer; mais qu'il observe les loix de la guerre, une fois qu'il a reconnu les révoltés comme de juftes ennemis; qu'il obferve les Tréves ; qu'il conferve aux Trompettes & aux Hérauts, le privilége qui les rend inviolables. Si la guerre civile a eu des suites confidérables, & que le droit des armes s'exerce de part & d'autre, le Prince eft cenfé s'être dépouillé, en quelque façon du caractére de Souverain à l'égard des révoltés, & les droits de la Souveraineté font fufpendus. C'eft une guerre d'égal à égal, & le Souverain doit garder religieufement les capitulations qu'il accorde aux affiégés, & toutes les conventions qu'il fait pour terminer la guerre.

Par le Traité, les rebelles redeviennent membres de l'Eils prêtent à leur Souverain un nouveau ferment, & ils ne lui promettent une fidéle ohéiffance, qu'à condition

rat ›.

qu'il obfervera, de fon côté, ce à quoi il s'eft engagé

envers eux.

LXIX. Il doit aufli excuter les conventions qu'il fait

d'un autre Prince.

Si l'on doit penfer ainfi des promeffes qu'un Souverain fait à fes Sujets, à combien plus forte raison de celles qu'il fait aux Sujets d'un autre Etat ! Quel étranger oferoit fe fier avec les Sujets à un Prince, fi le Prince avoit le droit d'éluder l'exécution d'un Ecrit qui a été fait sous la foi publique, & qui, étant paffé avec un étranger, l'a été néceffairement avec connoiffance de caufe. Il eft indigne de la Majefté fuprême de chercher à éluder des engagemens d'autant plus facrés, que celui qui en demande l'exécution n'a, pour l'obtenir, que la bonne foi même du Souverain fur laquelle il a compté.

LXX.

Mais fi le Souverain prétend avoir été lézé dans un Con- Il ne peut oppotrat, lui qui a droit de reftituer en entier ceux de fes Sujets fer la létion. qui ont reçû une lésion considérable, laquelle le droit Romain veut qui foit de plus de la moitié du jufte prix, fe refuferat-il la juftice qu'il rend aux autres? Ne peut-il pas annuller le Contrat qui le concerne, par la même raison qu'il annulleroit celui qui regarderoit un particulier ? Non. Il doit confidérer qu'étant le fuprême Légiflateur de fon Etat & traitant avec fes Sujets, non en qualité de Souverain, mais comme feroit un particulier, il eft cenfé avoir eu devant les yeux les Loix pofitives du pays qui reglent la valadité des conventions entre particuliers. Celui qui fait les Loix, peut-il être cenfé les ignorer? Maître de faire telles Ordonnances qu'il juge à propos, s'il s'eft difpenfé de leur rigueur, s'il ne les a point fuivies dans les affaires qui le regardent, il a, par fa présence & par fa volonté, validé l'acte qu'il a fait. C'est une indignité à un Prince d'employer les petites fubtilités des particuliers. Qui feroit le Juge de la prétendue léfion! Seroit-ce le Souverain? Mais l'exécution d'une convention doit-elle être foumise à la volonté de l'une des Parties! Tome IV.

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