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HARPAGON.

Doucement, mon fils, s'il vous plaît.

CLEANTE.

C'est un compliment que je fais pour vous à Ma⚫ dame. HARPAGON.

Mon Dieu,j'ay une langue pour m'expliquer moimême, & je n'ay pas befoin d'un Interprete comme vous. Allons, donnez des fieges.

EROSIN E.

Non, il vaut mieux que de ce pas nous allions à la foire, afin d'en revenir plûtôt, & d'avoir tout le temps enfuite de vous entretenir.

HARPAGON.

Qu'on mette donc les chevaux au caroffe. Je vous prie de m'excufer, ma Belle, fi je n'ay pas songe à vous donner un peu de collation avant que de partir. CLEANTE..

J'y ay pourveu, mon Pere, & j'ay fait apporter ici quelques baffins d'oranges de la Chine, de citrons doux, & de confitures, que j'ay envoyé querir de vôtre part.

HARPA GON, bas à Valere.

Valere.

VALERE, à Harpagon.

Il a perdu le fens.

CLEANTE..

Eft-ce que vous trouvez, mon Pere, que ce ne foit pas affez? Madame aura la bonté d'excufer cela, s'il luy plaît.

MARIA NE..

C'eft une chofe qui n'étoit pas néceffaire.

CLEANT E.

Avez-vous jamais veu, Madame, un diamant. plus vif que celuy que vous voyez que mon Pere a au doigt?

MARIAN E.

Jl eft vray qu'il brille beaucoup.

CLEANTE.

11 Pote du doigt de fon Pere, & le

donne à Mariane.

Il faut que vous le voyiez de prés.

MARIA NE.

Il eft fort beau,fans doute,& jette quantité de feux

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CLE

CLEANTE.

Il fe met au devant de Mariane, qui
le veut rendre.

Non Madame, il eft en de trop belles mains. C'eft un prefent que mon Pere vous fait.

Moy!

HARPAGON.

CLEANT E.

N'eft-il pas vray, mon Pere, que vous voulez que Madame le garde pour l'amour de vous? HARPAGON, àpart à fon Fils.

Comment?

CLEANTE.

Belle demande. Il me fait figne de vous le faire

accepter.

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Vous moquez-vous? Il n'a garde de le reprendre, HARPAGON. à part.

J'enrage!

Ce feroit...

MARIAN E.

CLEANTE, en empêchant toujours
Mariane de rendre la bagne.

Non, vous dis-je, c'est l'offenfer.

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Vous voyez qu'il fe defefpere.

HARPAGON, bas à fon Fils,
en le menaçant.

Bourreau que tu es!

CLEANTE.

Mon Pere, ce n'eft pas ma faute. Je fais ce que je

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puis pour l'obliger à la garder, mais elle eft obftinée. HARPAGON, bas à son Fils,

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avec emportement.

CLEANTE.

Vous étes caufe, Madame, que mon Pere me querelle.

HARPAGON, bas à fon Fils,
avec les mêmes grimaces.

Le coquin!

CLEANTE.

Vous le ferez tomber malade. De grace, Madame, ne refiftez point davantage.

FROSINE.

Mon Dieu, que de façons! Gardez la bague, puis que Monfieur le veut.

MARIANE.

Pour ne vous point mettre en colere, je la garde maintenant; & je prendray un autre temps pour vous la rendre.

SCENE VIII.

HARPAGON, MARIANE, FROSINE CLEANTE, BRINDAVOINE,

ELISF.

BRINDA VOINE.

Monfieur, il y a là un homme qui veut vous par

Ier.

HARPAGON.

Dy-luy que je fuis empêché, & qu'il revienne une autre fois.

BRINDAVOINE:

Il dit qu'il vous apporte de l'argent.

HARPA GŎN.

Je vous demande pardon. Je reviens tour à l'heure.

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SCENE IX.

HARPAGON, MARIANE, CLEANTE, ELISE, FROSINE, LA MERLUCHE.

LA MERLUCHE.

Il vient en courant, & fait tomber Harpagon:

Monfieur...

HARPAGON.

Ah, je fuis mort!

CLEANT E.

Qu'eft-ce, mon Pere? vous étes-vous fait mal?TM
HARPAGON.

Le traître affurément a receu de l'argent de mes debiteurs, pour me faire rompre le coû.

VALER E.

Cela ne fera rien.

LA MERLUCHE.

Monfieur, je vous demande pardon, je croyois bien faire d'acourir vite.

H-AR PAGON.

Que viens-tu faire ici, Bourreau?.

LA MERLUCHE..

Vous dire que vos deux chevaux font déférrez.
HARPAGON.

Qu'on les mene promptement chez le Marêchal.
CLEANTE.

En attendant qu'ils foient ferrez, je vais faire pour vous, mon Pere, les honneurs de vôtre logis, & conduire Madame dans le Jardin, où je feray porter la collation.

HARPA GON.

Valere, aye un peu l'œil à tout cela; & prep foin, je te prie, de m'en fauver le plus que tu pourras pour le renvoyer au Marchand.

C'eft affez.

VALER E.

HARPAGON.

Fils impertinent, as-tu envie de me ruïner?

Ein du treifiéme Afte.

ACTE

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Entrons ici, nous ferons beaucoup mieux. Ii Rn'y a plus autour de nous perfonne de fufpect, &

nous pouvons parler librement.

ELISE.

Ouy, Madame, mon Frere m'a fait confidence de la paffion qu'il a pour vous. Je fçay les chagrins & les déplaifirs que font capables de caufer de pareilles traverfes; & c'eft, je vous affûre, avec une tendreffe extréme que je m'intéresse à vôtre avanture. MARIAN E.

C'est une douce confolation, que de voir dans fes intérêts une perfonne comme vous; & je vous conjure, Madame, de me garder toûjours cette généreufe amitié, fi capable de m'adoucir les cruautez de la fortune.

FROSINE.

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Vous étes, par ma foy, de malheureuses gens l'un & l'autre, de ne m'avoir point, avant tout ceci avertie de vôtre affaire! Je vous aurois fans doute détourné cette inquiétude, & n'aurois point amené les chofes où l'on voit qu'elles font.

CLEANTE.

Que veux-tu? c'eft ma mauvaise destinée qui l'a voulu ainfi. Mais, belle Mariane, quelles réfolutions font les vôtres ?

MARIANE.

Hélas, fuis-je en pouvoir de faire des réfolutions? & dans la dépendance où je me voy, puis-je former que des fouhaits?

CLEANTE.

Point d'autre appuy pour moy dans votre cœur que de fimples fouhaits? point de pitié officieufe? point de fecourable bonté; point d'affection agiflantel Cec 7

MA

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