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LE MUFTI.

Ti ftar nobile e non ftar fabbola.
Pigliar fchiabbola.

Les Turcs repétent les mêmes mots,mettant tous le Sabre à la main, & fix d'entre eux dancent autour du Bourgeois, auquel ils feignent de donner piufieurs coups de Sabre.

Le Mufti commande aux Turs de bâtonner le Bourgeois, & chante les paroles qui fuivent.

LE MUFTI.

Dara dara,

Baftonara baflonara.

Les Turcs repétent les mêmes paroles, & luy donnent plufieurs coups de bâton en cadence. Le Mufti aprés l'avoir fait bâtonner, luy dit en chantant.

LE MUFTI.

Non tener hont a

Queftar flar l'ultima affronta.

Les Turcs repétent les mémes vers.

Le Mufti recommence une invocation, & fe retire aprés la cérémonie avec tous les Turcs, en dançant & chantant avec plusieurs inftrumens à la Tur

que.

Fin du Quatrieme Acte.

ACTE CINQUIE'ME.

SCENE I.

MADAME JOURDAIN, MONSIEUR
JOURDAIN.

A

Me. JOURDAIN.

H mon Dieu mifericorde! Qu'est-ce que c'est donc que cela? Quelle figure! Eft ce un Momon que vous allez porter; & eft-il temps d'aller en Mafque? Parlez donc, qu'est-ce que c'est que ceci ? Qui vous a fagoté commecela?

M. JOUR

M. JOURDAIN.

Voyez l'impertinente, de parler de la forte à Mamamouchi.

Me. JOURDAIN.

Comment donc?

M. JOURDAIN.

Ouy, il me faut porter du refpe& maintenant, &

l'on vient de me faire Mamamouchi.

Me. JOURDAIN.

Que voulez-vous dire avec vôtre Mamamouchi?
M. JOURDAIN.

Mamamouchi, vous dis-je. Je fuis Mamamouchi,
Me. JOURDAIN.

Quelle bête eft-ce-là?

M. JOURDAIN.

Mamamouchi, c'eft-à dire en nôtre langue, Pak

din.

Me. JOURDAIN.

Baladin! Eftes-vous en âge de dancer des Balles
M. JOURDAIN.

Quelleignorante! Je dis Paladin; c'eft une Dignite dont on vient de me faire la cérémonie.

Me. JOURDAIN.

Quelle cérémonie donc?

M. JOURDAIN

Mahameta per Jordina.

Me. JOURDAIN,

Qu'est-ce que cela veut dire ?

M. JOURDAIN.
Jordina, c'est-à-dire Jourdain.

Me. JOURDAIN

Hé bien quoy, Jourdain ?

M. JOURDAIN.

Voler far un Paladina de Fordina.
Me. JOURDAIN.

Comment?

Dar turbanta con galera.

M.

JOURDAIN.

Me.

JOURDAIN,

Qu'eft-ce à dire cela?

M. JOURDAIN

Per deffender Palestina.

Me. JOUR

Me. JOURDAIN.

Que voulez-vous donc dire?

M. JOURDAIN

Dara dara baftonnara.

Me. JOURDAIN. Qu'est-ce donc que ce jargon-là?

M. JOURDAIN.

Non tener honta quefta ftar l'ultima affronta.
Me. JOURDAIN.

Qu'est-ce que c'est donc que tout cela?
M. JOURDAIN, dance & chante.
Hon la ba, ba la chou, ba la ba, bala da.
Me. JOURDAIN.

Helas! mon Dieu, mon mary eft devenu fou.
M. JOURDAIN, fortant.

Paix, infolente, portez respect a Monfieur le Ma mamouchi.

Me. JOURDAIN.

Où eft ce qu'il a donc perdu l'efprit? Courons l'empêcher de fortir. Ah, ah, voici juftement le refte de nôtre écu. Je ne voy que chagrin de tous les côtez. Elle fort.

SCENE II.

DORANTE, DORIMENE.

DORANTE.

Oui, Madame, vous verrez la plus plaifante chofe qu'on puiffe voir; & je ne croy pas que dans tout le monde il foit poffible de trouver encore un homme auffi fou que celuy-là: Et puis, Madanie, il faut tâcher de fervir l'amour de Cleonte, & d'appuyer toute la mafcarade. C'eft un fort galant homme, & qui mérite que l'on s'intéreffe pour luy.

DORIMENE.

J'en fais beaucoup de cas, & il eft digne d'une bonne fortune.

DORANTE.

Outre cela, nous avons ici, Madame, un ballet qui nous revient, que nous ne devons pas laifier perdre, & il faut bien voir fi mon idee pourra reüflir.

Tome 111.

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DORIMENE.

J'ay ven là des apprêts magnifiques, & ce font des chofes, Dorante, que je ne puis plus fouffrir. Oui, je veux enfin vous empêcher vos profufions; & pour rompre le cours à toutes les dépenfes que je vous vois faire pour moy, j'ay réfolu de me marier promptement avec vous. C'en eft le vray fecret, & toutes ces chofes finiffent avec le mariage.

DORAN TE.

Ah! Madame, eft-il poffible que vous ayez pů prendre pour moy une fi douce réfolution?

DORIMENE.

Ce n'eft que pour vous empêcher de vous ruïner; & fans cela je vois bien qu'avant qu'il fût peu, vous n'auriez pas un fou.

DORANTE.

Que j'ay d'obligation, Madame, aux foins que vous avez de conferver mon bien ! Il eft entierement à vous, aufli bien que mon coeur, & vous en uferez de la façon qu'il vous plaira

DORIM EN E.

J'uferay bien de tous les deux. Mais voici vôtre home; la figure en eft admirable.

SCENE III.

MONSIEUR JOURDAIN, DORANTE,
DORIMENE,

DORANTE.

Monfieur, nous venons rendre hommage, Madame, & moy, à votre nouvelle Dignite, & nous réjouir avec vous du mariage que vous faites de vôtre Fille avec le Fils du grand Turc.

M. JOURDAIN, aprés avoir fait
les reverences à la Turque.

Monfieur, je vous fouhaite la force des Serpens, &la prudence des Lions.

DORIMENE.

J'ay été bien aife d'être des premieres, Monfieur, venir vous feliciter du haut degré de gloire où vous etes monté.

M.

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M. JOURDAIN.

Madame, je vous fouhaite toute l'année votre Rofier fleury; je vous fuis infiniment obligé de prendre part aux honneurs qui m'arrivent, & j'aybeaucoup de joye de vous voir revenue ici pour vous faire les trés-humbles excufes de l'extravagance de ma femme.

DORIMENE.

Cela n'eft rien, j'excufe en elle un pareil mouvement; vôtre cœur luy doit être précieux, & il n'est pas étrange que la poffeffion d'un homme comme vous puiffe infpirer quelques allarmes.

M. JOURDAIN.

La poffeffion de mon cœur eft une chose qui vous eft toute acquife.

DORANTE.

Vous voyez, Madame, que Monfieur Jourdain n'eft pas de ces gens que les profperitez aveuglent, & qu'il fçait dans fa grandeur connoitre encore fes

amis.

DORIM EN E.

C'est la marque d'une ame tout-à-fait genereufe.

DORANTE.

Où eft donc Son Alteffe Turque? Nous voudrions bien, comme vos amis, luy rendre nos devoirs.

M. JOURDAIN.

Le voilà qui vient, & j'ay envoyé querir ma Fille pour luy donner la main.

SCENE IV.

CLEONTE habille en Turc, COVIELLE,
MONSIEUR JOURDAIN, &c.

DORANT E.

Monfieur, nous venons faire la reverence à Vô

tre Alteffe, comme amis de Monfieur vôtre Beau-Pere, & l'affurer avec refpect de nos trés-humbles fervices.

M. JOURDAIN.

Où eft le Truchement, pour luy dire qui vous

000 2

étes,

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