Page images
PDF
EPUB

ދ

Vous ne fçavez?

VALER E.

La réponse eft honnête.

MARIANE.

Non.

VALERE.

Non?

MARIANE.

Que me confeillez-vous?

VALER E.

Je vous confeille, moi, de prendre cet époux.

MARIANE.

Vous me le confeillez?

VALER E.

Ouy.

MARIANE.

Tout de bon?

Sans doute,

VALER E.

Le choix eft glorieux, & vaut bien qu'on l'écoute.

MARIANE.

Hé bien, c'eft un confeil, Monfieur, que je reçois.

VALERE.

Vous n'aurez pas grand' peine à le fuivre, je crois.
MARIANE.

Pas plus qu'à le donner en a fouffert vôtre ame.

VALER E.

Moi, je vous l'ai donné pour vous plaire, Madame.
MARIANE.
Et moi je le suivrai, pour vous faire plaifir.

DORIN E.

Voyons ce qui pourra de ceci réüffir.

VALER E.

C'est donc ainfi qu'on aime? & c'étoit tromperie,
Quand vous...

MARIANE.

Ne parlons paint de cela, je vous prie.
Vous m'avez dit tout franc, que je dois accepter
Celuy que pour époux, on me veut présenter:
Et je déclare, moi, que je prétens le faire,
Puis que vous m'en donuez le confeil falutaire.

VALER E.

Ne vous excufez point fur mes intentions,

Vous aviez pris déja vos réfolutions;
Et vous vous faififfez d'un prétexte frivole,
Pour vous autorifer à manquer de parole.
MARIANE

Il eft vrai, c'eft bien dit.

VALER E

Sans doute, & vêtre cœur

N'a jamais eu pour moy de véritable ardeur.
MARIA N E.

Hélas! permis à vous d'avoir cette pensée,
VALER E.

Oui, cui, permis à moi; mais mon ame offenfée
Vous previendra, peut-être, en un pareil-deffein
Et je fçais où porter, & mes veux, & ma main.
MARIANE.

Ah! je n'en doute point ;:& les ardeurs qu'excite Le mérito,

VALER F.

Mon Dieu, laiflons-là le mérite; J'en ai for peu, fans doute, & vous en faites foi: Mais j'efpere aux bontez qu'une autre aura pour.

moi,

Et j'en fçai de qui l'ame, à ma retraite ouverte,
Contentira fans hente à à reparer ma perte.

MARIANE.

La perte n'eft pas grande, & de ce changement
Vous vous confolerez affez facilement.

VALER E.

J'y ferai mon poffible, & vous le pouvez croire.
Un cceur qui nous oublie, engage nôtre gloire.
Il faut à l'oublier, mettre auffi tous nos foins,
Si l'on n'en vient à bout,on le doit feindre au moins
Et cette lâcheté jamais ne fe pardonne,

De montrer de l'amour pour qui nous abandonne.
MARIA NE.

Ce fentiment, fans doute, eft noble, & relevé.
VALER E.

Fortien, & d'un châcun il doit être approuvé.
Hé quoi vous voudriez qu'à jamais, dans mon ame,:
Je gardaffe pour vous les ardeurs de ma flame?
Et vous vife, à mes yeux, paffer en d'autres bras,
Sans mettre ailleurs un cœur dont vous ne voulez

pas?

MAS

MARIA N.E..

Au contraire, pour moi, c'est ce que je souhaite ;
Et je voudrois déja que la chose fût faite.

VALER E.

Vous le voudriez ?

MARIANE.
Oui.

C'eft affez m'infulter,

VALER E.

Madame, & de ce pas-je vais vous contenter.
Il fait un pas pour s'en aller, &revient toûjours.

Fort bien.

MARIAN E.

VALERE.

Souvenez-vous au moins, que c'eft vous même, Qui contraignez mon coeur à cet effort extrême,

Oûi.

MARIAN E.

VALERE.

Et que le deffein que mon ame conçoit, N'eft rien qu'à vôtre exemple.

MARIANE.

* A mon exemple, foit VALER.E.

Suffit; yous allez être à point nommé servic

Tant-mieux.

MARIANE.

VALER E.

Vous me voyez, c'eft pour toute ma vie.
MARIA NE.

A la bonne heure..

Euh?

VALERE.

It's'en va; & lors

qu'il eft vers la porte, il fe retourne. MARIA NE.

[blocks in formation]

MARIANE.

Adieu, Monfieur.

DORIN E.

Pour moi, je penfe

Que vous perdez l'efprit, par cette extravagance;
Et je vous ay laiffé tout du long quereller,
Pour voir où tout cela pourroit enfin aller.
Hola, Seigneur Valere.

Venez ici.

Elle va l'arrêter par le bras, & luy fait mine de grande résistance. VALER E.

He, que veux tu, Dorine?
DORIN E.

VALER E.

Non, non, le dépit me domine.

Ne me détourne point de ce qu'elle a voulu.

Arrêtez.

Ah.

DORINE.

VALER E.

Non, vois-tu, c'est un point réfolu.
DORIN E.

MARIA NE.

Il fouffre à me voir, ma prefence le chaffe; Et je ferai bien mieux, de lui quitter la place.

DORINE

Elle quitte Valere, & court à Mariane.

A l'autre. Où courez-vous?

MARIANE.

Laifle.

DORINE.

Il faut revenir.

MARIANE.

Non, non, Dorine, en vain tu veux me retenir.

VALER E.

Je vois bien que ma veuë eft pour elle un fupplice; Et fans doute, il vaut mieux que je l'en affranchiffe. DORINE

Elle quite Mariane, & court à Valere. Encor? Diantre foit fait de vous, fi je le veux, Ceflez ce badinage, &venez çà tous deux.

Elle les tire l'un & l'autre.

VALER E.

Mais quel eft ton deffein ?

MARIA NE.

Qu'eft-ce que tu veux faire?

DORIN E.

Vous bien remettre ensemble, & vous tirer d'affaire,
Eftes-vous fou, d'avoir un pareil démêlé ?
VALER E.

N'as-tu pas entendu comme elle m'a parlé?
DORIN E.

Eftes-vous folle, vous, de vous être emportée ?
MARIANE.

N'as-tu pas veu la chofe, & comme il m'a traittée ?
DORIN E.

Sottife des deux parts. Elle n'a d'autre foin,
Que de fe conferver à vous, j'en fuis témoin.
Il n'aime que vous feule, & n'a point d'autre envie
Que d'être vôtre époux; j'en répons fur ma vie.
MARIA NE.

Pourquoi donc ne donner un femblable confeil?
VALERE.

Pourquoi m'en demander fur un fujet pareil?

DORINE.

Vous étes fous tous deux ; ça, la main l'un,& l'autre Allons, vous.

VALERE

En donnant fa main à Dorine.
A quoy bon ma main ?

DORIN E.

Ah! çà, la vôtre.

MARIANE

En donnant auffi fa main.

De quoy fert tout cela?

DORIN E.

Mon Dieu, vite, avancez.

Vous vous aimez tous deux plus que vous ne pensez.
VALER E.

Mais ne faites donc point les chofes avec peine,
Et regardez un peu les gens fans nulle haine.
Mariane tourne l'œil fur Valere, & fait un petit foåris.
DORIN E.

A vous dire le vray, les amans font bien fous!

« PreviousContinue »