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tiques. Je vais en présenter trois exemples. Vous me pardonnerez de ne pas les choisir dans les auteurs classiques, quoique ce soit dans leurs ouvrages qu'on trouve les vrais modèles du raisonnement. J'ai pensé qu'il ne serait mal de les prendre un peu techniques, un peu scolastiques même. Ils resteront plus facilement dans votre mémoire.

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Premier exemple. Pascal sait l'arithmétila géométrie, l'algèbre; donc il sait les mathématiques. Addition. On voit que le seul mot, mathématiques, équivaut à la réunion des trois mots, arithmétique, géométrie, algèbre; il en est la somme.

Deuxième exemple. Pascal sait les mathématiques; donc il sait l'arithmétique. Soustraction. Ici, d'une somme totale, les mathématiques, nous retranchons une somme partielle; ou, si vous l'aimez mieux, de l'idée composée mathématiques, nous retranchons l'idée moins composée, arithmétique.

Troisième exemple. Pascal connaît la géométrie ; il connaît donc cette science dont Eu; clide nous a le premier donné des élémens.

Substitution. En effet, la science dont Euclide nous a le premier donné des élémens, et la géométrie, sont une seule et même chose.

Lisez Virgile, Cicéron, Corneille, Bossuet, La Fontaine, La Bruyère; lisez tous les grands auteurs; lisez les plus médiocres, les plus mauvais, si vous pouvez: vous ne trouverez jamais dans leurs raisonnemens que les trois formes correspondantes aux trois procédés des mathématiciens, parce qu'il est impossible à l'esprit humain, quand il raisonne, d'aller autrement que par compositions, ou décompositions, ou par de simples substitutions.

Maintenant, sous laquelle de ces trois formes se présentera le génie pour mériter le nom de créateur?

Sera-ce sous celle de simple substitution? mais la substitution ne faisant que mettre une expression à la place d'une autre, et montrer sous d'autres termes ce qu'on savait déjà, sur quel fondement pourrait-on lui accorder la prérogative de faire quelque chose de rien?

Sera-ce sous la forme de soustraction? mais si la soustraction, si l'art des déductions peut annoncer une grande sagacité, une grande justesse d'esprit, jamais on n'honorera du nom de créateur, un talent qui se borne à nous faire

apercevoir une idée qui existait dans une autre idée.

Reste la troisième forme, celle qui unit ce qui était divisé, qui rassemble ce qui était épars, qui recueille cent beautés dispersées sur différens objets de la nature, pour en faire une beauté unique, un beau idéal, un tout, préexistant il est vrai, dans ses parties isolées, mais qui, dans leur réunion, va nous offrir des combinaisons nouvelles et jusqu'alors inconnues. Les hommes, charmés et reconnaissans du plaisir que leur avaient procuré les auteurs de ces fictions ingénieuses, ne crurent pouvoir les récompenser dignement, qu'en les clamant des génies créateurs,

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SEPTIÈME LEÇON.

Éclaircissemens sur la méthode, sur le système des facultés de l'âme, et en particulier sur la liberté et sur l'attention.

J'AI recu, de vive voix et par écrit, plusieurs observations que je vais vous communiquer. Ce sera le sujet de la leçon d'aujourd'hui.

Les uns désirent que je reproduise le système des facultés de l'âme ; d'autres, que j'insiste particulièrement sur la liberté ; d'autres, sur la nature de l'attention: on me reproche d'aller trop vite, et l'on me reproche aussi d'aller trop lentement.

Je répondrai d'abord à ces derniers ; et quoiqu'il ne paraisse pas facile de les satisfaire à la fois, je veux, en justifiant la marche que nous suivons, essayer de justifier en même temps et ceux qui se plaignent que nous allons trop vite, et ceux qui trouvent que nous allons trop lentement.

Si le cours de philosophie est bien ordonné

dans toutes ses parties, si les leçons sont bien systématisées, qu'importe, après tout, que nous nous arrêtions plus long-temps sur une seule question, ou que nous en parcourions une longue suite avec rapidité? Si le cours se compose de trente ou de quarante leçons régularisées suivant les lois de l'analyse, la dixième ou la vingtième, ou toute autre est une conséquence de celles qui précèdent, et sert ellemême de principe à celles qui suivent. Chaque leçon, à quelque distance du commencement ou de la fin qu'on la prenne, contient en quelque sorte, le cours tout entier : lors donc qu'on nous croit stationnaires, il peut se faire que nous avançions; et, lorsqu'on nous voit avancer, il est possible que nous soyons stationnaires.

S'il existait un système saus défaut, il serait dans toutes ses parties, toujours le même, et toujours divers.

Unité, diversité; certitude, progrès : certitude dans l'unité; progrès dans la diversité. Voilà en deux mots tout l'artifice des connais→ sances qui s'élèvent au-dessus des simples sen

sations.

Et qu'on se garde de penser qu'il y ait contradiction dans ces énoncés qui mettent à dé

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