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INVOCATION

AUX AMOURS ET AUX GRACES.

VENEZ, Amours, venez monter ma lyre;
Grâces, daignez inspirer mes accords.

Je veux chanter l'enfant qui sut m'instruire,
Et pour jamais m'enchaîner sur ces bords;
Je veux chanter le dieu qui pour Thémire
Blessa mon cœur, qui toujours le déchire,
Dont le flambeau me suivra chez les morts.
Venez, Amours, venez monter ma lyre;
Grâces, daignez inspirer mes accords

Que dans mes vers la tendresse soupire;
Doux sentiment, répands-y ces transports,
Cet intérêt qui plaît, émeut, attire,
Ce feu par qui tout brille, tout respire,
Tout s'embellit des charmes les plus forts.
Venez, Amours, venez monter ma lyre;
Grâces, daignez inspirer mes accords.

Que de mes chants tout ressente l'empire: Coulez, mes vers, sans peine et sans efforts;

Que la Beauté, l'Amour, puissent vous lire,
Vous accorder la faveur d'un sourire!
Voilà mon prix ; il vaut tous les trésors.
Venez, Amours, venez monter ma lyre;
Grâces, daignez inspirer mes accords.
D'ARNAUD.

SUR LE PRINTEMPS,

ODE IMITÉE D'HORACE.

Nos

os bois reprennent leurs feuillages;
Après les noirs frimas, le printemps a son tour;
Et le soleil plus pur, dissipant les nuages,
Sans obstacles répand le jour.

Déjà dans la plaine fleurie

Le berger laisse errer ses troupeaux bondissans,
Et du son de sa flûte Echo même attendrie,
En imite les doux accens.

Cythérée avec ses compagnes,

Le soir, d'un pas léger, danse au bord des ruisseaux, Tandis que son époux ébranle les montagnes

Du bruit fréquent de ses marteaux.

Couronnons-nous de fleurs nouvelles;

Nous en verrons bientôt l'éclat s'évanouir; Profitons du printemps, qui passera comme elles ; L'âge nous presse d'en jouir.

Hâtons-nous; tout nous y convie; Saisissons le présent sans soin de l'avenir; Craignons de perdre un jour, un instant d'une vie Que la mort doit sitôt finir.

Sa rigueur n'épargne personne;

Tout l'effort des humains n'interrompt point ses lois, Et de la même faux la cruelle moissonne

Les jours des bergers et des rois.

Sitôt que,

froids et vains fantômes,

Des fleuves redoutés nous toucherons les bords,
Nous n'aurons plus d'Iris dans ces sombres royaumes:
Il n'est point d'amours chez les morts.

On n'y sait plus chanter, ni rire;

Ils n'ont plus ce nectar qui comble ici nos vœux;
Ces festins où, des rois contrefaisant l'empire,
Nous nous croyons plus heureux qu'eux.

Des jours que la Parque nous file,
Consacrons donc le cours à Cypris, à Bacchus ;

Eh! que

faire sans eux d'une vie inutile?

Il vaudrait autant n'être plus.

LA MOTTE.

SUR LE PRINTEMPS,

ODE ADRESSÉE A M. DE TERMES.

ENFIN, Termes, les ombrages

Reverdissent dans les bois;

L'hiver et tous ses orages

Sont en prison pour neuf mois:
Enfin la neige et la glace
Font à la verdure place;
Enfin le beau temps reluit;
Et Philomèle, assurée
De la fureur de Térée,

Chante aux forêts jour et nuit.

Déjà les fleurs qui bourgeonnent
Rajeunissent les vergers;

Tous les échos ne résonnent
Que de chansons de bergers
Les jeux, les ris et la danse
Sont partout en abondance;
Les délices ont leur tour;
La tristesse se retire,
Et personne ne soupire,

S'il ne soupire d'amour.

Les moissons dorent les plaines;
Le ciel est tout de saphirs;
Le murmure des fontaines
S'accorde au bruit des zéphirs;
Les foudres et les tempêtes
Ne grondent plus sur nos têtes,
Ni des vents séditieux

Les insolentes colères

Ne poussent plus les galères
Des abîmes dans les cieux.

Ces belles fleurs que nature
Dans les campagnes produit,
Brillent parmi la verdure
Comme des astres la nuit :
L'Aurore, qui dans son âme
Brûle d'une douce flamme,
Laissant au lit endormi

Son vieil mari, froid et pâle,
Désormais est matinale
Pour aller voir son ami.

Termes, de qui le mérite
Ne se peut trop estimer,
La belle saison invite
Chacun au plaisir d'aimer:
La jeunesse de l'année
Soudain se voit terminée.

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