>> Troncs noirs et dépouillés, dont la tige robuste » Etale tout l'honneur d'une vieillesse auguste, » Vous entendrez mes chants; 4 » Redites-les, rochers, dans vos profondeurs sombres; >> Bois épais, consacrés par l'horreur de vos ombres, » Ecoutez mes accens. >> Au milieu des cités, loin de ces bords sauvages, » Dans le cercle des lois, des mœurs et des usages, >> Tout homme est resserré. » Il est couvert d'un masque et flétri sous les chaînes, » Et soumis aux erreurs d'âmes faibles et vaines » Dont il est entouré. » Ah! dans ce lieu désert où l'on pense sans maître, » J'appelle les humains qui des droits de leur être » Sont encore jaloux. Alpes, c'est à vos pieds, loin d'un joug méprisable, » Que l'esprit est hardi, fécond, inébranlable, » Immense comme vous. » Je m'élève; je crois être assis sur vos cimes » Sans crainte, sans dédain mon œil les envisage; >> Où sont-ils ces guerriers dont la valeur altière » Le temps a mis un terme à leur illustre audace; » Et vous, sur vos rochers, vous conservez la trace » De leurs fameux travaux. » Des siècles renaissans vous bravez la puissance; » Nous, qui pouvons sentir l'orgueil de l'existence, » Nous repaissons les vers: Nous, fiers de la raison et du titre de maîtres, » Nous vivons un moment, tandis qu'il est des êtres » Vieux comme l'univers. » Je ne le perdrai point l'instant de ma durée; » De ce jour, de cette heure à moi seul consacrée, » Je connais tout le prix. » Dans le sein du repos et de la solitude, » De mon propre bonheur faisant ma seule étude, » Mes jours seront remplis. >> Fleuves que je vois naître, enfans de ces montagnes, » Sujets de l'Océan, et trésors des campagnes, » Parlez; où fuyez-vous ? » Vous allez sur vos bords, dévoués au ravage, » Voir périr les mortels, victimes de leur rage » Et des rois en courroux. » Vous allez voir le sang ruisseler sur vos rives, » Les droits cruels du fer, les fureurs destructives, » Et les combats affreux. » Contez aux nations, que leurs forfaits punissent, » Que, près de ces rochers, d'où vos sources jaillissent, » Est le mortel heureux. » Ma main incessamment s'égare sur ma lyre; » Du tribunal des arts je crains peu la censure. » Mais quelle obscurité funèbre, menaçante, » L'air s'agite; il frémit, et l'écho solitaire » La nature en courroux plaît à mon âme émue; » J'aime dans ces horreurs qu'elle étale à ma vue >> Son auguste fierté. » Que l'éclair est brillant ! que la voix des orages » Grondant profondément dans le sein des nuages, » Parle avec majesté! » Il chantait; et les vents, dans leur course bruyante, Et, tandis que les cieux s'enflammaient sur sa tête, Enfin, la nuit plus sombre, enveloppant la terre, Aux tranquilles douceurs d'un L'invite à se livrer : repos nécessaire Mais, avant de revoir les foyers qu'il adore, LA HARPE. LES AVANTAGES DE LA VIEILLESSE. TEL EL qu'un cygne au bord du Méandre, Des derniers chants qu'il fait entendre, Et, nouveau Sophocle, j'aspire O mortel, dont le cœur avide Tu disparais, obscur nuage, Lance tes traits, Amour perfide; |